Une centaine de personnes, pour la plupart des ressortissants sahraouis et des représentants d'associations anticolonialistes et de partis politiques français, se sont rassemblées mercredi à Paris pour exiger la libération des 24 militants sahraouis condamnés récemment à de lourdes peines de prison par le tribunal militaire de Rabat et demander aux autorités françaises de condamner le procès "inique" dont ils ont fait l'objet. Bravant un froid glacial, les manifestants, dont certains brandissaient des portraits de militants condamnés par le tribunal d'exception marocain, scandaient des mots d'ordre dénonçant ce procès et rappelant le droit du peuple sahraoui à l'autodétermination. "Pas de légitimité pour le tribunal militaire", "Maroc assassin, la France complice" et "Une seule solution, arrêter l'occupation", criaient-ils, à Esplanade des Invalides, au milieu d'un dispositif policier imposant, a-t-on constaté. Pour Patrick Farbiaz, militant au sein du collectif "Sortir du colonialisme", qui a appelé au rassemblement, les dernières condamnations à l'encontre des militants sahraouis représentent un "scandale du point de vue des droits de l'homme et de la perspective de paix entre les peuples sahraoui et marocain". "Ces lourdes condamnations aggravent le conflit au lieu de le résoudre et la libération de ces militants pourrait être un geste qui serait positivement interprété par la communauté internationale", a-t-il indiqué à l'APS. Selon le secrétaire du Comité pour le respect des libertés et des droits humains au Sahara occidental (CORELSO), Jean-Paul Le Marec, le rassemblement a également pour objectif, outre de contester le lourd verdict du tribunal marocain, de protester contre le "silence de la France". "Une France qui, devant ces atteintes aux droits de l'homme extraordinaires, ne dit rien, et qui, par contre, quand il s'agit de soutenir le Maroc sur son plan d'autonomie, elle est prolixe dans tous les niveaux, international et des médias français et marocains notamment", a-t-il regretté. Entre-temps, une délégation restreinte parmi les manifestants a été reçue en audience par la sous-directrice de l'Afrique du Nord au ministère français des Affaires étrangères, Bénédicte De Villardi De Montlaur. Un communiqué du Collectif Sortir du colonialisme appelant notamment le gouvernement français à condamner le dernier procès des militants sahraouis lui a été remis. L'audience a duré plus d'une heure. Selon le président du Collectif, Henri Pouillot, "aucune réponse n'a été apportée à cette revendication par le Quai d'Orsay sous prétexte que le Ministère n'a reçu aucune contestation officielle concernant la libération des détenus sahraouis". "C'est une réponse scandaleuse et sur le chapitre des droits de l'homme c'est le sempiternel statu quo français concernant la question sahraoui", a-t-il dit, estimant que le refus de condamner est une "caution à ce procès". Selon le président de l'Association des familles des prisonniers et des disparus sahraouis, Bachir Moutik, qui a aussi pris part à l'entrevue, il "n'y aucune avancée dans la position française vis-à-vis de la question sahraouie". "Ce sont les mêmes termes utilisés par les gouvernements français qu'ils soient de droite ou de gauche, notamment sur le chapitre des droits de l'homme, (à) et cette position dénigrante de la France est en porte-à-faux avec ce qui se passe au Sud de la Méditerranée", a-t-il regretté. Le tribunal militaire de Rabat avait condamné, le 17 février dernier, neuf prévenus sahraouis à la réclusion à perpétuité, quatre à 30 ans de prison, huit à 25 ans, deux à 20 ans d'emprisonnement et deux autres prévenus à la peine correspondant à la durée de la détention préventive qui a duré 27 mois. Les mis en cause avaient été incarcérés depuis les évènements du camp de Gdeim Izik, proche de Laayoune dans le Sahara occidental occupé, où ils avaient participé, en novembre 2010, à l'organisation d'un camp de protestation pacifique.