Quand les «capitales» arabes s'affolent et s'estiment dans une impasse dangereuse pour les régimes plus particulièrement et les pays, c'est la course pour la recherche d'abris internationaux et même leur mise sous protectorats étrangers. Ils redeviennent verbalement engagés dans l'unité nationale arabe. Pas moins. A ces moments c'est la surenchère. Chacun redécouvre les anciens discours «réunificateurs». Ils se déclarent presque en mesure de se lier... pour défendre le sentiment national arabe. Une Otan arabe et pourquoi pas. Il y a eu une trop grande focalisation médiatique sur les réformes du système de fonctionnement de la Ligue arabe et sur la coopération économique, soit des thèmes qui aboutissent fatalement à un consensus, même relatif, notamment, lorsque les visions sont révisées à la baisse pour «fabriquer» un dénominateur tiré vers le bas. Les travaux des commissions, notamment pour ce qui a été rendu public, apparaissent avoir occulté deux thèmes aux implications majeures. Il s'agit de la gestion des crises et du monde arabe de la défense. Concernant l'élaboration d'une politique commune de défense, celle-ci rencontre au moins deux contraintes insurmontables pour le moment : une politique commune de défense impose l'équivalent de l'article 5 de la charte de l'Alliance transatlantique, à savoir une riposte solidaire et collective contre toute agression menée contre un Etat membre de la Ligue arabe. Ce cas de figure est impossible à réaliser tant qu'une solution n'est pas apportée à la question palestinienne. La deuxième contrainte est l'identification de l'ennemi porteur d'une menace d'agression contre un pays arabe. Cela explique le différé de la question de création d'un conseil arabe de sécurité et de la réflexion, à mener sur une politique de défense commune. Concernant le thème de la gestion de crise, on sait bien que celle-ci ne fait pas appel exclusivement aux seuls instruments de la diplomatie et que parfois, et même souvent, s'exprime inéluctablement le besoin d'un recours aux moyens de la défense, c'est-à-dire aux moyens militaires. Pour rester donc au niveau de la gestion des crises internes, il convient de se poser la question de savoir quand sera-t-il possible que la dimension militaire de cette gestion soit prise en compte dans la réforme du système de fonctionnement de la Ligue arabe ? Serait-il possible un engagement solidaire à accepter et à se donner la capacité à intervenir, pas seulement dans les opérations d'interposition pour maintenir la paix armée en attendant que se mettent en place les moyens du dialogue politique, mais aussi et surtout dans les opérations d ́imposition de la paix et qui nécessitent l'emploi des forces armées ? C'est dans ces domaines particuliers que s'évaluent les convergences et les divergences ainsi que les échanges de mesures de confiance. Ces questions renvoient aux souverainetés nationales et servent de test de niveau aux disponibilités au transfert de responsables de sécurité, non pas sur une organisation supranationale, car les conditions ne sont pas encore réunies pour que la Ligue joue ce rôle, mais du moins à un conseil intergouvernemental qui doit, au vote des deux tiers de ses membres, rester maîtres de sa décision et de sa mise en oeuvre. Il semble que cette question est à fort «dissensus» et que la sérénité souhaitée pour l'aborder n ́est pas encore de mise. Il est toutefois utile d'identifier les contraintes à lever et dont la survie risque de ne pas pouvoir achever la construction du Monde arabe.