Résumé de la 44e partie n Après avoir écouté Shaista, Miss Bulstrode lui rappela qu'elle était dans ce collège pour recevoir une éducation britannique… Renvoyant Shaista d'un geste, miss Bulstrode sourit à miss Johnson : — Ce n'est que trop vrai. Cette petite est parfaitement mûre. A la regarder, on lui donnerait vingt ans. Et c'est ainsi qu'elle se voit. On ne peut pas s'attendre à ce qu'elle se sente du même âge que Julia Upjohn, par exemple. Intellectuellement, Julia est très en avance sur Shaista. Physiquement, elle pourrait encore se contenter d'un maillot. — Je voudrais qu'elles soient toutes comme Julia Upjohn, déplora miss Johnson. — Moi pas, répliqua miss Bulstrode avec vivacité. Un collège plein de filles toutes semblables serait très ennuyeux. Ennuyeux, songeait-elle en reprenant la correction des dissertations d'éducation religieuse. Depuis quelque temps, ce mot tournait dans son cerveau. Ennuyeux... S'il était un qualificatif que l'on ne pouvait pas appliquer au collège, c'était bien celui-là. Au cours de sa carrière de directrice, elle n'avait jamais connu l'ennui. Il lui avait fallu affronter les difficultés, les crises imprévues, l'irritation provoquée par les parents ou les enfants, les tourments personnels. Elle avait fait face aux désastres qui menaçaient, et elle avait su en tirer des triomphes. Pour elle, tout cela avait été stimulant, excitant, intéressant au plus haut point. Et même maintenant, alors qu'elle s'y était décidée, elle ne voulait pas s'en aller. Elle bénéficiait d'une excellente santé, presque aussi robuste que lorsque Chaddy — cette fidèle Chaddy ! — et elle s'étaient lancées dans leur grande entreprise, fortes seulement d'une poignée d'élèves et du soutien d'un banquier doué d'une rare prescience. Les diplômes de Chaddy avaient alors plus de valeur que les siens, mais c'était elle qui, en visionnaire, avait imaginé, puis concrétisé, un établissement scolaire dont la réputation s'étendait à l'Europe entière. Elle n'avait jamais redouté de se livrer à de nouvelles expériences, alors que Chaddy s'était toujours contentée d'enseigner avec talent, mais sans flamme, ce qu'elle savait. Ce que Chaddy avait fait de mieux, c'était d'être toujours là, à portée de main, prête à amortir tous les chocs, prompte à prêter main-forte quand on avait besoin de son secours. Comme avec lady Veronica, le jour de la rentrée. Le merveilleux édifice que constituait le collège, songeait miss Bulstrode, avait été fondé sur sa solidité. Tout bien pesé, du point de vue matériel, elles en avaient tiré le meilleur. Si elles prenaient maintenant leur retraite, elles bénéficieraient de l'assurance d'un revenu confortable pour le restant de leurs jours. Miss Bulstrode se demandait si Chaddy partirait en même temps qu'elle-même. Probablement pas. Parce que pour elle, sans doute, le collège était sa vraie maison. Elle continuerait, fidèle et solide, à seconder celle qui lui succéderait. (à suivre...)