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Mabrouk Rachedi (Ecrivain)
« L'autre dimension de la vie : la passion »
Publié dans El Watan le 24 - 01 - 2008

Avant l'écriture, il suivait les tendances boursières à Paris. Il avait réussi dans les chiffres mais ce sont les lettres qui lui réussissent.
En novembre 2005, au moment de la crise des banlieues, où étiez-vous ? Cet événement a-t-il été le catalyseur de votre écriture ?
A cette période, j'étais dans la ville de banlieue où j'habite toujours. Il y a eu une flambée de violence dans ma cité où des voitures, une maison de l'emploi et une usine ont été incendiées. Mais l'événement n'a pas été le catalyseur de mon écriture car j'avais déjà écrit Le Poids d'une âme depuis trois ans ! N'y voyez pas de la préscience. Je ne faisais que décrire les violences certes plus larvées et moins médiatisées que je voyais depuis toujours en ouvrant ma porte.
Vous êtes jeune, avec déjà un parcours dans le monde de la finance. Comment et pourquoi vous êtes-vous tourné vers l'écriture ?
La finance me faisait très bien vivre matériellement mais il y a une autre dimension dans la vie : la passion. Issu d'un milieu modeste, j'ai compensé le manque d'argent en m'orientant vers le plus court chemin qui mène vers l'aisance matérielle. J'étais sur la voie royale qui mène au grand appartement, à la grosse voiture et aux costumes griffés. Puis, je me suis demandé si ce destin était vraiment le mien. Depuis l'adolescence, je couvais le rêve d'écrire et avec mon rythme de travail, je n'avais aucune chance de le caresser. Je me suis aperçu que je ne pouvais pas être à la fois un bon écrivain et un bon analyste financier. Alors j'ai écouté mon cœur. Le Poids d'une âme décrit et dénonce sur un rythme haletant, la manipulation politico-médiatique et policière des banlieues.
Pourquoi ce thème ?
Déjà, lors de la campagne présidentielle française de 2002, on a vu l'instrumentalisation médiatique autour de la violence qui, au lendemain du résultat du scrutin, a disparu de nos écrans. Depuis, elle apparaît sporadiquement, au gré de la fantaisie de nos journaux. Ainsi, j'ai été témoin en juin d'une scène de violence opposant une centaine de jeunes et de policiers et qui n'a été relayée que dans des médias locaux. En novembre 2005, la même scène aurait fait les choux gras de toute la presse française. Les cités sont un chiffon rouge que l'on agite pour alimenter les peurs à des moments précis et que l'on abandonne à leur sort le reste du temps. La plupart du temps !
Comment avez-vous construit les personnages et la trame de l'histoire ?
Tout y paraît réel, mais tout y est inventé, à moins que ce ne soit le contraire, tout est réel et rien n'est inventé ? Disons que je me suis inspiré de mon expérience dans ma cité pour décrire telle ou telle situation. L'enchaînement est fictif, mais des scènes sont tirées ou se rapprochent de la réalité. Un roman est toujours l'œuvre d'un moment donné.
Après sa sortie, et après en avoir discuté dans des dizaines d'endroits avec vos lecteurs, si vous deviez le reprendre aujourd'hui, que changeriez-vous pour l'actualiser ?
L'idée m'est venue très tôt, à l'adolescence. Je l'ai beaucoup réécrit et à chaque fois, les versions ont varié. Aujourd'hui encore, il y aurait une multitude de changements. J'ai désormais dépassé le cap de la trentaine et, si je suis toujours aussi révolté par certaines situations, ma façon d'exprimer cette révolte serait différente. Dans Le Poids d'une âme, j'ai placé un adolescent ordinaire au cœur d'une mécanique de l'absurde extraordinaire. Aujourd'hui, je m'intéresserais plus à la violence insidieuse, moins spectaculaire et quotidienne de la société sur l'individu.
En octobre 2006, un an après la crise de 2005, avec d'autres auteurs, entre autres lieux, vous avez été l'invité du Sénat pour débattre. Comment, avec le recul, avez-vous vécu cela ? Vous sentiez-vous reconnu, ou comme des « bestiaux » de foire ?
