La crise du gaz entre la Russie et l'Ukraine a eu des répercussions, le moins que l'on puisse dire, spéculatives sur le marché du rond à béton en Algérie. C'est l'avis de certains importateurs nationaux de l'acier qui imputent à la lointaine crise, les fluctuations à la baisse qu'à connues ce produit. En effet, étant entendu que 30 % de la matière première (billettes, slab) nécessaire à la transformation des produits sidérurgiques, et principalement le rond à béton, en Europe, provient des aciéries ukrainienne et que ces dernières ont été « sevrées » de gaz, l'Algérie qui importe, selon les statistiques douanières, 50 % de ses besoins sidérurgiques d'Italie, se voit aujourd'hui envahir par des fournisseurs étrangers, espagnols ou portugais. Ces derniers, en l'absence des fournisseurs traditionnels du marché national (principalement d'Italie), tentent de reprendre des parts de marché auprès des importateurs algériens pour « la liquidation de leurs stocks », selon un importateur basé à Alger, en prévisio,n dit-on, d'une augmentation prochaine et certaine des prix de leurs produits. Cette baisse des prix, n'étant pas exclusivement algérienne, est une conséquence directe de la récession mondiale qui a touché presque tous les secteurs industriels. La chute des cours du pétrole a joué aussi un rôle prépondérant dans cette courbe à la baisse, mais de nombreux avis laissent deviner que la relative embellie du prix du baril jouera un rôle de locomotive dans la relance des cours de l'acier. Une tendance encouragée par les ambitieux plans de relance orchestrés par Washington et Bruxelles pour soutenir et relancer l'industrie de l'automobile. De nouveaux fournisseurs se déploient En Algérie, le déploiement des nouveaux fournisseurs du marché est à mettre à l'actif de l'arrêt de la plupart des usines italiennes durant la crise du gaz entre Moscou et Kiev. La rupture d'approvisionnement en matière première a ainsi laissé la voie libre aux fournisseurs en acier, qui se sont placés sur le marché en alléchant les importateurs algériens par des prix « cassés de l'ordre de 360 à 380 euros la tonne », mais à des conditions de livraison unique, c'est-à-dire « à moins de 15 jours de la date de confirmation », nous dira un autre importateur de rond à béton. Ainsi, son prix actuel par région oscille entre 41.500 et 43.000 DA. Grève annoncée à Arcelor Mittal de Annaba Cette situation est également conditionnée par le « profil bas » adopté par de grands traders présents en Algérie et connus pour leurs politiques spéculatives sur le marché mondial. Un retrait expliqué par l'absence de financement bancaire qui les cantonne aujourd'hui dans une position de « wait and see », en attendant la hausse que l'on dit très proche des cours de la matière première, qui présagent d'une augmentation à très court terme du prix du rond à béton. La méthode spéculative consiste donc à acheter le maximum aujourd'hui pour pouvoir vendre plus cher dans le moyen terme, selon le procédé de « l'offre sujet non vendu - embarquement immédiat ». Cet agencement des événements nous amène directement à revoir très prochainement à la hausse le prix du rond à béton sur le marché national d'autant plus que les cours mondiaux ont amorcé leur retour depuis mercredi dernier. Les échos de la menace de grève venus de Annaba, du côté des travailleurs du plus grand producteur mondial de l'acier Arcelor Mittal, vont aussi confirmer cette tendance à la hausse. Les rumeurs sur une prochaine pénurie du rond à béton entrouvrent la porte à d'éventuels réajustements des prix revus à la hausse. Il est également vrai que les ventes, ces derniers temps, ont beaucoup baissé, même si le rond à béton se vend mieux dans le BTP loin du mauvais temps. De toutes les façons, lorsqu'on connaît les difficultés des producteurs à contracter des prêts auprès des banques pour couvrir ces charges, la baisse des prix n'est pas pour arranger leurs affaires, selon la confédération européenne de l'acier et industrie du fer EUROFER. En résumé, selon des connaisseurs du domaine, l'augmentation de près de 20 à 30 % des prix est attendue dans le très court terme, probablement vers la mi-février avec la relance des grands chantiers et la libération par l'Etat des budgets qui leur sont impartis. Rappelons que les prix des matériaux de construction, notamment le ciment et le rond à béton, n'ont cessé depuis l'année dernière de susciter des inquiétudes chez les promoteurs, les entrepreneurs et même les citoyens qui attendent l'achèvement de leurs logements un peu partout dans le pays. Selon des responsables d'entreprises de BTPH, les prix avaient atteint un seuil insupportable. En effet, au cours du mois de mars dernier, le quintal de ciment coûtait 920 DA alors que le quintal du rond à béton, qui était vendu à 3 400 DA par le passé, était grimpé à 8 400 DA. Cette situation a fait réagir les pouvoirs publics et au cours de ce même mois de mars, le ministre de l'Habitat et de l'Urbanisme Noureddine Moussa avait annoncé que des mesures urgentes avaient été prises pour répondre aux problèmes de disponibilité des matériaux de construction et la régulation de leurs prix. Le ministre de l'Habitat avait affirmé que deux conseils des ministres ont planché sur ce dossier et à l'issue desquels il a été décidé de subventionner le rond à béton, sur la base d'une évaluation. En ce qui concerne le ciment, le ministre avait soutenu que la hausse des prix du ciment relève de la spéculation pratiquée par des distributeurs et certains promoteurs. Moussa a affirmé que les pouvoirs publics ont décidé, compte tenu de cette situation, de passer à des mesures coercitives pour mettre fin à la spéculation qui touche le marché des matériaux de construction en Algérie. Des commissions mixtes regroupant les agents de contrôle du ministère du Commerce et ceux des services de sécurité devaient être déployées à travers l'ensemble des points de vente, et ce, pour contrecarrer les actes de spéculation. Le ministre avait précisé que le contrôle devait toucher toute la chaîne, des usines jusqu'au dernier point de vente. En novembre dernier et concernant le rond à béton, les prix avaient été revus à la baisse. Dans le même contexte, l'onde de choc avait touché de plein fouet les importateurs algériens qui ont importé des quantités assez importantes, avant l'accentuation de la crise financière mondiale, à des prix très élevés sur les marchés internationaux. La quantité stockée leur a posé problème puisqu'ils étaient dans l'obligation de vendre à des prix réduits vu le contexte international marqué par la récession des économies et la pression de leurs banques étant entendu que la majorité des importateurs ont recours à des crédits bancaires pour la couverture de leurs achats. Quoiqu'il en soit, l'épisode des prix cassés tire à sa fin puisque la production mondiale d'acier devrait, selon les dernières prévisions, enregistrer l'année prochaine sa plus forte baisse depuis 1945, année où elle avait chuté de 27 %, pour des raisons évidentes. La baisse ne revêtirait pas une telle ampleur en 2009, selon les spécialistes, mais pourrait néanmoins flirter avec les 15 % ; à titre de comparaison, la plus forte baisse annuelle de la production depuis le second conflit mondial n'avait guère dépassé la barre des 8 %, en 1982.