Un peu plus de 14 millions de Marocains devraient théoriquement prendre demain le chemin des bureaux de vote pour élire leurs représentants à la chambre basse du parlement. Maroc : De notre envoyé spécial Ils sont 33 partis qui auront redoublé d'ingéniosité, une dizaine de jour durant, pour capter leur intérêt, à subir l'épreuve populaire à travers les urnes. Des urnes qui risquent fort d'être boudées par de larges secteurs de l'électorat marocain qui aura brillé par son absence durant la campagne. Le taux d'abstention serait le plus grand vainqueur de ces législatives s'attend on ici, y compris au sein des partis politiques eux-mêmes. Pourtant, ce scrutin offre un large spectre de choix pour l'électeur marocain qui pourra à loisir surfer entre l'extrême gauche et la droite en passant par les nationalistes conservateurs, les socialistes et bien sûr les islamistes. Et chaque courant possède ses « petits » que rien ne divergent avec la « maison mère » sinon le souci sans doute voulu par le Makhzen d'atomiser la classe politique en créant ce carnaval. L'électeur non partisan devra ainsi passer en revue pas mois de 35 listes dans le bureau de vote avant de faire son choix. Aussi paradoxal que celui puisse paraître, 90% des programmes de ces partis en lice sont quasiment des copies conformes. Déjà que la coalition au pouvoir depuis 2002 pilotée par les vieux briscards de l'USFP, de l'Istiqlal et le Parti du progrès et du socialisme (PPS), du Mouvement populaire (MP) et du Rassemblement national des indépendants (RNI) offre toutes les tendances idéologiques possibles grâce à un mariage de raison béni par Sa Majesté. Les huit partis qui composent ce conglomérat devraient se livrer une bataille fratricide et mener un autre front contre leurs congénères, voire leurs clones issus de l'opposition. L'USFP de Youssoufi se mesurera ainsi à une alliance triangulaire de la gauche issue de ses rangs via le Parti socialiste unifié (PSU) de Mohamed Sassi, des partis de l'avant-garde démocratique socialiste (PADS) d'Ahmed Benjelloun et enfin du Parti socialiste d'Abdelmadjid Bouzoubâa. Ce pôle de gauche constitue une sérieuse menace pour l'USFP dont les dirigeants sont accusés de faire dans le carriérisme depuis leur rentrée au gouvernement au lieu de concrétiser les réformes politiques promises du temps où ils étaient dans l'opposition. PJD : embrasser la main du roi faute de… C'est précisément cela le cheval de bataille du groupe de Sassi qui fait de la monarchie constitutionnelle, la vraie, un axe stratégique de son programme et de sa campagne. « Il ne sert à rien de faire élire un programme si l'on n'a pas les moyens de l'appliquer », c'est la substance du discours de Sassi, à savoir que l'actuel gouvernement ne fait qu'exécuter la politique du roi sans trop pouvoir prendre des initiatives sur la base desquelles le peuple l'a choisi. Cette réforme des institutions avec son corollaire la séparation des pouvoirs et la limitation de l'influence du palais royal dans la gestion politique du pays, constitue l'enjeu central de cette élection. Evidemment, c'est dans l'opposition que s'exprime — plus au moins assidûment — cette exigence, tant les partis de la coalition ont les pieds et les poings liés à Sa Majesté. Dans ce registre en retrouve le superfavori des sondages maison, le Parti de la justice et le développement (PJD) qui, comme le pôle de gauche, réclame « une réforme constitutionnelle globale » et « la réhabilitation des partis et des instituions politiques ». Sans doute que le PJD, craignant sa diabolisation, ne voudrait pas déclarer d'entrée la guerre au souverain, en optant pour la solution « douce et progressive », pour reprendre la formule de l'un de ses dirigeants. Le noyau dur de ce parti islamiste emmené par Moustapha Ramid penche, lui, pour une réforme « ici et maintenant ». C'est d'ailleurs le grand débat, voire le grand dilemme de ce parti virtuel champion du scrutin de vendredi que le roi va devoir arbitrer comme d'habitude. Le PJD, par qui le changement devrait arriver, n'aura pas d'autres choix qu'embrasser la main du jeune roi faute de pouvoir la mordre. Pour l'instant… Le score que réalisera le parti de Sâadeddine Othmani ce vendredi rendra plus lisibles ses projections futures. Configuration de l'assemblée sortante Union socialiste des forces populaires (USFP) : 50 députés Istiqlal : 48 députés Parti de la justice et du développement (PJD) : 42 députés Rassemblement national des indépendants (RNI) : 41 députés Mouvement populaire (MP) : 27 députés Mouvement national populaire : 18 députés Union constitutionnelle (UC) : 16 députés Parti national démocrate (PND) : 12 députés Front des forces démocratiques (FFD) : 12 députés Parti du progrès et du socialisme (PPS) : 11 députés Autres petits partis : 48 députés