S'il y a deux surprises dans le gouvernement Belkhadem, nouvelle version, c'est bien celles relatives à la nomination de Karim Djoudi et Nourredine Moussa en qualité respectivement de ministre des Finances et de ministre de l'Habitat. Les deux ministères, stratégiques au demeurant, sont aujourd'hui aux mains de technocrates formés et issus des rouages même des secteurs qu'ils sont appelés dorénavant à diriger. Loin des poids lourds de la politique, les deux nouveaux ministres qui n'avaient jamais eu des charges aussi importantes, sont pour les uns, “effacés”, pour d'autres, “timides”. D'un abord plutôt difficile, ils ne sont pas communicants, aucun n'aime les feux de la rampe et les projecteurs. Ils ne brillent certes pas par leur aptitude à vendre leur image, ils réussissent néanmoins à vendre leur travail et compétences. Ils font d'ailleurs le consensus à ce sujet. Et leur nomination brille d'autant plus qu'elle obéit à la fois à une logique sectorielle mais également, et surtout, à une logique de profil et de compétences alors que l'un présidera aux politiques et orientations financières de l'Algérie, et l'autre aura la charge d'un secteur sensible où la demande est plus qu'exacerbée et pourvue d'un cahier des charges colossal d'au moins un million de logements dans le cadre du programme du président de la République. Le nouveau ministre des Finances et grand argentier du pays connaît plutôt bien la maison. Cadre du secteur, Karim Djoudi, 49 ans, en aura gravi progressivement les échelons. Diplômé en Sciences économiques, titulaire d'un troisième cycle Banques et Finances délivré en 1985 par l'Université Paris I-Sorbonne, il fera sa carrière dans la Banque centrale d'Algérie (BCA) qu'il intégrera en 1988 en qualité de chargé d'études. L'année suivante, il est nommé sous-directeur à la direction des études de la BCA. En 1990, il devient directeur central au niveau de l'institution bancaire. Entre 1999 et 2003, il occupera la fonction de directeur général du Trésor au ministère des Finances. Mai 2003, et le changement du gouvernement lui vaudront sa première charge ministérielle. Karim Djoudi est désigné ministre délégué auprès du Chef du gouvernement chargé de la Privatisation et de la Promotion de l'investissement. En avril 2004, il revient aux Finances en qualité de ministre délégué chargé de la Réforme bancaire et financière, l'un des dossiers les plus épineux de l'économie algérienne. Il sera pendant trois ans le maître d'œuvre et le coordinateur du travail que nécessitait la mise à niveau du secteur bancaire et financier public, de l'instauration de la nouvelle législation et des institutions afférentes ainsi que de la modernisation des systèmes de paiements. Une réforme toujours en cours mais qui lui vaut aujourd'hui sa nomination en tant que premier responsable d'un secteur névralgique et de souveraineté. Il faudra attendre au moins la semaine prochaine pour connaître, cependant, les priorités que Karim Djoudi compte lui impulser. Quant au nouveau ministre de l'Habitat, 51 ans à peine entamés, il était en charge auparavant du secteur du Tourisme. Ingénieur en génie civil, issu de l'Ecole polytechnique en 1979, Nourredine Moussa est également titulaire d'une post-graduation en management délivrée en 1988 par l'Université de Viennes. Il a fait sa carrière dans le secteur de l'Habitat. Après le séisme de 1980 qui a touché la wilaya de Chlef, il participera au programme de reconstruction ainsi qu'à la réalisation du programme de préfabriqué de 1982. Le ministre a également occupé en 1993 la fonction de directeur de la branche Bâtiment et Travaux publics à Vérital, puis P-DG du Centre national d'ingénierie de la construction de 1993 à 2004. Il est nommé par la suite P-DG du Groupe des entreprises du bâtiment du Centre. Nourredine Moussa a eu aussi la charge de réaliser les 23 000 chalets destinés au relogement des sinistrés après le séisme qui a touché la wilaya de Boumerdès et tout le centre du pays en 2003. Une gestion qui lui vaut pour beaucoup sa nomination aujourd'hui. Le ministre de l'Habitat est connu au sein du secteur pour être un spécialiste et l'un des fervents partisans de la politique d'industrialisation de la construction mais surtout de la stricte application des lois en matière d'urbanisme. Sa politique sectorielle s'appuiera probablement sur ces deux axes majeurs. Pour le moins, les profils des deux nouveaux ministres des Finances et de l'Habitat dénotent. Samar Smati