Moult mesures ont été mises en place à l'effet d'assainir le marché de l'automobile. L'Etat veut arrêter la saignée financière provoquée par les importations massives de véhicules mais aussi encourager l'investissement productif dans ce secteur stratégique. Outre l'imposition des licences d'importation, les autorités publiques ont ainsi décidé de mettre en place des cahiers de charges régissant les différentes filières automobiles Le gouvernement est aujourd'hui décidé à assainir le marché de l'automobile et rationaliser les importations afin de mettre fin à l'anarchie qui caractérise ce secteur. C'est ainsi que moult mesures ont été mises en place. Des mesures dont l'objectif est de freiner les importations de véhicules et partant encourager l'investissement productif dans le secteur automobile qu'il soit étranger ou national. Entre 2010 et 2014, rappelons-le, les concessionnaires ont importé 1 934 416 véhicules, avec un «pic» de plus 554 000 véhicules en 2013 pour un montant de 7,33 milliards de dollars, selon les chiffres des douanes algériennes. Pour la seule année 2014, l'Algérie avait importé 439 637 unités pour un montant de 6,34 milliards de dollars, soit plus de 9% des importations globales du pays. C'est dire que la facture est trop lourde à supporter avec la chute des prix du pétrole amorcée depuis la mi-juin 2014. Ainsi, pour arrêter cette saignée financière, le gouvernement a soumis en 2016 les importations des véhicules à une licence d'importation. Fixé initialement à 152 000 unités pour l'année 2016, le contingent quantitatif d'importation des véhicules a été finalement réduit à 83 000 unités. Ce contingent a concerné les véhicules automobiles pour le transport de dix personnes ou plus (chauffeur inclus), les véhicules de tourisme et autres véhicules automobiles principalement conçus pour le transport des personnes (y compris les voitures de type «break» et les voitures de course) et les véhicules automobiles pour le transport de marchandises. Outre les véhicules de tourisme et autres automobiles destinés à la revente en l'état, le régime des licences d'importation a été introduit, pour l'année en cours, aux véhicules spéciaux et engins (ambulances, camions…). Pour les autorités publiques, cette disposition permettra d'assainir la filière de l'importation des véhicules. Mais, le gouvernement Sellal ne veut pas s'arrêter là. Mettre de l'ordre dans la filière de la rechange automobile est aussi un axe, qui n'est pas des moindres, dans la nouvelle orientation économique du gouvernement. C'est ainsi qu'il est prévu la mise en place d'un cahier des charges régissant les importations des pièces de rechange automobiles. Selon le ministre de l'Industrie et des Mines Abdessalam Bouchouareb, l'importateur, dans le cadre de ce cahier des charges, sera obligé d'avoir des contrats d'achat direct auprès du fabricant sans passer par un intermédiaire. Le fabricant de ces pièces doit aussi avoir un agrément auprès du constructeur automobile pour qui il fabrique ces pièces, explique le ministre selon qui, la relation doit être entre le fabricant d'origine ou avec le fabricant ayant un agrément auprès du premier constructeur. Cela, d'après lui, va permettre d'avoir de la transparence dans ce que l'Algérie importe mais aussi de garantir la sécurité du citoyen et du consommateur. Ce cahier de charges devrait combler «un vide existant» dans l'importation des pièces de rechange dont la facture annuelle est estimée à environ 800 millions de dollars. L'investissement dans le montage automobile exigé L'Etat qui œuvre à rationaliser les importations notamment de véhicules, veut, en parallèle, renforcer la capacité de production nationale dans ce secteur. L'investissement dans le montage constitue ainsi une première étape nécessaire et inévitable. Et c'est, à ce titre qu'il a été mis en place un cahier des charges fixant les conditions et modalités pour l'activité de production et de montage. Dans son article n°10, ce cahier des charges, qui n'est toujours pas publié au journal officiel, fixe le taux d'intégration à «au moins 40% à la cinquième année du démarrage de l'activité». Ce taux doit atteindre un «minimum de 15%» à la troisième année. Le taux d'intégration sera calculé sur la base des coûts locaux, soit le «coût de revient des pièces fabriquées par l'usine pour elle-même», ainsi que les salaires et la formation. Les achats locaux, soit les pièces obtenues auprès de sous-traitants, la matière locale (hors coûts locaux), ainsi que la logistique et les prestations achetées, entrent également en ligne de compte, selon le document. Ces deux éléments sont à rapporter à la valeur du coût global incluant les «achats importés», afin de calculer le taux d'intégration. Par ailleurs, «l'approvisionnement en collections de pièces ne peut s'effectuer qu'auprès du constructeur ou de ses fournisseurs homologués», détaille le cahier des charges. L'article 3 du document détermine les acteurs susceptibles d'être éligibles. Ainsi, «l'exercice de l'activité de production et de montage de véhicules est ouvert aux opérateurs disposant» d'un registre du commerce avec un «code d'activités de la nomenclature des activités économiques (…) correspondant à l'activité de production et de montage de véhicules», selon le document. «Les investisseurs peuvent se regrouper pour lancer des opérations de partenariat, de consortium ou autre pour la fabrication de composants (…) dans le cadre d'une intégration locale», détaille encore le cahier des charges. Les concessionnaires automobiles agréés devront réaliser