Le Japon a l'intention de demander officiellement à l'Algérie de l'aider à « trouver une issue heureuse au dossier, toujours pendant, des dix-sept Japonais (ils seraient entre 300 et 400 selon les ONG de défense des droits de l'homme), enlevés par les services secrets nord-coréens durant les années 70-80 ». Lors d'un déjeuner de presse restreint, organisé hier à Yokohama près de Tokyo, en marge des travaux de la quatrième TICAD, avec les médias internationaux, et auquel a été convié El Watan, le secrétaire-adjoint chargé des relations avec la presse dans le cabinet du Premier ministre japonais, Osamu Sakashita, a expliqué que le choix de son pays de requérir le soutien de l'Algérie dans la recherche d'une solution à cette « question ressentie comme une véritable tragédie au Japon » s'explique par les bons rapports qu'a toujours entretenus Alger avec Pyongyang. Pour preuve, M. Sakashita rappellera que lors de ses tournées effectuées en Afrique en juillet 2007 et en mars 2008, Kim Yong-Nam, le numéro 2 du régime nord-coréen n'a pas manqué de marquer une halte à Alger. Ces éléments amènent le gouvernement japonais à croire que l'Algérie, -un pays auquel beaucoup reconnaissent la capacité à dénouer les crises- peut parvenir à convaincre Kim Jong-il de relâcher les détenus japonais. M. Osamu Sakahita a fait savoir que le Japon s'adressera directement au président Bouteflika pour solliciter « l'intervention » de l'Algérie dans ce dossier. M. Sakashita s'est cependant abstenu de dire quand le Japon prendra attache avec le chef de l'Etat algérien. Il est par ailleurs difficile de deviner la réponse que réservera le président Bouteflika à la demande japonaise, dans la mesure où l'Algérie n'a pas pour habitude de traiter de dossiers liés à l'Asie. Il est à souligner, à ce propos, que cette affaire d'enlèvement de Japonais par la Corée du Nord reste à ce jour très méconnue de l'opinion publique algérienne. L'Algérie, a fait savoir la même source, ne sera pas le seul pays que les autorités nippones solliciteront dans le cadre de ce dossier. Il sera également fait appel, a précisé M. Sakashita, au soutien de l'Egypte, de l'Ethiopie, de l'Angola et de la Namibie, des nations présentées aussi comme « entretenant de bonnes relations bilatérales avec la Corée du Nord ». Par conséquent, le Japon attend de l'Algérie et de ces pays qu'ils fassent « passer » un certain nombre de ses messages au régime de Pyongyang. Le plus important serait de lui « faire comprendre qu'il a tout à gagner en libérant les ressortissant japonais ». « S'il libère nos ressortissants enlevés durant les années soixante-dix, le Japon est prêt à normaliser ses relations diplomatiques avec la Corée du Nord et à s'investir dans son développement économique. » Au passage, M. Sakashita ne manque pas de souligner que « Pyongyang a déjà reconnu avoir procédé à des enlèvements de Japonais. » Le représentant du gouvernement japonais a aussi beaucoup insisté sur l'idée que les relations nippo-nord-coréennes ne seront véritablement normalisées que lorsque les dossiers du nucléaire et des missiles de longue portée développés par l'armée coréenne auront trouvé des solutions durables. Pour le gouvernement japonais, la prise en charge de cette question des armes de destruction massive, tout autant d'ailleurs que le règlement du litige frontalier l'opposant à la Russie, paraît vitale pour asseoir la sécurité en Asie. Sans cela, mentionne-t-on, la région vivra sous la menace constante d'une déstabilisation, comme c'est le cas actuellement. Le tir de missile et l'essai nucléaire auxquels a procédé en juillet et octobre 2006 la Corée du Nord laissent penser, soutiennent des experts japonais, que Pyongyang ne s'est pas encore prête à s'installer dans une dynamique de paix. Et dans l'hypothèse, justement, où la Corée du Nord refuserait d'ouvrir le dialogue et de trouver un terrain d'entente sur les questions des Japonais enlevés, du nucléaire et des missiles, Osamu Sakahita a affirmé que « Tokyo ne cédera pas et poursuivra les sanctions économiques décidées envers ce pays ». A l'occasion, M. Sakahita a révélé que des Libanais, des Thaïlandais, des Sud-Coréens et des Roumains avaient été aussi kidnappés par les services de renseignements nord-coréens. A travers ces « opérations spéciales », Pyongyang avait, dit-on, « pour objectif d'infiltrer les pays pour y effectuer la révolution communiste ». Malgré les tensions observées en Asie, le Japon espère quand même que la Corée du Nord reviendra à de meilleurs sentiments et consentira à laisser partir ses ressortissants car « il s'agit d'une question humanitaire urgente qui tue les familles des victimes à petit feu ».