Les stars internationales qui ont vite oublié les racines de cette musique se lancent dans la variété. Mami en duo avec Sting produira “Désert rose” alors que Khaled, après l'échec de “C'est la nuit”, tente une nouvelle fois la chanson orientale, en chantant en duo avec Diana Hadad. Si le king du raï a préféré s'installer au Luxembourg pour fuir le fisc, le prince, quant à lui, attend des jours meilleurs. Les deux stars algériennes de la chanson raï, cheb Khaled et cheb Mami, qui ont fait la gloire de cette musique bien de chez nous durant plusieurs années à travers les quatre coins de la planète, sont désormais totalement désemparés. En effet, cette chute intervient après un succès triomphal qui les a emportés au sommet des ventes en Europe, particulièrement en France. Elle a été brutale, voire tragique pour les deux stars les plus populaires. Si le king du raï a préféré s'installer au Luxembourg pour fuir le fisc, sachant que ses dettes dépassent le un million d'euros dans l'Hexagone, sa maison de disques, Barclay, qui a produit ses meilleurs albums, a fini par le lâcher ! Et Khaled essayera tant bien que mal de surmonter la crise en se produisant en Orient. Ainsi, son duo avec Diana Hadad lui permettra de revenir timidement sur la scène artistique. Pour le prince du raï, c'est aussi le grand calvaire : un scandale se déclenche cinq jours avant la sortie de son nouvel album Layali (les nuits). Le prince du raï a été mis sous mandat de dépôt à Paris pour “violence volontaire, séquestration et menace” sur son ex-compagne, une photographe de presse qui lui avait réalisé ses plus beaux portraits. Depuis, l'affaire fait les unes de la presse française. Des chaînes de télévision sont même allées jusqu'à “réaliser” des enquêtes sur cette affaire qui éclaboussera “l'ami du président Bouteflika”. Mami, qui a pu bénéficier de la liberté provisoire après avoir versé une caution, réussira à quitter le sol français il y a quelques jours. Il s'est installé alors à Oran en attendant des jours meilleurs. Dans le milieu du raï, en France comme en Algérie, c'est la consternation. Les fans du raï sont solidaires avec l'enfant prodige de Saïda, bien que c'est sa propre carrière qui prend un coup dur. Mais pour eux, c'est le raï qui est visé. C'est cette musique algérienne qui a franchi toutes les frontières qui est dans le collimateur de la mafia du showbiz occidental. La chanson raï, qui a vu le jour à Oran au milieu des année 1970 avec les premiers interprètes tels que Khaled, cheb Hamid, Fadhéla et Sahraoui, chaba Zahouania, le groupe Amarna, pour ne citer que ceux-là, s'est développée dans la clandestinité. Elle était interdite à la diffusion dans les médias publics jusqu'en 1983, date du premier Festival du raï organisé à Oran. Depuis, les plus belles mélodies sont fredonnées partout dans le pays et même en France, à l'image de Tal adabi, el marssam, Saida bîîda, hata enti twalou djenhik de Khaled, Mâândi hadja fennass, El Ghalia mahboubet galbi de Mami, walah mâândi walou, galbi bgha el baida de cheb Moumen… Et c'est durant la même décennie, plus précisément en 1986 lors du Festival du raï de Bobigny (France), que le raï a commencé à s'exporter au-delà de nos frontières. Didi, une chanson du domaine public, arrangée par Don Hoz, s'est vendue à plus d'un million d'exemplaires, bien que Khaled était connu avant de signer son contrat avec Barclay. Mami a, quant à lui, décroché un contrat avec Virgin qui a produit lazreg sââni et let me cry au moment où les Hasni et Nasro présentaient la nouvelle tendance de la chanson oranaise moderne. Ces derniers deviennent les idoles de la jeunesse algérienne durant la décennie rouge. 1999 : le raï commence à chuter. Les stars internationales qui ont vite oublié les racines de cette musique se lancent dans la variété. Mami en duo avec Sting produira Désert rose, alors que Khaled, après l'échec de C'est la nuit, tente une nouvelle fois la chanson orientale en chantant en duo avec Diana Hadad. Et le public algérien, mélomane du raï, reste sur sa soif. Une chose est sûre, pour le king et le prince, c'est la fin d'une belle époque… LOTFI G.