Il faudra bien qu'un jour sonne le glas du virus corona, que la vie reprenne son «cours normal» et qu'intervienne alors le temps du bilan. D'abord celui des pouvoirs publics vis-à-vis de l'épidémie, s'ils ont joué pleinement leur rôle face à la propagation du coronavirus, préservé autant que possible la population du besoin et anticipé sur les lendemains post-virus. Globalement, on peut dire que l'Etat a été à la hauteur du défi, bien qu'il ait perdu un bon mois en négligeant l'importance des tout premiers cas apparus dans la wilaya de Blida. Le confinement a fini par être total dans cette région, mais il aurait fallu l'élargir au plus grand nombre possible de wilayas, même celles où aucun cas n'a été signalé. Les autorités se sont quelque peu rattrapées en imposant un peu partout un couvre-feu partiel à partir de 15h au lendemain matin 7h. Le souci majeur de l'Etat en matière de confinement est de permettre aux citoyens de disposer de suffisamment de temps pour s'approvisionner en produits et services essentiels. Il y a eu quelques couacs, des centres de distribution de semoule pris d'assaut et des files interminables de retraités devant les guichets des bureaux de poste. Mais les choses ont fini par s'arranger quelque peu. Reste que les mesures strictes de confinement préconisées par les services médicaux peinent à être respectées comme il le faut, à tout moment et en tout lieu, plus particulièrement dans les quartiers populeux des grandes villes. Le manque de discipline reste la principale cause, alimenté par l'insuffisance de masques et autres produits de protection. Ce qui explique aussi, en plus du retard pris en matière de confinement, la progression constante de l'épidémie, avec son lot de victimes. A l'actif des autorités, de bonnes décisions : l'importation de grandes quantités de matériels en tout genre destinés aux hôpitaux et l'autorisation qui leur a été donnée de pratiquer le traitement à l'hydrochlorophine, lesquelles ont sans nul doute pesé sur le recul du nombre de décès et de nouveaux cas de contamination. Ajouté à cela, sur le plan socioéconomique, l'allégement des procédures fiscales et parafiscales en faveur des entreprises en crise depuis le début de l'épidémie. Une fois sortie de la tétanisation et de l'incompréhension, la population a fait jouer sa fibre légendaire, celle de la solidarité, en direction des hôpitaux et des familles démunies. Nul doute que l'addition des efforts de tous finira par faire reculer l'épidémie, voire la fera disparaître, et pour cela il faut bien compter deux à trois mois. A ce moment-là devront être tirées les leçons de cette terrible épreuve qui a ébranlé autant le monde politique que la société toute entière. Sans conteste, le premier chantier à lancer concerne la refonte du système de santé publique pour que plus jamais le pays ne soit pris au dépourvu en cas de catastrophe sanitaire. Il s'agira de revoir de fond en comble ce qui existe, d'en garder ce qui est bon et d'en éliminer tout ce qui est mauvais, en restant bien entendu dans le fondamental qui est la gratuité des soins. Le second chantier concerne la relance de l'économie afin, d'un côté, de réduire les dégâts causés par les mois d'épidémie, par la préservation des emplois notamment, de l'autre de créer le plus possible de nouveaux postes de travail au profit des chômeurs, les jeunes particulièrement, qui malheureusement se comptent par millions . Enfin, le consensus de survie né dans le pays à la faveur de cette terrible épreuve devra être saisi par le pouvoir politique pour favoriser un autre consensus, celui-là pour la mise en place d'une nouvelle Algérie. Il s'agira d'ouvrir une nouvelle page, où «démocratie» s'écrira en lettres d'or. C'est la revendication-clé du peuple algérien, portée une année durant dans la rue par le hirak, qui incarne les valeurs nationales dans ce qu'elles ont de plus positif. Le hirak a tracé la voie du futur. Elle devra être empruntée par tout le monde politique.