Débat n Les fournisseurs publics et privés des services Internet appellent les autorités à ouvrir un «débat sérieux» sur cette technologie et l'usage qu'en font les jeunes notamment. Une table-ronde autour de l'Internet, organisée hier au centre de presse du quotidien public El Moudjahid, est arrivée à ce consensus : les pouvoirs publics sont déconnectés par rapport à cette technologie de l'information et de la communication. Ceci au moment où la Toile est devenue un «moyen incontournable». Selon M. Harzallah, directeur-général de l'Eapad, «l'Internet en Algérie échappe à tout contrôle». En clair, les internautes (très souvent des jeunes) font ce qu'ils veulent sur le réseau. Ils piratent des programmes et s'attaquent à des sites d'institutions publiques. Tout cela pour s'amuser et surtout sans être inquiétés. «L'Internet est sous-exploité, estime-t-il. Il n'y a pas de stratégies de développement du contenu. 20% des internautes y cherchent de l'information et 80% font du n'importe quoi», comprendre : la tchatche et les jeux électroniques en ligne. M. Harzallah n'omet, cependant pas, le bon côté des choses : «On est sur la bonne voie. Nous assistons à une ouverture remarquable, extraordinaire.» Cette ouverture doit être «contrôlée», objecte le conférencier. La régulation se traduirait par la mise en place d'une institution publique, unique et autonome, estime-t-on. «Il faut créer un cadre organisationnel pour encadrer l'Internet», déclare à juste titre le DG de Saadnet (fournisseur privé), Mebarek Boukaba, qui propose de créer un Observatoire. M. Boukaba résume la situation des providers (producteurs de contenus) en Algérie : «En 2000, ils sont une centaine de providers inscrits. Aujourd'hui, l'on en compte quatre à cinq. On a fait faillite pour des raisons économiques.» Il ajoute : «Aujourd'hui, nous ne sommes que des consommateurs. Les pouvoirs publics doivent se poser des questions car il s'agit d'un problème de fond.» Les autorités doivent aussi se poser des questions à propos de «l'utilisation d'Internet par les jeunes», à en croire Younès Grar, P-DG de Gecos (fournisseur privé), représentant de l'association des providers. M. Grar rappelle qu'il existe 7 000 cybercafés en Algérie qui attirent des millions de jeunes quotidiennement. Ces derniers, indique-t-il, consultent n'importe quoi. Si Internet est un puissant moyen de recherche, il est aussi un outil pour «faire de la publicité au terrorisme», affirme Abdelkader Mestfaoui, représentant de la police. Contrairement à la gendarmerie, la police, selon son représentant, n'a pas enquêté sur des crimes commis en usant de l'Internet comme arme, sauf quand des requêtes sont venues de l'étranger. «Il n'y a pas eu de plaintes individuelles», affirme-t-il. Autrement dit, les personnes qui reçoivent des messages électroniques, sous forme de menaces, ne déposent pas plainte. Les gens ignorent que cela peut se faire. Même si cela arrive, le travail des services de sécurité n'aboutira à rien, laisse-t-on comprendre. Il y a un problème de traçabilité du message et «l'hébergement des sites échappe à tout contrôle». D'où la nécessité de se doter d'une structure puissante et de mettre au point une stratégie globale pour l'utilisation de ce média. Les intervenants sont unanimes : «Il faut faire un état des lieux.»