Analyse n L'adhésion de l'Algérie à l'OMC n'est «pas une question de trop tôt ou de trop tard», mais plutôt «une affaire de rentabilité du capital». «L'OMC est une machine au service des plus forts contre les plus faibles. Si on ne comprend pas cela, on aura rien compris à l'économie mondiale. Comment veut-on mettre en concurrence des économies qui sont à des degrés de développement tout à fait différents», explique Hamid Aït Amara, universitaire, spécialiste des questions économiques ce matin sur les ondes de la chaîne III. Or, l'idée de l'OMC, argumente-t-il, c'est la mise sur pied d'un marché libre, dans lequel la compétition entre l'offre et la demande va régler la satisfaction de tous. «Une espèce d'idéal qui n'existe pas.» «Il y a des pays qui sont gagnants et il y a des pays qui sont perdants. Et nous nous sommes dans la case des pays perdants parce que l'Algérie n'a pas aujourd'hui les capacités de mettre en place une économie compétitive dans les normes de rentabilité du capital», renchérit-il avant de proposer une solution de rechange : «Il faut négocier d'autres règles du commerce mondial et il n'y a aucune raison qu'on se mette dans un système où les règles nous sont défavorables.» Décortiquant la crise alimentaire qui sévit actuellement aux quatre coins du monde, notre expert admet que celle-ci s'est manifestée par «une flambée des prix d'une part, et, d'autre part, par une restriction et une diminution de l'offre et des stocks avec comme corollaire des émeutes de la faim dans certains pays». L'Algérie, comme le reste des pays dits émergents, n'est guère, estime l'intervenant, à l'abri d'une crise alimentaire «au moment où la facture alimentaire s'élève aujourd'hui à plus de 7 milliards de dollars et plus de 70% de notre consommation provient de l'importation». Hamid Aït Amara se demande aujourd'hui «s'il y aura toujours des excédents sur le marché et est-ce que l'offre va assurer le minimum garanti». En somme, «avec cette flambée des prix et la réduction des stocks et ces premières secousses, tout le monde s'est aperçu qu'il y avait danger et péril en la demeure», explique-t-il tout en affirmant que notre politique alimentaire qui se base sur la dichotomie pétrole-nourriture n'a pas les bons fondements. «Nous vendons du pétrole et du gaz pour acheter quoi manger et notre dépendance des hydrocarbures est sans doute à l'origine de cette situation». Le gouvernement fait davantage attention, selon lui, à ce que le revenu soit moins cher. Ce dernier importe la nourriture bon marché au moment où les excédents ont été vendus 30 à 40% en dessous de leurs prix de production. «On donnait des salaires bas et pour que les gens achètent avec des salaires bas, il faut que le prix de la nourriture soit aussi bas. Et si on produit plus cher, il faut augmenter les salaires. La solution facile c'était donc d'importer une ration alimentaire bon marché», conclut M. Aït Amara qui pense réellement qu'on a été piégé par cette dynamique qui «consistait à faire nourrir la population bon marché et à maintenir les salaires bas».