Le cinéma marocain se porte plutôt bien et a même connu quelques développements importants ces dernières années. Comme la création par les cinéastes eux-mêmes d'une société de distribution qui est exclusivement consacrée à promouvoir les films marocains et à assurer leur distribution dans de bonnes conditions. Il y a aussi cette école de cinéma à Ouarzazate, dirigée par le réalisateur Mohamed Asli, l'auteur de Casablanca, les anges ne volent pas (Tasit d'or aux journées cinématographiques de Carthage 2004) : Kanzamano qui fonctionne avec un budget alloué conjointement par le Centre du cinéma marocain (CCM) et la société italienne Luce. Une dizaine de films marocains sont produits chaque année. A Cannes, des cinéastes marocains Narjiss Nezzar (Les yeux secs) et Faouzi Bensaïdi (Mille mois) ont eu la bonne surprise de voir leurs films montrés dans la section officielle Un certain regard. Au niveau des thèmes abordés, on constate une certaine liberté de ton. Un cinéaste formé à Prague, Abdelkader Lagtaâ, a fait des films qui ont reçu un accueil public record, puisqu'il a abordé le sujet de la corruption qui sévit à une vaste échelle au sein du pouvoir marocain. Lagtaâ a fait Les Casablancais en 1998 et ensuite La porte close sur le thème de l'homosexualité, un tabou enfin levé (son film n'a pas été censuré). Comme c'est le premier cinéaste qui aborde franchement la réalité sociale, les magouilles de l'administration, ses films demeurent longtemps à l'affiche dans les salles du pays. Mostafa Derkaoui, dans Casablanca by night se penche quant à lui sur le drame très répandu de la prostitution. Il s'agit ici du cas d'une jeune fille qui se prostitue la nuit dans la capitale économique du royaume (parmi des milliers d'autres comme elle) afin de pouvoir payer une opération chirurgicale à son frère malade. Côté comédie, après les succès retentissants des films de Abderrahmane Tazi, une série consacrée au mariage dans les familles traditionnelles où les choses atteignent parfois le sommet du délire comique A la recherche du mari de ma femme, Les voisines d'Abou Moussa, une autre comédie marocaine a fait plus d'un million d'entrées, chiffre encore record. Il s'agit des Bandits qu'a réalisé le célèbre humoriste Saïd Naciri. Parmi les autres cinéastes qui demeurent actifs à Casablanca, il y a Saâd Chraïbi, Nabil Lahlou, Hassen Ben Jelloun, Hakim Bélabbes et Mohamed Asli (qui travaille aussi en Italie). Le cinéma marocain n'est pas seulement casablancais. Il y a un groupe de cinéastes natifs de Tanger et qui n'ont jamais quitté leur ville tout en continuant d'exercer une influence notable sur le cinéma national. Parmi eux, il faut citer Farida Benlyazid, Une porte sur le ciel, Jilali Ferhati Poupées de roseau, La plage des enfants perdus, et surtout le plus talentueux sans doute des cinéastes marocains : Moumen Smihi. Après avoir réalisé des œuvres d'auteur, jetant un record nostalgique sur sa ville, Moumen Smihi est parti au Caire pour faire Le drame du Caire, avec Yusra et Nabil Halafaoui. C'est une œuvre qui, jusqu'à présent, n'est pas encore sortie sur les écrans. Triste affaire qui a opposé le cinéaste et ses producteurs (à la manière des longues tractations de Scorsese avec la maison de production Miramax qui a reculé indéfiniment la sortie des Gangs de New York). Le cinéma marocain s'est illustré ces dernières années par de bons succès, mais il reste possible que des blocages interviennent qui empêchent un cinéaste (comme Moumen Smihi) d'exercer son droit absolu de montrer au public son film.