Beyrouth, mercredi 4 janvier 2006. Ereinté. Je viens de rentrer d'une longue balade pédestre dans les dédales de Beyrouth, et qui m'a conduit au “sanctuaire” de Rafic Hariri à Sahat Echouhada. Il fait bon. Beau. Une température printanière. Les filles commencent déjà à se mettre au court… J'ai débarqué dans la capitale libanaise, hier soir (mardi, ndlr). Il était écrit donc que j'entame la nouvelle année depuis Beyrouth… Je dois sillonner un peu la région, faire un saut en Syrie, prendre la température politique après la “bombe” Abdelhalim Kheddam… Il faut dire que cela a été rocambolesque dès l'aéroport. Pas celui d'Alger. Non, à Alger, c'était plutôt sans tracas. J'avais crainte que le visa ne me soit refusé, mais ce fut relativement simple : une note du journal, une photo et 2 400 DA (4 800 pour un visa de plusieurs entrées) et c'est gagné. Le billet par contre a réellement de quoi décourager : 68 000 DA et de grosses poussières. Il y a deux vols Alger-Beyrouth par semaine. Celui que j'ai pris part à 15h. En fait, il va jusqu'à Dubaï. Le vol a été ponctuel et tout s'est bien passé. 19h50, heure locale. L'Airbus A 330, qui nous transportait, se pose enfin sur le tarmac de l'aéroport international Rafic-Hariri de Beyrouth. Le pafiste ne veut au début rien savoir : “Sur la fiche de police, vous devez impérativement nous indiquer une adresse ou un nom d'hôtel. On ne peut pas vous laisser entrer sans une réservation ferme”, me signifie-t-il. Il me confie aux soins d'un gentil officier qui, dans un français haché, me redit la même chose avec le sourire. Finalement, le bureau de sécurité de l'aéroport se muant en agence de voyages me déniche un hôtel. On me laisse enfin fouler le sol de “Loubnan el habib”. D'entrée, deux jambes commerciales tenant un free-shop me souhaitent la bienvenue. En me dirigeant vers la sortie, je n'ai pas mis les pieds dehors que je me vois happé par une faune de chauffeurs de taxi. De guerre lasse, je suis l'un d'eux sans négocier. Quelle ne fut ma surprise de le voir ranger mon sac sur le siège arrière d'un énorme 4X4 américain. 30 $ la course ! Et ce n'est pas fini. Voilà qu'un autre type se rue vers moi. Je le prends au début pour un “moukhabaratié”, un de ces agents de renseignement qui pourrissent la vie des gens au Moyen-Orient. Il se révélera rabatteur pour des hôtels amis. Fouad, le chauffeur de taxi, était visiblement de mèche avec lui. Sans me laisser le temps d'en placer une, le rabatteur saisit son portable, appelle un hôtel (Liberty Tower, un 4 étoiles) et me réserve une chambre d'autorité. Tous les deux m'expliquent que partout ailleurs, il n'y avait pas de chambre à moins de 100 $, et que leur ami me faisait un prix à 70 $ si je louais une semaine. Sans que je puisse répondre, Fouad m'embarque au Liberty, tandis que son ami va avertir les services de sécurité de l'aéroport de ce “changement d'adresse”. J'arrive au Liberty, je me vois diligemment délesté de mes bagages par un valet alerte. L'hôtel est fort bien tenu. Le jeune patron me fait : “chay, un petit thé ?” Je le vois venir et je décline poliment avant de lui expliquer doctement que j'avais subi un véritable kidnapping et que je n'avais aucunement réservé chez lui. Je prends congé de lui et prie Fouad de me sortir illico de ce quartier guindé qui pue le chic et le fric. “Ici, vous êtes à Beyrouth et à Beyrouth, il n'y a pas d'hôtels moyens comme au Caire ou à Damas. Le ministère du Tourisme est très sévère. Alors, tous les hôtels sont chers. Dans les quartiers populaires, il n'y a pas d'hôtels. Tout ce que vous voyez là a été fait pour les riches. Beyrouth a été reconstruite pour les riches. Les pauvres s'écrasent.” Fouad poursuit : “Beyrouth est une ville très chère. Ici, les hôtels sont plus chers qu'à Paris. Tout est cher ici. Je dépense 100 $ par jour pour faire le plein d'essence.” Je prends une chambre au cœur du quartier Al-Hamra, au centre de Beyrouth, et entreprends de faire goulûment connaissance avec la mythique ville du Cèdre et de Fayrouz. Beyrouth ressemble à un immense sapin de Noël. La déco des fêtes de l'an orne magnifiquement rues et magasins. L'envoûtement opère déjà. Je dois y aller, j'ai rendez-vous avec un journaliste d'Assafir. À samedi !… M. B.