La lutte antitabac doit constituer une priorité, aujourd'hui, face aux ravages causés par le tabagisme dans le monde. Nul n'ignore que le tabac tue. Il est à l'origine de la majorité des cancers tant chez l'homme que chez la femme. Il a été prouvé qu'il est responsable à 90% des cas des cancers bronchiques. C'est, du moins, ce qu'ont affirmé les spécialistes lors des 10es journées nationales d'oncologie thoracique, organisées par la Société algérienne d'oncologie thoracique (SAOT), mercredi dernier, à la Cité des sciences à Alger. Ils ont également mis en garde contre le tabagisme passif qui constitue un danger pour la santé et l'environnement. Le professeur Djebbar, chef de service au secteur sanitaire de Batna, a mis en exergue, en les citant, les résultats d'une étude conduite au CHU de Batna où il est montré que 54% des médecins et du corps paramédical fument sur les lieux de travail devant les malades. Selon lui, chaque année, 40 nouveaux cas de cancer du poumon sont admis au CHU de Batna, une moyenne nationale, a-t-il dit, en précisant que le cancer du poumon touche surtout la frange d'âge de 55 à 60 ans. Le facteur le plus incriminé est le tabac, dans ces cas-là. Pour lui, le taux de décès causés par la fumée est comparable au nombre de personnes qui décèdent dans un crash d'un avion par an. Il déplore le fait que les consultations ne se font, généralement, qu'à un stade avancé de la maladie. « Ce qui rend la prise en charge très difficile et plus coûteuse », a-t-il dit. Concernant le tabagisme passif, le Pr Djebbar affirme qu'il présente un danger supplémentaire. Il explique que les toxiques dégagés par une seule cigarette sont l'équivalent de 40 cigarettes inhalées par le fumeur passif. Il est donc urgent, selon lui, d'introduire dans les services de pneumologie des consultations au sevrage tabagique, pour aider les patients à se débarrasser définitivement de cette drogue. « L'accoutumance du tabac est plus importante que la drogue.Il est plus facile de sevrer un drogué à la cocaïne qu'un drogué au tabac », a-t-il signalé. Pour le Pr Djebbar, il est important d'œuvrer dans la prévention, car il est constaté, en Algérie, que l'incidence tend à rejoindre la prévalence des cas de cancers du poumon. L'Algérie, a-t-il ajouté, enregistre près de 4500 cas de cancer par an. « Ce qui est énorme », a-t-il estimé, en précisant que les moyens de prise en charge sont encore insuffisants tant pour les médicaments ou autres traitements, notamment la chirurgie. « Le manque de médecins spécialistes en chirurgie thoracique ainsi que des structures spécialisées pose un sérieux problème. L'unique service qui accueille ce type de malades à Mustapha Bacha est actuellement en réfection », a-t-il souligné. Les spécialistes redoutent, ainsi, une épidémie d'ici les dix années prochaines. Ils plaident, donc, pour le dépistage systématique qui permet d'assurer une meilleure prise en charge et d'améliorer le pronostic. Le Dr Ameur, président de la SAOT, a insisté sur la prévention qui permettra de réduire de moitié le nombre de cas de cancer. Une prévention qui doit commencer par la lutte antitabac en appliquant tous les textes réglementaires en vigueur. Par ailleurs, la deuxième journée de cette rencontre a été consacrée au tabagisme et à l'oncologie. Selon une étude conduite par l'équipe du service de pneumologie de l'hôpital de Beni Messous, à sa tête le Pr Skander, le tabagisme a relativement diminué en Algérie. Mais il a augmenté chez les jeunes âgés entre 11 et 14 ans. Les résultats de l'étude ont révélé un taux de 39% contre 43% chez les jeunes âgés entre 15 et 24 ans, ce qui, selon elle, est très inquiétant.