Les deux jours de l'Aïd ont été marqués par des coupures d'eau qui ont gâché la fête des habitants de la capitale. Privés d'eau notamment durant les premières heures de la matinée, des habitants de certaines cités sont sortis dans la rue pour exprimer leur mécontentement face à une situation qui devient récurrente. A Aïn Benian, ce sont des centaines de citoyens qui ont bloqué l'artère principale de la ville pour protester contre ce qu'ils appellent «le mépris et l'indécence de la Seaal qui a coupé l'eau durant toute la journée du vendredi, alors que le besoin en eau durant cette journée de sacrifice est le plus important durant toute l'année», déplorent-ils. Rappelons que ces coupures, qui ont transformé les cités de la capitale en dépotoirs, ont été d'une manière ou d'une autre prévues et annoncées par le ministre des Ressources en eau dans un communiqué paru la veille et qui appelait les Algériens à «l'utilisation rationnelle et modérée de l'eau», une manière de préparer les citoyens à ces coupures. «Comment peut-on faire ça alors que la consommation de l'eau durant la fête de l'Aïd connaît des pics inégalables. La Seaal a démontré encore une fois qu'elle est incapable de gérer ce secteur qui connaît des défaillances flagrantes» s'insurge un habitant de la commune de Bordj El Bahri, et de préciser, «qu'en temps normal, la Seaal peine à satisfaire les besoins de la population en eau potable, que dire alors d'une fête comme l'Aïd, ou la consommation est à son apogée». Il est vrai que la quantité d'eau potable consommée en cinq heures de temps durant l'Aïd équivaut à la consommation de 24 heures durant les jours ordinaires. Cependant, la Seaal aurait dû prévoir cela ; «gérer, c'est aussi prévoir», se plaît à dire un habitant de la commune. En ce sens où la Seaal aurait dû prévoir des quantités d'eau suffisantes en recourant au stockage, du moment que ce genre de coupures et d'insuffisances étaient prévisibles. Que ce soit à Rouiba, Réghaïa, Heuraoua, à El Harrach, ou encore dans les communes de l'ouest de la capitale, les habitants ont dû faire face comme ils le pouvaient à ces coupures. «Nous avons différé le sacrifice parce qu'il n'était pas possible de nettoyer tous les déchets engendrés par un seul jerrican d'eau», assure un habitant de la cité Cosider à Réghaïa. A Heuraoua, les habitants des quartiers périphériques se sont rabattus sur les vendeurs de citernes d'eau. «C'est la seule solution que nous avions, sinon les ordures nous auraient envahis», fait savoir un habitant de la localité Aïn Kahla. Là où les habitants ne pouvaient pas acheter des citernes d'eau, leurs cités se sont transformées en véritables dépotoirs. A la cité Segna, dans la commune de Réghaïa, des fractions entières du quartier ont été envahies par les déchets, notamment dans les espaces communs aux immeubles, qui se sont transformés en décharges. Les murs des cages d'escalier sont maculés de sang et les odeurs envahissent les moindres recoins de la cité, rendant l'air, en ces temps de grande chaleur, irrespirable. «Au moment où les autorités appellent à plus de vigilance de la part des citoyens pour endiguer la pandémie du coronavirus, ce sont ces mêmes autorités qui faillent à leurs obligations», a souligné un habitant de la localité de Aïn Kahla. A Alger Plage, les habitants des quartiers situés en bord de mer ont utilisé l'eau de la grande bleue pour nettoyer les restes du sacrifice. «Nous avons attendu jusqu'à 13h, dans l'espoir que la consommation d'eau allait baisser. Mais sans résultat. Nous avons préféré égorger le mouton sur un rocher plat de la plage. Au moins ici l'eau est abondante», confie un habitant du quartier Ihaden. En parcourant le littoral est de la capitale, à partir de Coco Plage, jusqu'aux Ondines, nombre d'habitants ont égorgé leurs moutons sur les rives de la grande bleue. L'Aïd El Adha 2020 restera dans les annales. Les citoyens s'en souviendront aussi longtemps que sera consommé le mouton du sacrifice.