Les taux d'intérêt sont à la hausse aux Etats-Unis. Ils ont atteint en moyenne 5,14 % à la fin de l'année dernière pour les crédits immobiliers à 30 ans des emprunteurs considérés comme de bons risques par les établissements prêteurs. Sur les crédits immobiliers à 15 ans, le taux est maintenant de 4,54%. Ces hausses des taux de crédit signifient qu'en dépit des efforts de la Réserve fédérale américaine, le remboursement de leur prêt va devenir plus difficile pour de nombreux Américains. D'autant plus que le chômage maintenant touche 10 % de la population active Et si les Américains s'arrêtaient tous de rembourser leurs crédits à l'image des milliardaires et des grandes entreprises qui, soudain, décident de ne plus remplir leurs engagements par pur calcul ? Le phénomène des défauts de paiement dits stratégiques -- des débiteurs qui pourraient continuer de rembourser leurs emprunts immobiliers mais décident de ne plus acquitter leurs obligations -- est en augmentation rapide aux Etats-Unis. Selon le Wall Street Journal, ces défauts de paiement stratégiques dépasseront sans doute le nombre d'un million en 2009. Certains en viennent à s'inquiéter pour l'avenir même du capitalisme. George Brenkert, professeur en éthique des affaires de l'université de Georgetown, a déclaré au quotidien que les emprunteurs qui peuvent se permettre de rester à jour de leurs paiements sont moralement tenus de le faire, et que si les Américains venaient à s'imaginer qu'ils peuvent tout simplement se dégager de leurs obligations, les conséquences seraient désastreuses. John Courson, p-dg de la Mortgage Bankers Association, s'interroge sur «le message qu'ils enverront à leur famille, à leurs enfants et à leurs amis.» Le blogger Megan McArdle exprime quant à lui son mépris pour ceux qui choisissent de s'adonner à la consommation de biens et de services plutôt que de rester à jour de leurs remboursements immobiliers. Hum, est-ce qu'aucun d'entre eux a déjà ouvert le Wall Street Journal ? Les défauts de paiement stratégiques sont une caractéristique américaine, et là je ne parle pas des emprunteurs de la classe moyenne à court d'argent qui préfèrent partir en vacances plutôt que de rester à jour de leurs remboursements. Les entreprises aux poches bien garnies, les milliardaires et les institutions parfaitement solvables passent leur temps à manquer à leurs engagements. Morgan Stanley, par exemple, est une société gigantesque. Au deuxième trimestre, son capital total se montait à 213,2 milliards de dollars. Elle a sans conteste la capacité nécessaire pour honorer les obligations contractées par ses nombreuses unités opérationnelles. Pourtant, au début du mois, Morgan Stanley a déclaré qu'elle allait abandonner cinq immeubles de bureaux de San Francisco à des créanciers plutôt que de payer les dettes qui couraient sur ces immeubles. Pourquoi? Eh bien Morgan Stanley a bêtement payé le prix fort pour ces locaux en 2007, quand les prix étaient vraiment élevés. Les cours se sont effondrés et les locataires sont durs à trouver. «Il ne s'agit pas d'une cessation de paiement ou d'une situation de saisie», a expliqué Alyson Barne, son porte-parole, à Bloomberg News. «Nous allons leur donner ces propriétés pour nous dégager des obligations de remboursement des emprunts.» Si ça, ce n'est pas du défaut de paiement stratégique !