La commissaire de l'UE, Mme Benita Ferrero-Waldner, regrettera que l'Algérie n'ait pas adhéré à la politique européenne de voisinage (PEV) qui aurait pu, d'après elle, multiplier ses domaines d'intervention et d'assistance comme « la démocratie et les droits de l'homme ». La commissaire européenne chargée des relations extérieures, Mme Benita Ferrero-Waldner, aura parfaitement justifié sa qualité de diplomate chevronné hier lors de la conférence de presse qu'elle a animée au siège de l'UE à Alger. Ses réponses aux questions précises des journalistes sentaient trop fort l'odeur du pétrole et du gaz. C'est apparemment le point focal de ce qui est appelé pompeusement « le partenariat » entre l'Algérie et l'Union européenne. Je vous informe que l'UE négocie actuellement avec l'Algérie un mémorandum sur l'énergie devant déboucher sur un partenariat stratégique », a annoncé, tout sourire, la commissaire européenne qui venait de sortir du bureau du président de la République. Pour Mme Benita Ferrero-Waldner, notre pays est trop précieux pour ne pas le rattacher à l'Europe via des pipes qui serviront de cordons ombilicaux et pour longtemps si possible. « L'Algérie cherche un marché fiable et l'UE cherche un fournisseur sûr », lance la commissaire, comme pour bénir ce mariage « énergétique » en préparation. Il ressort des déclarations parcimonieuses de Mme Ferrero que l'Algérie devrait servir de tube digestif à une Europe ébranlée il y a plus d'une année par l'opération « mort subite » décrétée par le géant russe Gazprom, quand le Kremlin avait décidé de suspendre l'alimentation en gaz de l'Europe via l'Ukraine. « Ce partenariat stratégique avec l'Algérie dans le domaine de l'énergie constitue un dossier important et la priorité de notre action diplomatique au sein de l'Union. » Et qu'est-ce que l'Europe offrira à l'Algérie en retour ? Mme Ferrero a parlé de vagues projets « concrets » dans lesquels l'UE devrait d'après elle « accompagner l'Algérie ». L'économie, le commerce, la sécurité, la libre circulation des personnes et l'émigration sont les secteurs identifiés pour recevoir ses appuis sans trop de détails, mis à part les 40 millions d'euros dégagés dans le cadre d'un programme de mise à niveau des PME signé lundi. Mme la commissaire a cependant évité « diplomatiquement » de commenter la question sur le partenariat à sens unique ni encore celle du traitement de l'immigration clandestine via le dispositif Frontex mis en place et financé par l'UE et en vertu duquel certains pays voisins, à l'image de la Libye, se sont transformés en centres d'internement de nos concitoyens interceptés en mer. Mme Ferrero-Waldner a en revanche affirmé que « Bruxelles et Alger sont en train de discuter du délicat problème de l'émigration clandestine et de la délivrance des visas ». Mais le pragmatisme semble avoir traversé l'Atlantique pour atteindre Bruxelles puisque l'UE veut bien « faciliter » l'octroi des visas, mais à la condition que les ressortissants des pays tiers en situation irrégulière soient reconduits à leur pays d'origine. Tube digestif… énergétique C'est dire si l'accord sur la facilitation de l'octroi des visas peut attendre. La commissaire de l'UE regrettera que l'Algérie n'ait pas adhéré à la politique européenne de voisinage (PEV) qui aurait pu, d'après elle, multiplier ses domaines d'intervention et d'assistance comme « la démocratie et les droits de l'homme ». En attendant, Mme Ferrero se félicite de ce que l'Algérie applique « scrupuleusement » les clauses de l'accord d'association qui, dira-t-elle, « ne sera pas révisé », contrairement à son collègue du budget qui avait laissé entendre que l'accord serait lifté prochainement. Et aux autorités algériennes qui espéraient un soutien de poids de l'UE pour accéder enfin à l'impénétrable OMC, voilà ce qu'elle reçoit pour toute réponse de la commissaire européenne : « L'UE appuie l'entrée de l'Algérie à l'Organisation mondiale du commerce (OMC), mais les négociations commerciales de ce genre sont toujours difficiles. » Autant dire que cela ne sera pas facile… Un « cadeau » de visite tout de même : un forum d'affaires entre les entrepreneurs européens et algériens « avant la fin de l'année », promet la commissaire. Enfin, à propos de l'objet géopolitique non encore identifié qu'est l'union méditerranéenne chère au président français Nicolas Sarkozy, Mme Ferrero-Waldner dit qu'elle partageait avec le président Bouteflika « les mêmes vues ». « Ce projet pourrait être une valeur ajoutée si toutes les institutions européennes et les Etats membres de l'UE sont là, sinon ça ne peut pas marcher. » Autrement dit, ils se sont mis d'accord… de voir son contenu d'abord pour le juger noir sur blanc.