Décrivant l'islam comme une religion de tolérance, il préconise la valorisation de “ses valeurs spirituelles, humaines et esthétiques” dans sa présentation aux non-musulmans. Le glissement sémantique, mais surtout politique qui fait porter actuellement à l'islam les dérives et parfois les crimes des islamistes appelle à des mises au point continuelles. La dernière en date émane d'Abdelaziz Bouteflika. Selon le président de la République, les religieux sont les mieux placés pour restituer à la religion du Prophète Mohamed son rang et ses valeurs. “Il est nécessaire de mettre en relief les valeurs spirituelles, humaines et esthétiques de l'islam afin de le présenter dans sa véritable image et son authentique essence”, préconise le chef de l'Etat. Son exhortation est un extrait du message qu'il a adressé jeudi dernier aux participants au colloque international de le zaouïa Tidjania. Cette rencontre tenue à l'université de Laghouat, sous les auspices du ministère des Affaires religieuses et des Waqfs, réunit des représentants de la confrérie, originaires d'une trentaine de pays, notamment du Sénégal où se trouvent de très nombreux adeptes, ainsi que des universitaires. Longtemps stigmatisée pour son conformisme, la zaouïa Tidjania dont le khalifat se trouve dans la localité de Aïn Mahdi à Laghouat, est devenue ces dernières années un véritable pôle de rayonnement spirituel. Comme d'autres confréries, son opposition à l'intégrisme a sans doute plaidé en faveur de sa réhabilitation. M. Bouteflika ne manque pas de le rappeler dans son message. “Le secret de l'expansion de cette confrérie réside, en premier lieu, dans l'authenticité de son patrimoine spirituel puisé dans la tradition du prophète (QSSSL)”, commente-t-il. Selon lui, “ce patrimoine spirituel authentique devrait constituer, aujourd'hui, un facteur de force et d'invulnérabilité et un puissant stimulant pour le travail et l'innovation, ainsi que pour l'accomplissement de soi sur le plan civilisationnel dans une époque marquée par des contradictions et par les tentatives d'aliénation des valeurs saines de notre religion”. Si en Algérie, l'instrumentalisation de la religion a conduit à un génocide, dans le monde, les attentats de New York, de Madrid et de Londres ont fini par persuader les Occidentaux que le Coran est un manuel de guerre aux mains de sanguinaires. Le djihad dont se réclament les kamikazes s'est mué en prisme déformant de l'islam. “Cette religion rejette l'intégrisme et la contrainte et combat l'extrémisme et la violence, sous toutes leurs formes”, corrige M. Bouteflika. Mais pour qu'elle soit mieux perçue par les non-musulmans, il faut d'abord l'expliquer aux musulmans. À cet égard, estime le Président, les érudits et les hommes de culte ont pour mission de dire que “l'islam rejette l'intégrisme et la contrainte et combat l'extrémisme et la violence sous toutes leurs formes”. “Le fait de se comprendre soi-même est essentiel pour comprendre les autres”, observe-t-il. Appelant à la valorisation de la tolérance qui a longtemps distingué la cohabitation des musulmans avec les membres des autres communautés, il assure que cette ouverture est reconnue par tous les historiens, chercheurs, penseurs, écrivains et érudits du monde qui attestent, à l'unanimité, que l'esprit de tolérance religieuse chez les musulmans n'était pas propre à une période donnée, mais bien au contraire, “incarné par tous ceux qui s'imprégnèrent des préceptes de tolérance de l'islam et de ses éternelles valeurs”. Sur le même ton, Abdelaziz Belkhadem plaide pour la promotion des valeurs islamiques. À ce titre, le Chef du gouvernement qui a prononcé un discours d'ouverture espère que la rencontre de la zaouïa Tidjania sera une tribune à partir de laquelle sont propagés les préceptes de notre religion. De son côté, Bouabdallah Goulamallah, ministre des Affaires religieuses, perçoit le colloque comme un retour aux sources de la tarîqa (voie) Tidjania, telle que tracée par Cheikh Ahmed Tidjani, fondateur de la confrérie, dans la volonté de tisser des liens d'entraide et de solidarité entre les fidèles. Samia Lokmane