De haut de ses 1000 m d'altitude (ou presque) sur la chaîne montagneuse du Djurdjura, le village Lemsela, dans la commune d'Illoula, à 74 km à l'est de Tizi Ouzou, vient de faire comme un rappel bénéfique sur l'utilité des produits et savoir-faire locaux dans toute politique de développement local. La fête de la figue, devenue une tradition en voie d'incrustation dans la vie de la population locale de ce village, a enregistré sa 5e édition, célébrée jeudi et vendredi derniers.Pour cette année, la manifestation n'a pas reflété uniquement une ambiance festive, mais aussi a été une occasion de faire le constat de la politique du développement rural entonnée avec redondance par les pouvoirs publics depuis quelques années.A l'ouverture de la fête de la figue, les représentants des autorités locales ont été présents, dont entre autres, des élus à l'APW et des représentants de la direction des services agricoles (DSA) et de la Conservation des forêts. Leurs interventions respectives ont été écoutées avec le goût de «déjà entendu». En effet, les uns et les autres se sont contentés de faire le «remake» du discours qu'ils ont tenu lors des éditions précédentes. Le représentant de la DSA rappellera aux citoyens d'Illoula que «la politique de renouveau rural accorde un grand intérêt à l'encouragement des activités en relation avec le monde rural, notamment à travers les programmes de développement de l'arboriculture ou les PPDRI (...) C'est à la population de se rapprocher de l'administration chargée du secteur agricole pour faire des propositions concernant des projets à financer ». Le vice-président de l'APW de Tizi Ouzou, lui, a axé son intervention sur le concept du tourisme solidaire qui consiste à rendre les villages de la région attractifs et accueillants. Pour ce faire, il requiert la réhabilitation des villages, l'amélioration de l'environnement et surtout la promotion des produits du terroir et tout ce qui est savoir-faire local. Mais la réaction des acteurs locaux, quant à ce discours, n'est plus optimiste, plutôt pessimiste. La raison : «Depuis la première édition de cette fête nous écoutons le même discours. Dans la réalité, les embûches sont insurmontables lorsqu'il s'agit de solliciter les pouvoirs publics pour appuyer les initiatives locales», dira le président de l'association Tighilt, organisatrice de la manifestation. En effet, depuis plus de trois ans que des projets, qui visent à développer la production de la figue, avec de nouvelles plantations et la création d'une unité de séchage au niveau de cette localité, ont été projetés dans le cadre des PPDRI, mais aucune avancée n'a été enregistrée à ce jour. Les pouvoirs publics oseront-ils prétendre venir en aide à un village qui prend en charge lui-même ses propres préoccupations à près de 80%. Toutes les opérations d'embellissement, l'entretien des ruelles, la canalisation des eaux pluviales et même l'entretien du réseau AEP est pris en charge par la population du village. Cap sur les produits forestiers Concernant, le développement des activités agricoles au niveau du village, certes, des dispositifs de soutien existent, comme la subvention des plantations, de la greffe d'arbres fruitiers ou les opérations incluses dans le cadre des PPDRI, mais les procédures administratives pour y parvenir sont tellement lourdes et compliquées, que les paysans de la région préfèrent travailler leur terre en ne comptant que sur leurs propres moyens et leurs forces.Pourtant, la volonté ne manque pas et les porteurs de projets sont de plus en plus nombreux à manifester leur intérêt pour innover dans le créneau de l'agriculture de montagne et la promotion des produits du terroir. La démonstration vient d'être faite par M. Guechida, ingénieur agronome et apiculteur de profession. Après avoir développé tous les sous-produits d'apiculture, à commencer par la production du miel avec ses différentes variétés, le pollen et la cire, ce spécialiste de l'apiculture a l'ambition d'aller vers l'exploration des produits forestiers jusque-là méconnus du consommateur algérien. C'est le cas des mûres, de l'arbouse ou de la myrtille qui sont des produits à haute valeur et très utilisés dans l'industrie agroalimentaire. «Actuellement, ces produits sont importés pour les besoins de la consommation locale, alors que nos forêts renferment un fort potentiel en ronce, arbousier ou myrte.» Il suffit de les mettre en valeur et de concevoir des systèmes de collecte pour les rendre des produits économiquement viables». C'est le même cas avec la figue de barbarie qui commence désormais à avoir une valeur marchande sur le marché local. Dans un passé récent, ce produit est resté en marge de la diète locale. Ce n'est qu'avec la conjoncture actuelle marquée par la diversification du marché des produits alimentaires et la tendance du consommateur à aller vers la reconquête des produits du terroir local que la figue de barbarie commence à se frayer une place sur le marché. Cependant, l'Etat a un grand rôle à jouer dans la mise en valeur des produits du terroir qui sont une réelle filière agricole dont les potentialités en termes de création d'emploi et de valeur ajoutée ne sont pas négligeables. Il y a eu un programme dit de labellisation des produits locaux, à travers lequel les pouvoirs publics comptent se pencher, dans la première phase, par l'huile d'olive et la datte. Mais son application reste superflue et confuse dans les milieux des opérateurs.