La hausse estimée entre 10 et 20% des salaires des travailleurs du secteur privé, dans le cadre des conventions de branches, ne fait pas l'unanimité au sein des patrons. La revalorisation salariale décidée, à l'issue de la tripartite, fait déjà grincer des dents, certains patrons d'entreprises, même s'ils affirment qu'ils ne sont pas contre le principe d'augmenter les salaires de leurs employés. Le président de la Confédération des industriels et producteurs algériens (CIPA), Aziz M'henni, s'est montré, hier, très «sceptique», soulignant cependant qu'il respecterait cet accord. Les arguments du président de cette organisation, conviée régulièrement aux différentes tripartites, sont d'ordre économique. Les entreprises ne pourront pas, toutes, faire face à cette augmentation des salaires, nous confiera-t-il. Aziz M'henni souligne que nombre d'entreprises ont des difficultés de trésorerie immenses et certaines PME, ajoute-t-il encore, disparaissent en silence et les pouvoirs publics ne semblent pas s'en rendre compte. A l'origine de cette situation, poursuit notre interlocuteur, une «pléthore de lois» qui menacent jusqu'à l'existence de ces entreprises. Encore une fois c'est le Credoc et les lettres de crédit qui sont pointés du doigt. Le président de la CIPA évoque même des «actes contre nature» en matière de législation qui hypothèque jusqu'à la survie des entreprises qui fonctionnent encore, dira-t-il, tant bien que mal. Le secrétaire général de l'Association générale des entrepreneurs algériens (AGEA) Belkacem Meziane, ira encore plus loin dans le pessimisme. «Nous vivons une véritable catastrophe et non seulement nous ne pouvons pas encore augmenter les salaires mais on pense même licencier notre personnel», nous a t-il déclaré. Il souligne lui aussi que le Credoc et plus récemment l'autorisation globale d'importation (AGI), imposés par les pouvoirs publics, sont venus à bout des entreprises les plus téméraires. «Nos ateliers sont à l'arrêt et nous ne produisons plus », a déclaré le SG de l'AGEA qui soutient qu' «on a verrouillé l'investisseur et l'outil de production». Il devient ainsi, estime-t-il encore, «impossible d'augmenter les salariés, alors que la production est à l'arrêt, faute de matières premières dont l'acheminement vers l'Algérie est devenu un vrai parcours du combattant du fait de la nouvelle réglementation ». Belkacem Meziane conseille de libérer le marché et «de cesser de mettre les bâtons dans les roues des entrepreneurs honnêtes» pour penser à l'augmentation des salaires. La situation économique actuelle, conclut-il, ne présage rien de bon et risque même de dégénérer avec la fermeture de plus d'entreprises. Le président de la Confédération algérienne du Patronat (CAP), Boualem M'Rakech ne partage pas, tout à fait, cet avis même s'il reconnaît les difficultés auxquelles sont confrontées les entreprises. Il souligne que la décision d'augmenter les salaires a été prise, lors de la dernière tripartite qui a eu lieu les 2 et 3 décembre 2009. Il s'agit, pour lui, d'un engagement qui a été pris avec les partenaires sociaux et qu'il faut respecter. Boualem M'Rakech dira qu'en plus de la hausse des salaires, la décision a été prise lors de cette tripartite, d'installer quatre commissions de travail qui ont planché sur quatre dossiers importants à savoir: «le Credoc et le financement des entreprisse», «les allocations familiales», «la mutuelle» et «la retraite». Il fera savoir que son organisation a présenté des dossiers au sein des commissions dont le travail est en cours de finalisation, a-t-il précisé. Le président de la CAP a indiqué que les rapports, une fois finalisés, seront présentés, dans un proche avenir, au Premier ministre Ahmed Ouyahia. «Aujourd'hui, nous constatons un début de consensus qui est en train d'être dégagé», s'est félicité Boualem M'Rakech qui a mis en exergue «une volonté d'aller en avant malgré une situation difficile». A noter que cette «revalorisation salariale» sera signée le 1er mai prochain, au ministère du Travail et de la Sécurité sociale, en présence des responsables des organisations patronales et du patron de la centrale syndicale Abdelmadjid Sidi Saïd. Ce dernier, avons-nous appris de sources concordantes, aurait demandé une augmentation des salaires de l'ordre de 35% au profit des travailleurs.