Trouver du pain à Constantine après 12h, relève du miracle. Les retardataires, -entendez par là ceux qui n'ont pas eu le temps de faire la chaîne à l'entrée des quelques boulangeries qui restent au centre de Constantine-, se rabattent, au détriment de leur santé, sur le pain vendu dans la rue, sans aucune norme d'hygiène, en plus d'être plus cher (10 DA la baguette), ou, s'ils sont regardants, ils se mettront à la diète. « C'est terrible, je travaille à Constantine, loin de ma famille, et la première chose dont je manque continuellement et cruellement, qui me frappe et me scandalise, est le manque de pain dans la 3e ville du pays », nous dira un citoyen originaire d'une ville limitrophe. Comme nous avons eu à le relever dans une précédente livraison, le pain est le plus souvent introuvable sur les lieux où il devrait être, mais présent sur les trottoirs, à la merci de la poussière et de la crasse qui caractérisent nos rues, et à proximité des pots d'échappement des voitures. Dans nos tentatives d'en savoir plus sur cet aliment essentiel, que d'aucuns ne respectent plus (on en trouve en quantité près des bennes à ordures), nous nous sommes rapprochés de certains boulangers qui invoquent, pour la plupart, la « concurrence déloyale », exercée par les vendeurs informels, « approvisionnés par des fabricants de pain clandestins », « la difficulté à trouver des jeunes intéressés par ce métier pour (les) aider », ou encore « les charges et les impôts trop lourds, avec le prix de la baguette (7,50 DA), dérisoire par rapport à la main-d'œuvre, l'énergie et la matière première », selon eux. N'est-il pas temps, pour les autorités concernées, de prendre une fois pour toutes le taureau par les cornes et régler ce problème d'importance stratégique ? Il faut savoir que le pain fait l'objet d'odieuses manipulations, aussi bien par beaucoup de boulangers « réglementaires », que par ceux travaillant clandestinement dans des garages, ou autres hangars, dans des conditions d'hygiène désastreuses. L'on nous fait pourtant savoir que l'on compte environ 400 boulangeries dans la wilaya, dont 300 au chef-lieu. Mais ont-ils le droit d'agir à leur guise, comme par exemple sortir tous en même temps en congé, comme ce fut le cas l'été dernier ? Ont-ils également le droit de faire écouler dans la rue, par des gamins, cette denrée sacrée ? La plupart se plaignent, mais ne respectent aucunement ce noble métier. C'est vrai qu'il est dur, et demande des sacrifices, comme se lever tôt, ou travailler par une chaleur torride, mais, n'en a-t-il pas été ainsi depuis la nuit des temps ?