Cette rencontre a été rehaussée par la présence de responsables du département britannique de la Défense, de diplomates et d'universitaires. L'Institut royal pour les études sur la défense et la sécurité du Royaume-Uni a abrité, lundi dernier à Londres, une conférence sur la menace terroriste en Algérie et plus globalement en Afrique du Nord. Devant un parterre composé de responsables du ministère britannique de la Défense, de diplomates, de chercheurs universitaires, de représentants de l'Association sur les études algériennes (Society for Algerian Studies) et de journalistes, le professeur Martin Evans de l'université de Portsmouth, au sud de l'Angleterre, a présenté une communication suivie d'un débat riche en questionnements. Le professeur Evans est l'auteur de diverses publications traitant de l'histoire contemporaine de l'Algérie, dont la période relative à la guerre de Libération nationale. Plus récemment, il a signé un livre intitulé la Colère des exclus sur les évènements d'Octobre 1988 et les soubresauts qui les ont suivis. En prélude de son exposé, l'orateur a sérié les raisons de l'intérêt de son pays pour le nôtre. Si l'énergie assure à la Grande-Bretagne d'immenses potentialités d'investissement, l'immigration clandestine et, plus considérablement, la menace terroriste la préoccupent. La violence en particulier est de nature à compromettre ses intérêts économiques. D'emblée, le professeur Evans s'est montré rassurant en affirmant que l'Algérie ne pourra plus jamais retomber dans la spirale de la terreur du début des années 1990. “Les groupes terroristes n'ont plus la même capacité de nuire”, a-t-il observé. À cet égard, l'allégeance du GSPC à Al-Qaïda s'inscrit, selon lui, dans le cadre strict d'une opération marketing. “Ce sigle (Al-Qaïda Maghreb, ndlr) est utilisé par des groupes désespérés pour donner plus d'impact à leurs actions”, a expliqué l'universitaire. Sur la base de cette assertion, il a dénié à l'organisation d'Oussama Ben Laden la prétention d'ouvrir un front en Afrique du Nord. À son avis, le recours du GSPC à certaines des méthodes d'Al-Qaïda, comme les attentats suicide, relève plutôt du mimétisme. Néanmoins, même si le terrorisme en Algérie est en perte de vitesse, le professeur Evans n'a pas exclu la survenue d'autres attentats. Globalement, a-t-il expliqué, la lutte antiterroriste a obtenu beaucoup de succès. Les Algériens, selon lui, ont montré beaucoup de résistance et de courage durant la décennie noire. Cependant, il considère que l'exclusion politique et sociale constitue toujours un terreau pour la violence. “Les potentialités de recrutement des groupes armés sont encore importantes”, a-t-il fait remarquer. L'enseignant de l'université de Portsmouth a illustré son propos en évoquant la jeunesse de certains des kamikazes impliqués dans les dernières opérations terroristes. À la fin de sa communication, l'ouverture du débat lui a permis de confirmer certaines de ses thèses. En réponse à une question de Sir Alan Monroe, ancien ambassadeur du Royaume-Uni en Algérie, sur la nature des revendications du GSPC, M. Evans a démontré à nouveau la fausse affiliation de ce groupe à Al-Qaïda, en observant que ses injonctions sont plutôt locales. De son côté, John King, membre de Society for Algerian Studies, s'est demandé s'il est vraiment possible de dire que la sécurité est sous contrôle en Algérie, alors que les attaques se poursuivent. Un représentant du département britannique de la Défense s'est enquis de la capacité du GSPC à cibler les installations énergétiques. Un autre invité a exprimé sa crainte concernant l'éventualité de l'exportation de la violence en Europe. Tour à tour, le professeur Evans a répondu par la négative, considérant que les terroristes algériens n'ont pas les moyens de leur politique. S. L.-K.