Les autorités marocaines pavoisent et cherchent à présenter le rapport de ce vendredi du Conseil de sécurité sur le conflit du Sahara occidental et la résolution prorogeant le mandat de la Minurso pour une année comme une victoire diplomatique du Maroc. Le ministre marocain des Affaires étrangères s'est ingénié lors d'une conférence de presse à prêter au rapport du Conseil de sécurité des engagements et des positions qui n'existent que dans l'imaginaire du makhzen bâti autour du fait accompli colonial au Sahara occidental. En égrenant le rapport, le chef de la diplomatie marocaine s'est focalisé de manière insidieuse sur deux points considérés par la partie marocaine comme un plaidoyer de l'instance onusienne pour une redéfinition des acteurs du conflit impliquant directement l'Algérie en tant que partie prenante invitée à s'associer aux tables rondes des pourparlers directs qu'espère réactiver le Conseil de sécurité, aux côtés de la Mauritanie, du Maroc et du Front Polisario. Flairant les basses manœuvres du palais royal et de ses soutiens parmi les membres influents du Conseil de sécurité – les Etats-Unis d'Amérique et la France – appuyés par les lobbies pro-marocains épaulés par un nouvel allié : Israël depuis l'établissement des relations diplomatiques avec l'entité israélienne, l'Algérie, par la voix de l'ambassadeur chargé du dossier du Sahara occidental et des pays du Maghreb, Amar Belani avait, quelques jours avant la tenue de la réunion du Conseil de sécurité, exprimé sa position de rejet concernant ce format de tables rondes incluant la participation de pays voisins. Un format qui a fait par le passé la démonstration de son lamentable échec, comme l'attestent les différents rounds de négociations, infructueux, à l'instar de la rencontre de décembre 2018 organisée au palais des Nations, au siège de l'Onu à Genève, sous la présidence de l'ex-envoyé spécial pour le Sahara occidental du secrétaire général de l'Onu, l'ancien président allemand Horst Kohl. Velléités d'impliquer l'Algérie Hier, le ministère des Affaires étrangères et de la Communauté nationale à l'étranger a rendu publique une déclaration exprimant «le profond regret de l'Algérie quant à l'approche fondamentalement déséquilibrée consacrée par ce texte qui manque cruellement de responsabilité et de lucidité du fait du forcing de certains des membres influents dudit Conseil». L'Algérie, poursuit la déclaration du ministère des Affaires étrangères et de la Communauté nationale à l'étranger, «attend du nouvel envoyé personnel du secrétaire général qu'il inscrive strictement son mandat dans la mise en œuvre de la résolution 690 (1991) portant plan de règlement accepté par les deux parties au conflit, le royaume du Maroc et le Front polisario et adopté unanimement par le Conseil de sécurité». De son côté, le Front Polisario a également rejeté fermement dans la forme et le fond le rapport du Conseil de sécurité qui, selon les Sahraouis, fait fi des aspirations légitimes du peuple sahraoui à l'indépendance conformément aux résolutions pertinentes des Nations unies consacrant le conflit du Sahara occidental comme un problème de décolonisation qui se trouve pendant au niveau de la commission de décolonisation depuis plusieurs décennies. Instruit de l'expérience du passé où le Front polisario avait accepté de répondre favorablement à l'appel au cessez-le-feu de la communuaté internationale pour donner une chance au processus de négociation, les autorités sahraouies refusent de tomber cette fois-ci dans le même piège. La question est de savoir pourquoi les membres du Conseil de sécurité qui sont à la manœuvre dans le dossier du Sahara occidental aux côtés du royaume du Maroc exhument-ils maintenant cette carte désuète de l'implication directe de l'Algérie dans le conflit alors que les acteurs du conflit ont été clairement identifiés en vertu des résolutions pertinentes de l'ONU ? La partition apparaît bien orchestrée entre le Maroc et ses soutiens : en sortant des tiroirs poussiéreux cette antienne qui ne fait plus recette, a fortiori depuis la rupture des relations diplomatiques entre Rabat et Alger, on cherche clairement à faire du conflit du Sahara occidental un conflit opposant le Maroc à l'Algérie au mépris de l'histoire, des résolutions de l'Onu et des arrêts de la Cour internationale de la Haye sur le statut de l'ex-colonie espagnole. C'est une nouvelle manœuvre pour maintenir le statu quo et gagner du temps tout en poursuivant les actes de pillage des ressources naturelles du peuple sahraoui. Advertisements