La violence est en voie de conquérir le milieu de l'enfance dans l'indifférence des adultes dont le comportement, il faut le dire, alimente la violence. La société s'en accommode vraisemblablement, celle-ci ne réagissant pas à ce phénomène -qui prend de l'ampleur- et ne voyant pas venir le danger de sa propre désagrégation, le mal étant profond. C'est la banalisation dans toute son absurdité qui caractérise cette furie de tous les jours, alors que c'est un sursaut de la conscience qui doit prévaloir. Mais au lieu de cela, on s'enfonce de plus en plus dans la démence et de plus en plus jeune. Après avoir entretenu consciencieusement les châtiments corporels et inculqué le ferment de l'agressivité, l'enseignant récolte aujourd'hui les résultats de sa propension à «corriger» l'enfant au moyen de tout ce qu'il trouve à proximité, usant même de coups de poings et de pieds. Des cas de pédagogues et de directeurs d'établissement se servant de tuyaux d'arrosage sont d'ailleurs rapportés. Certains avouent qu'ils les exhibent, mais que c'est juste dans un but de dissuasion. L'animosité est nourrie dans les deux sens, le constat est que la violence s'amplifie, que ce soit vis-à-vis de l'élève ou de l'enseignant. C'est que les châtiments corporels ont longtemps été utilisés comme un moyen d'éduquer l'enfant au sein de l'établissement scolaire, et leur interdiction formelle par instruction ministérielle n'a pas été suivie d'effets, les responsables avouant souvent aux parents leur incapacité à contrôler les dépassements des enseignants, certains les couvrant même. L'étendue de ce phénomène est telle que des psychopédagogues ont appelé à la création, à travers le territoire, de cliniques psychologiques qui réuniraient des psychologues, des éducateurs et des assistants sociaux, ceux-ci devant conjuguer leurs efforts et tout mettre en œuvre pour cerner cette problématique et éradiquer le phénomène de la violence en milieu scolaire. Des rencontres ont souvent lieu, elles sont l'œuvre de spécialistes (psychologues) et des services de sécurité qui font part de statistiques quant aux agressions à l'intérieur et aux abords des établissements scolaires. Selon les premiers (spécialistes), il s'agit de «comprendre la psychologie de l'élève» pour que les actions sur le terrain soient efficaces alors que cette tranche d'âge (enfance et adolescence) a besoin de toute l'attention nécessaire, que ce soit au sein de la cellule familiale ou dans les écoles. Des campagnes de sensibilisation sont quelquefois lancées, mais elles restent circonscrites dans certaines wilayas et sont limitées dans le temps alors que ce type d'initiative doit être élargies à toutes les wilayas et à tous les établissements scolaires et être permanentes si on veut venir à bout de ce qui est devenu un fléau. Il est clair que la lutte contre la violence en milieu scolaire reste encore à mener, comme toutes les formes de violence qui minent la société et contre lesquelles toutes les parties concernées se montrent impuissantes. Pour des psychologues, en effet, la violence en milieu scolaire est le prolongement de la violence subie à l'extérieur. On ne peut rester au stade du constat et prétendre qu'on combat le phénomène. «Apprendre sans peur», le slogan brandi par l'Unesco devrait être adopté dans toutes les écoles, par tous les responsables d'établissements scolaires, et par tous les enseignants qui ont fait de l'agressivité et de la violence verbale un moyen d'imposer leur autorité face à l'élève. C'est malheureusement «la peur au ventre» qui est la devise des petits dont beaucoup affichent un manque d'intérêt et même une révulsion vis-à-vis de certaines matières en raison de la brutalité affichée par celles et ceux qui les enseignent . Une réaction (de la part des élèves) qui peut aller jusqu'à la désertion de l'école. Il est évident que c'est de la protection de l'enfance qu'il s'agit et continuer à fermer les yeux sur une telle calamité relève de l'irresponsabilité vis-à-vis de cette frange qui s'enfonce dans la violence à force de la subir. R. M.