Epuré et dense jusqu'à l'incandescence, Inland commence là où la route s'arrête et peut se réinventer. Carrefour de lignes brisées, d'élans qui reculent ou s'accélèrent, les Monts Daïa sont l'espace nu où Malek s'enfonce un peu plus en lui-même, déserté, défait, silencieux, debout. Topographe bouleversé peut-être par un divorce en cours, il est chargé de reprendre le tracé d'une ligne électrique là où, dix ans plus tôt, une équipe, décimée par des intégristes, l'avait laissé. Malek marche pour ne pas s'enliser, quadrille, ausculte, arpente le paysage, en dessine pas à pas les vestiges et les cicatrices. En lui, autour de lui affleurent lentement les traces du désastre et dans sa cabine saharienne, si le sang est sec, il n'a pas disparu. Mais sa trajectoire circulaire trouvera une direction au contact d'une jeune clandestine venue d'ailleurs, qui rebroussera chemin. Malek l'emporte, la suit, abandonne sa ligne, happé par le point de fuite et échappant, sans doute, à l'abdication. Dans ses pas chemine, inquiet, son ami Lakhdar, qui le cherche. Parfois jaillissent les échos d'une palabre d'activistes urbains, le chant nocturne d'un berrah embrasé ou les cris d'émeutiers d'une route perdue. Nul panneau indicateur mais des forces de vie éparpillées, en marche, dont les voix, parfois, semblent se répondre. Entre éblouissements et sidération, avec la force d'une petite musique qui s'entête, Inland trace la carte mouvante d'une Algérie non officielle et l'éclaire de sa beauté muette et radicale.