Le mois de tous les dépassements Interrogation n Une question mérite d'être posée au cours de ce mois sacré : avons-nous spirituellement évolué au cours des dix derniers ramadans ? En d'autres termes, nous sommes-nous améliorés dans notre rite ? Dans notre propre vie ? Bref, gérons-nous aujourd'hui notre jeûne comme il y a dix ans, par exemple, et avons-nous compris son véritable message ? La réalité, malheureusement, est tout autre sur le terrain. Le comportement négatif des uns et des autres les années précédentes – voire les années à venir –, abonde dans ce sens. Exemple : nos administrations. Elles travaillent au ralenti. Personne n'est jamais à l'heure y compris dans les institutions les plus en vue. Et pour cause, tout le monde veille le soir parfois jusqu'au petit matin. Alors forcément on lâche du lest dans les services, on fait semblant de ne rien voir, comme si de rien n'était, de nombreux travailleurs sortent avant l'heure et apparemment, ils sont tous excusés. Aucun dossier n'est jamais réglé, ficelé. Il l'est toujours à moitié. Soit parce que le directeur est en congé car il supporte difficilement le ramadan, soit parce que le chef de département tourne dans les services, soit enfin parce que la secrétaire chargée de la saisie n'est pas encore venue. Certains responsables font deux apparitions la journée au bureau une le matin pour que leurs supérieurs notent leur présence et une en fin d'après-midi à un quart d'heure avant la fermeture du service pour les mêmes raisons. Que font-ils le reste de la journée ? Ils dorment pour récupérer leur soirée de veille ou font les marchés pour oublier les affres de la faim et de la soif, un peu comme un passe-temps. Pour cause de ramadan, certaines communes, il y a dix ans, ont fonctionné en deçà de leur possibilité alors même que tous les employés étaient à leurs postes. Pire, tous leurs projets ont été volontairement bloqués ou retardés pour des raisons invraisemblables liées à la particularité de ce mois qui a fini par avoir bon dos… Rares sont les décisions qui sont prises pendant le ramadan y compris en «haut lieu». Rien n'est jamais réglé pendant ce mois, tout est reporté à après l'aïd. Dans les officines, les entreprises et les ateliers, le même demi-sommeil engourdit cadres et employés. Et comme tous sont atteints de la même paresse personne n'ose hausser le ton. Bref, l'absentéisme, pendant ce mois, fait des ravages dans tous les milieux socioprofessionnels, qu'ils soient de service ou de production… Or le carême est tout le contraire, il est l'émulation du travail, l'effort soutenu au travail alors que le ventre est vide. C'est cela le jeûne, le vrai qui a un sens.