Révélation Son handicap l?a poussée à écrire pour plaider la cause de ses semblables. Ses vers sont un mélange de douleur, de tendresse, de révolte et de force. «J?avais 24 ans lorsque j?ai écrit mon premier poème. C?était un besoin pressant de s?exprimer. J?avais franchi plusieurs étapes avec succès. Ainsi, je suis champion national de basket-ball, j?ai reçu une médaille d?or aux derniers Jeux panarabes. J?ai investi dans l?élevage du bétail, un domaine difficile et j?ai réussi. À l?école, j?ai toujours été un élève doué. Écrire est un autre défi que je me suis lancé», confie Nouri avec enthousiasme. Sa frimousse brune pétille d?énergie, de volonté et de rage. C?est l?auteur de la magnifique pièce théâtrale qui a été jouée à l?occasion de la Journée nationale des handicapés, le 14 mars dernier, à la médiathèque de 1er-Mai, Alger. Et qui a déchaîné et ému le public. En 13 jours, la troupe a été formée et les rôles ont été distribués. «Des encadreurs de théâtre ont été étonnés de cette réalisation en un temps record par des amateurs, par des handicapés qui n?ont aucune formation dans le domaine ! Vous savez, j?ai présenté le texte à mes amis, ils ont tout de suite compris et ont plongé dans l?histoire. Ils l?ont adoptée, en quelque sorte, c?est une partie de leur vie qu?ils ont revécue et racontée. C?est pour cela que vous ne pouvez comprendre notre force», marmonne encore Nouri, cet enfant de Bachedjarah. «Le handicap est un autre monde que ne peuvent franchir et comprendre les êtres ordinaires. Vous ne pouvez ressentir ce que j?éprouve, ce que je vois. Votre combat et le mien ne sont pas les mêmes. Vous, vous existez déjà, d?abord par votre physionomie. Tandis que moi, je n?existe pas, je lutte pour prouver que j?existe. Mon combat est plus beau, car contrairement au vôtre, il est profond». Rien ne semble arrêter cet insurgé, son fauteuil est un «trône» sur lequel il s?assoit. D?ailleurs durant les festivités, Nouri danse même sur sa chaise. Son fauteuil tangue avec lui. Comme un véritable rappeur, il bouge dans tous les sens. Il ne connaît pas l?impossible. «Vous croyez que l?on ne peut rien faire ! Donnez-nous juste la chance de prouver que nous sommes des êtres comme vous, vous ne le regretterez pas ! Je suis heureux, car j?ai réalisé tous mes rêves, moi je ressens le véritable goût du bonheur.» Nouri explique qu?au quartier, personne ne l?aide, il monte seul les pentes, son handicap ne le dérange guère. «Je m?en sors seul. Je leur ai appris qu?un invalide n?a pas besoin de leur pitié et que c?est quelqu?un qui peut et veut vivre et réussir quand il le veut».