La Tunisie a renforcé ses mesures de confinement, pour éviter une fulgurante propagation horizontale du nouveau coronavirus (Covid-19). L'évolution des statistiques montre que l'aplatissement de la courbe de contagion n'est pas encore atteint. Le gouvernement reproche à une bonne partie de la population de ne pas respecter les préventions requises. Pourtant, la Tunisie n'a enregistré que 23 décès dus au Covid-19 sur 623 cas recensés depuis le 1er mars dernier. Les ministres tunisiens de la Santé et de l'Intérieur, Abdellatif Mekki et Hichem Mechichi, ont attiré l'attention sur l'extrême gravité de la situation en Tunisie, dans un point de presse, tenu avant-hier, au siège du gouvernement. La courbe de propagation horizontale de la maladie ne s'est pas aplatie, malgré la fermeture des frontières le 16 mars dernier et l'ordre de confinement systématique des arrivants. Les deux ministres ont clairement accusé une large frange de la population de non-respect des mesures de confinement, ce qui n'a pas arrêté la contagion et risque de se traduire sur le terrain par une ascension fulgurante et incontrôlable de la pandémie. «Nous risquons de nous trouver avec des morts dans les couloirs des hôpitaux et devant leurs portes, comme c'est le cas dans des pays plus développés que le nôtre», a alerté le ministre de la Santé, qui n'est pas parvenu à retenir ses larmes, en disant que l'on peut être obligé à «faire le tri parmi les patients à mettre sous oxygène, voire à traiter». Danger public Le ministre Mekki a révélé que les cas Covid-19, suivis chez eux, n'ont pas respecté les consignes du corps médical, entraînant des contagions dans leur proximité. Le ministère de la Santé a donc décidé de les soigner dans les structures hospitalières, ce que les patients n'acceptent pas de bon gré. Pis encore, le ministre reproche à certains porteurs du virus de ne pas donner la liste complète de ceux qu'ils ont rencontrés, pour les contrôler afin d'éviter la contagion. «Ces personnes non identifiées constituent un danger public», a déclaré le ministre, en montrant des tableaux indiquant des propagations de la pandémie, au 4e degré, de personnes qui n'ont pas respecté le confinement. «Si certains malades n'ont contaminé qu'une seule personne, d'autres en ont contaminé jusqu'à 32, par non-respect du confinement», s'est insurgé le ministre, considérant que de «pareilles attitudes sont criminelles et assimilables aux assassinats non prémédités». Il affirme que la situation aurait pu être meilleure grâce à de simples agissements responsables de respect du confinement et de la distanciation sociale, lorsque l'on se retrouve dans la rue. Face à ce risque majeur, et en plus du couvre-feu, instauré depuis le 18 mars dernier, de 18h à 6h, seuls les circuits sanitaire et alimentaire restent opérationnels. Les sorties des citoyens de chez eux sont limitées à la pharmacie et l'approvisionnement alimentaire. L'ordre a été donné aux forces de l'ordre de confisquer les véhicules non autorisés à circuler. La circulation entre les régions a été strictement interdite. Des rondes d'hélicoptères de la sécurité contrôlent le respect du confinement et des patrouilles terrestres font le relais pour demander aux populations de respecter le confinement, voire d'arrêter les contrevenants. Toute infraction est pénale. Les piétons en fraude sont emprisonnés pour trois jours. De lourdes amendes, de l'ordre de 2000 dinars (600 euros) résultent des confiscations de véhicules. «On est obligé d'appliquer la loi pour protéger la population contre les dépassements de certains», assure le ministre de l'Intérieur. Il est à rappeler que la Tunisie compte, au 6 avril, 623 cas de Covid-19, dont 193 cas importés. 23 décès ont été enregistrés et 73 patients sont hospitalisés, alors que 25 sont guéris. Les services de la santé ont procédé à 8274 tests, à une moyenne supérieure à 500 tests par jour. La Tunisie qui compte opérer 10 000 tests la semaine prochaine, recevra demain un stock de provisions médicales qu'un avion militaire est allé, avant-hier, ramener de Hong Kong. Ce grand nombre de tests va permettre de dresser une cartographie de la pandémie et de mieux la cerner. «Le respect des recommandations médicales du confinement, pendant les dix prochains jours, va nous permettre de contrer la pandémie. Autrement, ce sera le désastre», indique, anxieux, le ministre de la Santé.