De notre correspondant à Constantine Nasser Hannachi Ville incontournable du malouf, Constantine s'ouvre également à d'autres vocations artistiques. Même si celles-ci demeurent quelque peu étouffées par cette musique andalouse venue d'outre-mer, il n'en demeure pas moins que le conservatoire communal œuvre en classique pour permettre à toute frange d'âge de s'exprimer en académique dans l'instrument de son choix. En effet, l'institut des arts Bentobal qui aura pris le relais du vieux conservatoire municipal dirigé par le défunt Daoudi est en train de réussir un chemin déjà frayé par les maîtres de l'écriture musicale et férus de la note juste «the true note». Le rite musical constantinois réside dans la passion, tandis que le classicisme qui se dégage du conservatoire émane du respect des notes. Ce contraste agrémente la tessiture musicale constantinoise. Dès lors, il est parfois difficile de situer le temps fort et le temps faible de la tendance du style à adopter par les futurs «poussins musiciens». Les associations du malouf aux côtés des chanteurs de ce genre qui sont en train de perpétuer «l'Andalousie arabe», courtisent quelques jeunots talentueux en vue de renforcer leur orchestre et, du coup, assurer une bonne relève. Mais est-ce que cette résonance touche la majorité des élèves musiciens intra ou extra conservatoire que l'on a questionnés ? «J'ai une carrière, mais la musique classique, notamment celle liée à la guitare, reste une passion pour moi. N'empêche que je voudrais puiser au fond pour faire de cette passion une carrière en parallèle», nous dira une jeune élève, les yeux fixés sur le pupitre et qui s'essayait à une étude pour guitare. «La majorité des disciples au conservatoire sont issus de parents mélomanes ou musiciens», devait expliquer Nacer Amireche, enseignant de solfège et initiateur à la guitare classique. Toutefois, faut-il admettre que cette donne ne changera en rien le parcours des futurs élèves musiciens du seul fait que la passion prime sur toute autre considération «professionnelle» à l'avenir ? Le conservatoire accueille chaque année bon nombre de passionnés. L'âge varie de 18 à 53 ans, en plus des bambins dont l'âge frôle les 7 ans. Tout ce beau monde artistique devra se frotter en premier lieu aux rudiments de la musique avant de prendre connaissance de l'instrument élu. «Au moins 4 mois sont requis pour l'apprentissage du solfège, ce sont de grands principes de base, pour ensuite appliquer ces notions sur instrument. La théorie repose sur la rythmique», confie notre interlocuteur et d'ajouter sur l'étendue des cours consacrés notamment à la guitare classique : «Les élèves inscrits seront soumis à trois niveaux (répertoire facile d'initiation, études classiques et consolidation des études). Le programme tracé sera fignolé dans plus d'une année.» Il ressort que le but recherché à travers ce cursus est la préparation du guitariste pour pouvoir affronter d'autres problèmes liés à la complexité de l'instrument. C'est le cas du doigté et du déchiffrage des partitions dont certaines exigent une intelligence particulière d'interprétation, notamment la phrase musicale ou «le phrasé». Faut-il souligner que la majorité des élèves qui ont opté pour l'instrument «cher» à Andres Segovia, célébrissime guitariste classique espagnol, proviennent des campus universitaire ? «L'ancienne élève du conservatoire option guitare a rejoint l'établissement en 1997 et continue de se passionner pour cet instrument», avance Amireche qui soutiendra que le rôle de l'encadreur est aussi la prospection d'éventuels jeunes talents. «En tant qu'encadreurs, nous gardons un œil particulier sur d'éventuelles émergences. Nous leur consacrons beaucoup d'attention. Des conseils leur seront prodigués. Par ailleurs, nous demandons aux parents de veiller à ce que les élèves s'appliquent aux exercices une fois rentrés à la maison», dira-t-il. En ce qui concerne le devenir des futurs musiciens affiliés au conservatoire, leur destin serait entre leurs mains. Autrement dit, ils pourront participer à des concours pour espérer gravir d'autres échelons, que ce soit à l'échelle nationale ou internationale dès lors que la formation «ciblée» une fois acquise leur ouvrira d'autres horizons. Les cours suivis à Constantine s'apparentent du moins à ceux suivis dans d'autres écoles d'outre-mer, sauf que là-bas la spécialisation regroupera les «ingénieux» en les incitant à explorer davantage l'inépuisable étendue musicale. Les moyens, malheureusement, sont le maillon faible de la gamme de nos talents. Ce qui les pousse, d'ailleurs, à recourir à de petites associations pour faire tourner en boucle leur répertoire. Soit une idée dominante pour échanger le langage musical en attendant le lancement d'autres classes spécialisées qui traiteront, entre autres, de l'harmonie. Les talents se comptent sur le bout des doigts, nous dit-on ; seul l'artiste est en mesure de les déceler. Villa-Lobos, célèbre compositeur brésilien disparu en 1959, aurait souhaité écrire toute l'histoire «des peuples» en musique. A Constantine, il serait souhaitable pour l'heure d'écrire sur la bonne portée musicale l'histoire des prétendus artistes…