Epopée Omar Fatmouche a puisé dans l?imaginaire populaire pour reproduire sur les planches le personnage historique de Fadhma N?summer. Le théâtre algérien s?est enrichi d?une nouvelle pièce de théâtre. Réalisée par le dramaturge Omar Fatmouche, la pièce, qui a été présentée au Théâtre régional de Béjaïa, est ancrée dans un contexte historique. Elle raconte l?épopée de Lala Fadhma N'summer, rebelle et révolutionnaire qui, érigeant une armée, a mené une lutte longue et acharnée contre l?armée de l?occupation française pendant la seconde moitié du XIXe siècle. Par ce combat aussi bien libérateur que revendicateur, Lalla Fadhma N'summer, qui a marqué autant son époque que la mémoire collective, est un personnage exceptionnel qui, de par son itinéraire épique, invoque à la fois le prodigieux et le réalisme, donnant à la pièce de la teneur et de la théâtralité, suscitant ainsi beaucoup d?émotion et générant une multitude de sensations et d?impressions. La pièce relève incontestablement de la fresque fantastique mêlant mythes et faits historiques, le tout travaillé et rehaussé par une grande théâtralité : c?est une fiction évoluant dans un réalisme saisissant. Omar Fatmouche, directeur du petit théâtre de Bordj Ménaïel, offre «une chronique aussi bavarde qu'émouvante sur l'itinéraire mythique d'une femme qui, toute sa vie, s'est évertuée à renier et à lutter contre les injustices liées autant à sa condition citoyenne qu'humaine». Rien ne prédestinait Fadhma N'summer (un rôle tenu par Naïma Kahina) à un rôle majeur aussi bien social qu?historique. Ayant grandi dans une ambiance familiale qui n'avait rien d'atypique, Fadhma N'summer allait rapidement affirmer sa singularité en se rebellant d'abord contre certaines pesanteurs villageoises, ensuite en se lançant dans un combat épique contre le colonialisme conquérant. En fait, toute sa mutation comportementale rythmée par un désir ardent d'émancipation s'est déroulée, certes furieusement, mais dans une tranquille linéarité. Après avoir refusé le mariage, malgré les commérages et les quolibets des gens du village qui ne comprenaient pas son attitude, Fadhma N'summer focalise sur l'occupation rampante et ses effets dévastateurs sur le pays. Ni le diktat de son frère Tayeb (rôle incarné par Mouhoub Latrèche) ni les pressions du voisinage n'ont réussi à l'infléchir. Et lorsqu'elle décide, en désespoir de cause, de s'y résoudre, ce n'est que pour assouvir son désir de faire de la résistance. Les tumultes du mois nuptial allaient, en effet, la pousser à prendre la poudre d'escampette et se réfugier dans les montagnes. De retour, elle sème les graines de la révolte en portant son message libérateur d'abord dans le Djurdjura, ensuite dans tout le pays. Soutenue par Chérif Boubaghla venu expressément de Sour El-Ghozlane lui prêter main-forte, avec ses troupes, elle allait embraser toute la région, infligeant des défaites cuisantes aux troupes du maréchal Randon qui, lors de sa capture en août 1857, a dû lui rendre les honneurs en signe de reconnaissance pour sa bravoure. Omar Fatmouche a manifestement réussi un filage de premier ordre en dépoussiérant l'image du mythe entretenu dans l'imaginaire populaire, mais aussi en lui rendant sa dimension de femme populaire, sortie de l'anonymat du fait de l'injustice faite à son pays et à son peuple.