Les débats au Sénat ont été intéressants en ce sens qu'ils m'ont permis de rencontrer d'autres auteurs abordant des thématiques proches de la mienne. Entre nous, s'est ensuivi un dialogue riche qui a débouché sur une initiative commune qui est née dans les locaux de Respect Magazine : le recueil Chroniques d'une société annoncée. Les débats se sont bien déroulés car l'animateur a eu l'intelligence de prendre ses distances avec l'ordre du jour pour laisser s'exprimer chacun tout en maîtrisant la cohérence d'ensemble. Un intitulé de débat m'a laissé songeur : « La littérature comme mode d'intégration » à Sciences Po. L'intégration, ce concept flou qu'on ressort à toutes les sauces, appliquée à la décision d'écrire était un non-sens que chacun des participants a souligné. De façon générale, j'ai surtout apprécié que mon livre ait été bien reçu par les vrais lecteurs, ceux qui s'intéressaient à l'aspect roman et pas seulement à l'aspect sociétal. Ainsi, que le livre soit l'un des rares sélectionnés aux deux seuls festivals du premier roman Français, Laval et Chambéry, a été un très grand honneur, comme le Prix coup de cœur du premier roman reçu à Chatou. En tout, de mes nominations au Prix Méditerranée des lycéens, au Prix de Gironde en passant par le Prix Beur FM ou le Prix Rosine Perrier, en Savoie… j'ai touché toutes sortes de publics de passionnés de littérature et, avec les salons, les rencontres en milieux scolaires, carcéraux, dans des centres pour handicapés, dans des médiathèques, dans des librairies, ce sont les plus belles rencontres que j'ai faites.
Vous parliez justement des Chroniques d'une société annoncée, publiées par un collectif que vous avez créé. Où en est cette association avec des auteurs issus de la diversité ?
Pour le moment, les auteurs promeuvent le recueil de nouvelles en vue de récolter un maximum de fonds pour soutenir les initiatives culturelles et artistiques dans les milieux défavorisés-ruraux et urbains. Nous essayons d'entraîner dans notre sillage un maximum de monde via une campagne d'abonnement dont le prix est à dessein modique, pour devenir un vrai mouvement populaire et représentatif. Mais l'essentiel reste devant nous : matérialiser par des actes concrets les intentions que nous déclarons sur le papier. Concrètement, je reste aussi militant en dehors de l'association. Je suis en train de mettre en place un atelier d'écriture dans un Réseau d'Education Prioritaire à titre bénévole car c'est là que se joue un axe crucial de mon action : l'accès de tous à l'universalisme vers lequel nous porte la littérature. Pour moi, c'est tout le sens de l'écriture : l'ouverture à l'autre.
L'Algérie, pour vous, c'est le pays des parents et des ancêtres. Quand vous y pensez, quel est votre état d'esprit ? Dire : c'est très loin ? Ou : très peu pour moi ? Ou bien, il faut que je m'en rapproche ?
L'Algérie est très proche de moi. Même si je suis né en France, je me sens aussi algérien. J'y retourne autant que je peux et j'essaie de découvrir l'Algérie dans toute sa diversité en la parcourant depuis quelques années. C'est sûr, il faut que je m'en rapproche et j'espère qu'un jour mon livre sera largement disponible chez un éditeur algérien, en arabe, en kabyle et en français. Ce serait ma plus grande fierté.
Sur quoi travaillez-vous aujourd'hui ?
Je prépare un roman autour de la banlieue mais dans un style tout à fait différent. J'espère qu'on le découvrira l'année prochaine. J'écris aussi un essai satirique, après Eloge du miséreux, mon deuxième livre, publié en juin 2007 aux éditions Michalon. Comme je l'ai déjà dit, je prépare un atelier d'écriture et je collabore à Respect Magazine, un trimestriel qui promeut la diversité, source de richesse.
Repères
Né en 1976 dans une famille émigrée algérienne, Mabrouk Rachedi a abandonné pour l'écriture une carrière d'analyste financier dans une société de bourse. Il a publié son premier roman Le poids d'une âme, en 2006 aux Editions Lattès, Paris. Et l'année dernière, son premier essai Eloge du miséreux. De l'art de vivre avec rien du tout, paru aux Editions Michalon a été salué pour son ton impertinent et décapant contre la société de consommation et la marchandisation de l'homme. Le poids d'une âme est le récit du jeune lycéen Lounès, retardataire impénitent, renvoyé chez lui pour la journée. Il se retrouve pris dans un engrenage terrible. La police l'interpelle, et sans aucune preuve, il est accusé de complot islamiste. Grâce à un comité de soutien et à une partie de la presse, la baudruche de cette machination se dégonfle. Lounès sera lavé de tout soupçon mais, comme l'institution ne s'avoue jamais vaincue, il est condamné tout de même à l'expulsion du territoire car il ne dispose pas d'un titre de séjour en règle (à 18 ans, c'est la loi, il faut une « résidence »). Les coulisses de cette affaire, au tribunal, dans les journaux télévisés, chez le procureur ou le juge, sont admirables de vérité. Trois ans après les terribles violences qui ont embrasé les banlieues françaises, ce roman a pris la valeur de témoignage historique sur l'hystérie politico-médiatique qui a régné en novembre 2005 sur la France, puis de nouveau en 2007 avec l'affaire de Villiers-Le-Bel. Autour de Mabrouk Rachedi, plusieurs auteurs se sont fédérés, ne voulant plus laisser le terrain libre à l'affabulation.


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