Traducteur du Coran, spécialiste du monde arabe, titulaire pendant vingt-cinq ans de la chaire d'histoire sociale de l'islam contemporain au Collège de France, savant et poète, Jacques Berque, né le 4 juin 1910 à Frenda, dans l'ouest algérien, avait une vision originale de la civilisation arabe. Par sa jeunesse algérienne et de ses vingt et un ans passés au Maroc, il reste lié naturellement au Maghreb, nourri de sa culture, de son paysage et de son dialecte. Après des études universitaires classiques à Alger et à Paris, il entre dans l'administration coloniale et se retrouve contrôleur civil au Maroc. De cette expérience tirée de son rapprochement d'une population et d'une civilisation, il soutiendra une thèse, en 1955, sur les structures sociales de la région qui lui vaudra l'estime des historiens. Terriblement confronté à la dure réalité du monde arabe et au douloureux cheminement de la colonisation et des luttes pour l'indépendance, Jacques Berque s'interroge, et de ses réflexions naîtra une riche écriture qui donne une vision différente des peuples colonisés, arabes ou musulmans. Il tente même de leur rendre justice d'une certaine manière. La Bibliothèque nationale a voulu rendre hommage au penseur et humaniste Jacques Berque en organisant une exposition regroupant ses ouvrages mais aussi ses critiques sur les arts ainsi que des livres écrits sur l'homme par des intellectuels algériens et français. Les orateurs qui se sont succédé ont évoqué, qui l'itinéraire, qui l'écriture ou la pensée de Jacques Berque. Pour Amar Mahmoudi, directeur de l'annexe de la Bibliothèque nationale de Frenda, Jacques Berque est un “homme nourri de la sève des Hauts-Plateaux qui éprouvait le fort besoin d'y revenir assez souvent”. De son côté, Amine Zaoui, directeur de la Bibliothèque nationale, a insisté sur l'héritage légué à titre posthume par Jacques Berque, sa bibliothèque personnelle, le qualifiant de “capitale de la science, du dialogue des cultures et de la tolérance”. Pour Mgr Tessier, Jacques Berque a réussi à traduire les connaissances acquises sur le terrain et ses réflexions. N. B.