Le changement renvoie l'image de l'instabilité politique et institutionnelle en matière de pilotage des dossiers privatisation-investissement. L'Union générale des travailleurs algériens semble avoir gagné “la bataille”. Abdelhamid Temmar, devenu au fil des jours “l'homme à abattre” pour la Centrale syndicale, n'a pas été reconduit. L'UGTA avait fait du départ de l'ex-ministre de la Participation et de la Promotion de l'investissement une condition pour toute ouverture du dialogue. Le président de la République a préféré donc sacrifier son plus proche collaborateur plutôt que de se mettre à dos la puissante Centrale syndicale. Les deux journées de grève organisées par l'UGTA ont été perçues comme un avertissement. Non seulement Temmar est parti, mais son département a fait place à un ministère délégué auprès du Chef du gouvernement, chargé de la participation et de la promotion de l'investissement. Le poste est confié à Karim Djoudi, qui était précédemment à la tête de la direction générale du Trésor et qu'on dit très proche d'Ouyahia. Le patron du RND semble avoir demandé et obtenu le contrôle direct du dossier conflictuel de la privatisation, objet de discorde entre l'UGTA et Temmar. Abdelaziz Bouteflika aura donc concédé à Ouyahia ce qu'il avait refusé à Benflis. Ouyahia reproduit ainsi le même schéma, à quelques exceptions près, en vigueur en 1997 et 1998 du temps du CNPE (Conseil des participations de l'Etat) où Ahmed Tibaoui était délégué aux participations de l'Etat. A l'époque, la complicité entre les deux hommes (Ouyahia et Tibaoui) faisait que les décisions étaient prises sans difficultés majeures. Et Ouyahia, à travers Tibaoui, en fait, avait le contrôle de toutes les décisions économiques. Ce que Benflis n'a pas pu obtenir. Les calculs purement électoralistes ont eu raison de Temmar. Car sans vouloir défendre l'ex-ministre de la Participation et de la Promotion de l'investissement, celui-ci ne faisait qu'exécuter des politiques décidées par le Conseil des participations de l'Etat et le Conseil des ministres. Le titulaire du portefeuille lui-même n'avait pas cessé de le rappeler à chacune de ses sorties en disant qu'il n'était qu'un simple secrétaire du Conseil des participations de l'Etat et qu'il ne faisait qu'appliquer la politique du gouvernement et du président de la République. Du coup, si échec il y a en matière de privatisation, la responsabilité doit être partagée, et le président de la République en est le premier responsable. Dans un autre registre, la question du sort de la loi sur le fonctionnement, la gestion et la privatisation des entreprises publiques se pose. Cette loi a prévu des instruments à l'image du Conseil des participations de l'Etat, dont le secrétariat est assuré par le ministre des Participations. C'est lui qui élabore et qui propose, en concertation avec les ministres concernés, le programme des privatisations. Le texte sera-t-il changé ? De toutes les manières, encore une fois “l'attractivité” de l'Algérie prend un sérieux coup. La Banque mondiale, dans son dernier rapport sur le climat d'investissement en Algérie, souligne à juste titre la contrainte de l'instabilité qui empêche les investissements directs étrangers de choisir la destination Algérie. “Ce changement politique” apporte de l'eau au moulin de ceux qui voient en notre pays une contrée instable où il est risqué d'investir son argent. Ouyahia pourra-t-il reprendre la maîtrise du gouvernail d'un bateau qui tangue au gré des vagues ? M. R.