Débat n Flux migratoire, immigration clandestine, fuite des cerveaux tant de sujets sensibles abordés hier, lors du Forum d'El Moudjahid en présence de plusieurs spécialistes de la question. Intervenant lors de la rencontre le représentant du ministère du Travail, Bachir Benbouzid, a indiqué, s'appuyant sur des chiffres, que l'Algérie a connu en l'espace des six dernières années une hausse vertigineuse du nombre de travailleurs étrangers. Une hausse qu'il explique par le lancement des différents projets de relance économique. Ainsi, l'année 2007 a enregistré entre 30 000 et 32 000 travailleurs étrangers. Une montée exponentielle, puisqu'en 1999 ils n'étaient que 543 travailleurs étrangers à exercer chez nous, pour atteindre 1 007 en 2000. Ce chiffre va encore augmenter en 2003 pour frôler les 10 600. En 2005, plus de 18 000 travailleurs étrangers ont été recensés. Toujours selon M. Benbouzid, 45% des travailleurs étrangers sont des Chinois, suivis des Egyptiens avec 11%, des Américains, des Français et des Italiens avec 3%. Pour le niveau d'étude de ces travailleurs, il ressort que 23% sont des cadres supérieurs, 21,7% des techniciens, les agents de maîtrise sont de l'ordre de 27,5% et le personnel sans qualifications, précise M Benbouzid, ne dépasse point les 0,005%. Le responsable du ministère du Travail a rappelé que l'Algérie a, depuis 1966, mis en place un cadre juridique régissant la présence des travailleurs étrangers. De ce fait, il a indiqué qu'une panoplie d'ordonnances ont vu le jour, entre autres celles de 1966, 1975 et la loi de 1981 où figure l'exigence du niveau de qualifications. Il rappelle que l'Algérie a institué en 2003 un décret où figuraient 14 nouveaux visas notamment celui de travail, précisant que ces textes juridiques ont établi l'égalité des droits entre Algériens et étrangers. Lors de cette table ronde, les spécialistes ont relevé le rôle des pays développés dans l'accroissement de ces flux migratoires. Car selon M. Fares du Cnes, l'accroissement des inégalités entre les pays du Sud et ceux du Nord est de plus en plus visible. L'exemple, selon lui, est le produit intérieur brut par individu. «4/5 des richesses du monde sont détenues par 1/5 de la population mondiale». L'exemple est rapporté par M. Serraï qui ne cache pas que le danger dans les années à venir nous viendra de la fuite des cerveaux. «30 000 cadres algériens travaillent pour le bonheur des pays développés», a-t-il dit. Pour sa part, M. Laïchoubi, ancien ministre du Travail, a mis en exergue les apports de l'immigration pour l'humanité, «celle qui s'est façonnée à travers ces flux migratoires et a contribué, au fil des années, à la recomposition de la société». La race jaune à la conquête du monde l Pour le mouvement de la main-d'œuvre dans le monde, M. Fares du Cnes estime que l'Europe, qui connaîtra un besoin de 25 millions d'ici à 2025, est le premier continent avec 56 millions de migrants soit 7,7% de sa population, l'Asie en deuxième position avec 49 millions, l'Amérique avec 40 millions, l'Afrique 16 millions, l'Amérique latine 6 millions. Pour les pays pourvoyeurs d'immigration, la Chine est en pole position avec 36 millions puis viennent l'Inde et les Philippines. Economiquement, les participants à cette table ronde ont relevé chacun à sa façon l'apport de l'immigration pour les pays d'origine. Estimée à 250 milliards de dollars, «ce gain dépasse de loin, estime-t-on, les aides octroyées par les pays riches». Evoquant le volet international, M. Fares estime que les flux migratoires intracontinent sont «beaucoup plus importants que ceux vers le Nord». «Nous avons des chiffres qui démontrent que l'Afrique connaît plus d'immigration interne que celle vers l'Europe, cela contredit ce que véhiculent les médias européens.»