A l'instar de ces millions d'Algériens qui occupent la rue chaque vendredi, la réponse de la communauté universitaire est du même acabit. Il est 10h. Etudiants et enseignants commencent à affluer vers la place Colonel Amirouche, où le dispositif sécuritaire est déjà installé. Rien d'inhabituel, comme chaque mardi. C'est le rendez-vous hebdomadaire de la communauté universitaire, celui de la contestation. Se tenant à l'écart, les manifestants patientent pendant une heure, tout en abordant l'objet de leur présence, le hirak et son évolution, entre collègues des différentes universités. Vers 11h, la procession s'apprête à emprunter les arcades, annonçant le début de la marche. Des citoyens viennent au fur et à mesure grossir les rangs et apporter leur soutien à cette manifestation, fer de lance du mouvement populaire. Tel un rituel, le premier slogan entonné est celui qui met en avant l'attachement à la primauté du civil sur le militaire : «Daoula madania, machi askaria !» Et pour lever toute ambiguïté sur cette revendication, on enchaîne : «Y en a marre des généraux !», «Les généraux à la poubelle, wel Djazair teddi listiklal !» Plus explicite dans le maintien du cap, la foule scande : «Hada chaab la yourid hokm el askar min jadid !» Autant de slogans qui suffisent à distiller un message limpide au chef d'état-major qui impose l'élection présidentielle comme étant l'ultime solution à la crise politique qui prévaut dans le pays. A l'instar de ces millions d'Algériens qui occupent la rue chaque vendredi, la réponse de la communauté universitaire est du même acabit. «Makanche intikhabte ya el issabate !», «Makanche el vote, ya s'hab el casse-croute !» A travers des banderoles, les manifestants passent en revue la conjoncture actuelle. Le pouvoir n'a émis aucune mesure d'apaisement et s'entête à organiser un scrutin présidentiel pour le 12 décembre prochain. La révision des listes électorales est déjà entamée et pas moins de 39 candidats à la candidature ont déjà retiré les formulaires. Face à cette politique du fait accompli, la réaction est prévisible : «Makanche el vote, wallah ma ndirou, Bedoui Bensalah lazem iterou, loukane berrssas alina y tirou, wallah mana habssine !» Cette ode à la résistance est un concentré de revendications citoyennes. La communauté universitaire, composante de ce peuple, rejette la solution de l'élection, vouée à la pérennisation du système et ses affidés. Elle continuera de défendre ses aspirations quels que soient les moyens de répression auxquels elle sera soumise. Hier encore, les manifestants n'étaient pas très nombreux, mais ils ont battu le pavé. Deux haltes ont été marquées, la première devant la maison du syndicat, la seconde devant le tribunal du boulevard Belouizdad. L'une comme l'autre, elles se sont voulues dénonciatrices d'une cause dévoyée et d'une justice aux ordres qui jette en prison des manifestants pacifiques. «Adalate etilifoun, wel khain wella feraoun», «Sahafa horra, Adala moustakila». A gorge déployée, étudiants, enseignants et citoyens ont réitéré leur engagement en ce 31e acte de la mobilisation. Tous se dispersent dans le calme avec le sentiment du devoir accompli et la promesse d'être plus nombreux pour le prochain round du mouvement contestataire.