Accusée constamment de visées expansionnistes par le Maroc, l'Algérie vient, à la faveur des accords signés avec la Mauritanie, lors de la réunion de la 15e session de la haute commission mixte algéro-mauritanienne, démentir ces accusations d'une part, et démontrer qu'elle travaille dans le cadre du regroupement régional appelé l'UMA que les tergiversations marocaines continuent de compromettre la concrétisation, d'autre part. Par l'ouverture de la route Tindouf-Choum en Mauritanie, c'est l'argument marocain du mobile de l'ouverture d'un accès sur l'Atlantique qui motive le soutien de l'Algérie au Front Polisario qui vole en éclats. Cela, d'autant que la question sahraouie arrive à une phase très décisive au niveau des instances internationales. Le dossier étant entre les mains des Nations unies, l'Algérie soutenant depuis des années que l'ONU est l'instance arbitrale qui décidera dans le conflit, il ne devrait rester au Maroc, qui continue sa campagne de provocation et de répression des populations sahraouies, qu'à se soumettre aux décisions de cette instance. La route Tindouf-Choum apparaît, au-delà de ses effets attendus aux plans stratégique et économique, comme un grand pas, par son ampleur en tant que projet, vers la réalisation de la trop attendue UMA. Et avec la signature des neufs accords bilatéraux, ce sont toutes les lacunes politiques du Maroc qui sont mises à jour à partir du moment où le royaume de Mohammed VI a toujours hésité, quand il ne refuse pas clairement des négociations bilatérales sur les questions communes, loin de la question sahraouie. Sur ce plan-là, les nouveaux dirigeants mauritaniens sont plus pragmatiques et font montre d'une véritable volonté, non seulement de relancer le projet de l'UMA, mais d'une conscience de la nécessité d'une collaboration régionale pour faire face, que ce soit aux défis internes ou externes. C'est dans ce cadre que s'inscrivent les accords signés entre les deux parties ainsi que les gestes faits par les membres de la délégation algérienne à leurs homologues de Nouakchott. Le chantier de la construction de la route qui doit lier Tindouf à la gare de Choum ouvre des perspectives de coopération “insoupçonnées”. La lutte contre la contrebande qui gangrène l'économie des deux pays et dont le fief est dans la zone frontalière ne peut être que plus efficace. Se greffe à cela la lutte contre l'immigration clandestine - qui a fait de la Mauritanie une zone de transit - qui sera dans le cadre de cette coopération un dispositif de plus accompagnant les accords avec les pays d'accueil comme l'Espagne qui accélère ses négociations avec les pays de la région. Le ministre chargé des Affaires maghrébines, M. Messahel, a déjà entamé le travail en réunissant, à ce propos, les ambassadeurs africains à Alger. S'ajoute enfin la lutte contre le terrorisme qui a fait son apparition en Mauritanie. L'ouverture de cette voie va permettre indéniablement de faciliter la circulation et le contrôle des services de sécurité de cette région désertique. Cela permettra, d'une certaine manière, de réglementer la bande frontalière et la circulation des personnes, puisque cette question figure dans l'accord consulaire, conclu lors de cette réunion. Le développement de la sous-région lui donnera une nouvelle dimension aux plans stratégique et économique. Au plan économique, la route sera rentabilisée, notamment pour l'Algérie dont les gisements miniers de la région sud-ouest souffrent en raison du problème de transport. Sans ouverture sur l'Atlantique et vu les coûts du transport vers le nord-ouest du pays, les gisements sont restés inexploités. Les accords sur les hydrocarbures permettront, par ailleurs, à la Sonatrach, l'extension de ses activités et à la Mauritanie de disposer d'un partenaire de dimension internationale. Le tourisme est également une activité appelée à se développer dans la région, et côté mauritanien, cette route mettra en valeur le potentiel des villes comme Walata ou Wazzan. Mais au-delà, le flux prévisible des touristes lèvera surtout “le tabou argument” marocain sur les réfugiés sahraouis, les camps souvent présentés par sa propagande comme des “réfugiés forcés”. Djilali Benyoub