Nous avons évoqué avec Ahmed Rachedi le cinéma algérien dans sa plus large expression, mais aussi le Festival du film amazigh à propos duquel il dira que « cette manifestation est la preuve qu'on peut faire du cinéma en Algérie. Nous avons des réalisateurs, des metteurs en scène, des acteurs, des auteurs et tous les intervenants dans les métiers du cinéma, et le public ». Mieux encore, ce festival a été aussi, à ses yeux, un « cinglant démenti à ceux qui veulent confiner tamazight aux seules régions de la Kabylie ». « Nous avons eu le plaisir de découvrir des films représentant d'autres régions du pays, témoignant qu'il y a des hommes et des femmes qui font revivre cette langue et ses traditions ancestrales », se réjouit-il. Et de prôner : « C'est une initiative qui doit être multipliée d'autant plus qu'aujourd'hui la langue amazigh est devenue langue nationale et officielle. » C'est pourquoi, poursuit-il, « tous les films algériens doivent être adaptés en tamazight et même traduits dans d'autres langues ». Concernant la situation du cinéma, ses critiques sont sans ménagement. « On ne produit plus rien. De là à parler de superproductions... C'est une gageure ». Le reste ? C'est « des initiatives personnelles, difficiles et risquées ». La solution ? « Il est nécessaire aujourd'hui de mettre en place les mécanismes nécessaires pour savoir comment financer le cinéma ». Comment ? Le réalisateur de « Ben Boulaïd » appelle à en finir avec « le cinéma dit culturel pour passer à une industrie du cinéma ». Pour y arriver, il suggère, entre autres, de mettre en place des structures nécessaires pour faire un film, et ce, à travers toutes ses étapes. « Nous manquons de ces structures mais aussi de moyens technologiques. » Le vieux routier du grand écran national déplore le caractère « artisan » du cinéma actuel. Et pourtant, « ce ne sont ni les énergies ni les compétences, encore moins le talent qui manquent », fait-il savoir. « Nous avons un cinéma d'artisans » Ahmed Rachedi regrette également la situation de distribution et diffusion notamment des gros films, « produits au prix de gros sacrifices mais qui ne parviennent pas au public ». « Ces films sont confinés dans des tiroirs », s'offusque-t-il en s'étonnant que ces films ne soient pas diffusés sur les chaînes de télévision qui foisonnent dans le pays. Pour ce faire, il interpelle les pouvoirs publics « pour imposer à ces chaînes l'introduction des films algériens dans leur grille de programmes, comme cela se fait en Europe par exemple où les films locaux figurent à un taux de 40% à 50% dans la programmation des chaînes de télé ». « Sans des dispositions réglementaires strictes, notre cinéma n'intéressera pas les éventuels promoteurs privés », met-il en garde. Rachedi appelle à mettre en œuvre une politique de sorte à faire revenir le public dans les salles obscures. « Des jeunes de 25 à 30 ans n'ont jamais mis les pieds dans une salle de cinéma », regrette-t-il. « Pour séduire le public, il faut des films de qualité projetés dans des salles de cinéma dignes de ce nom. » Le concernant, Rachedi confie qu'il est aux dernières retouches de son nouveau film « Les Sept remparts de la citadelle » tiré du roman éponyme de Mohamed Maârfia.