l'investissement dans un délai de 3 années à compter de janvier 2014 . Pour les autres concessionnaires, l'investissement doit être réalisé dans un délai de trois ans à compter de la date d'octroi de l'agrément définitif. En termes de normes, les véhicules produits localement devront «être dotés de dispositifs répondant aux spécifications techniques en matière de sécurité prévues par le cahier des charges régissant l'activité de concessionnaire automobile», indique le cahier des charges. Pour les acteurs déjà en production, ils devront s'adapter aux spécifications d'ici le 31 décembre 2017. Les véhicules devront également «répondre aux normes de sécurité et de protection de l'environnement (…) en vigueur en Algérie, ou à défaut, aux normes reconnues à l'échelle mondiale». Cela dit, ces normes ne peuvent être «en deçà de celles applicables dans le pays d'origine du constructeur», précise le même document. L'investisseur devra assurer une garantie du véhicule, ainsi que la «disponibilité de la pièce de rechange et accessoires», indique le document. Même en cas d'arrêt d'activité, il faudra assurer la disponibilité «à travers son réseau de distribution» de la pièce de rechange «sur une durée minimale de 10 ans». Un cahier des charges pour booster l'activité «sous-traitance» Considérée comme la colonne vertébrale de tout développement socio-économique, l'activité de sous-traitance, faut-il le dire, n'a, dans le passé, vraiment pas suscité l'intérêt des pouvoirs publics algériens qui auparavant ont préféré opter pour l'importation des produits sous-traités, au lieu de développer un tissu national de sous-traitance propre à l'Algérie. Cette filière est restée ainsi marginalisée. Néanmoins, avec la concrétisation des projets de partenariats dans l'industrie mécanique avec de grandes firmes internationales à l'image de Daimler/Mercedes-Benz, Liebherr, Agco/Ferguson, Renault, Volkswagen et Peugeot, la sous-traitance devrait connaître un bel essor. Aujourd'hui, elle est, la priorité n°«1» du gouvernement en tant qu'un des «fondements de la réussite des projets de partenariat». Ainsi, pour encourager l'investissement notamment dans ce créneau, porteur de richesse et de valeur ajoutée, l'Etat, au titre de la loi de Finances 2017, a décidé d'exonérer des droits de douane et de la TVA, pour une période de cinq ans, les composants et matières premières importés ou acquis localement par les sous-traitants dans le cadre de leurs activités de production d'ensembles et de sous-ensembles destinés aux produits et équipements de la branche des industries mécaniques, électroniques et électriques. Mieux encore, le gouvernement compte réserver au niveau des parcs industriels, des espaces dédiés exclusivement à la sous-traitance. A toutes ces mesures s'ajoute la mise en place d'un cahier de charges régissant cette activité. Il s'agit là d'un appui réglementaire «concret» devant prendre en charge l'activité «sous-traitance». Ce document qui est, selon le ministre de l'Industrie et des Mines, finalisé et soumis au gouvernement, imposera aux différends partenaires de l'Algérie activant dans l'automobile de s'inscrire et de s'impliquer dans cette politique de sous-traitance. «Nous avons ouvert notre marché à nos partenaires. En contrepartie, nous demanderons des parts de marché pour les pièces (de rechange) que nous fabriquerons», a souligné récemment M. Bouchouareb. Signalons, à ce titre, que des projets sont en train de se créer dans différentes wilayas du pays dans la branche «sous-traitance». L'on cite, entre autres, le projet de réalisation d'une unité de production de pneumatiques pour véhicules légers et utilitaires. C'est le fabricant «Iris», l'un des leaders de l'électronique en Algérie, qui a lancé cet important projet à Sétif, et ce, afin de répondre à la forte demande de pneus dont une bonne partie est importée des pays asiatiques et ne répond pas aux normes de sécurité. L'unité en question a pour objectif de couvrir 60% du besoin du marché algérien en pneus. Le premier pneumatique devrait sortir des ateliers de production au quatrième trimestre 2017. Selon le ministre de l'Industrie et des Mines qui a effectué une visite d'inspection, début janvier dans la wilaya de Sétif, cette unité d'une capacité de production de deux millions unités par an pour un marché national de six millions d'unités «permettra de passer à la sous-traitance destinée à l'industrie automobile» et partant contribuer à la diversification de l'économie et la réduction de la dépendance vis-à-vis des hydrocarbures. A cela s'ajoute l'usine de fabrication de verre «Africaver» dans la wilaya de Jijel, et qui devra participer aux efforts de consolidation du domaine de la sous-traitance à travers la production de pare-brise, vitres latérales, rétroviseurs et prochainement des verres blindés pour les véhicules militaires. Implantée dans la zone industrielle d'Ouled Salah (wilaya de Jijel), et créée à la faveur de la filialisation de l'Enava en 1997, l'entreprise publique économique Spa Africaver compte parmi ses clients la SNVI, MDN, ect. La société «Martur Algéria Automotive Siting» active, quant à elle, dans la branche «sous-traitance». Spécialisée dans la fabrication des sièges de voitures, cette société, implantée dans la commune Es-senia (Oran), traite pour le compte de «Renault Algérie». Ces PME sont en train de se développer autour des grands projets lancés dans le secteur automobile. Il est clair donc que l'Etat est déterminé à baisser la facture d'importation et diversifier et encourager le produit national. B. A.