Photo : Riad Par Smaïl Boughazi L'Algérie a échappé aux effets directs de la crise économique mondiale, s'accordent à dire tous les économistes, mais subit le revers commercial de cette crise à travers la chute du prix des hydrocarbures. S'exprimant, hier, lors d'une journée parlementaire organisée à l'APN par la commission des affaires économiques du développement de l'industrie, du commerce et de l'industrie et de la planification, plusieurs experts ont confirmé cette thèse mais ils ont également dépeint un tableau exhaustif de la situation de l'économie algérienne. Pour l'agriculture et l'agroalimentaire, le professeur Fouad Chahat, Professeur à l'université d'Alger, a affirmé que la valeur des importations de certains produits alimentaires a connu une augmentation fulgurante ces dernières années. Selon les chiffres fournis, les céréales ont connu entre 2002 et 2008, une multiplication par 3,13, passant de 1 282,6 à 4 016 millions dollars, la valeur du lait et dérivés est passée de 492,4 à 1 275,7 millions dollars soit une multiplication par 2,6. Idem pour les plantes et tubercules qui sont passés de 111,5 à 336,7 millions dollars soit une multiplication par 1,8. D'autres produits sont également sur la liste, nous informe le spécialiste en économie pour qui la crise financière que traverse l'économie mondiale a, potentiellement, trois points d'entrée principaux au sein du secteur agricole et agroalimentaire national. Il énumère, entre autres, une régression de l'offre domestique à travers les prix des intrants, des inputs importés et les prix à l'exportation, une aggravation de la dépendance vis-à-vis des fournisseurs étrangers et une réduction de l'offre de crédit pour le financement des investissements encore nécessaires à la modernisation du secteur. L'expert a évoqué par ailleurs comme potentiel impact, affaiblissement de la balance des paiements et un creusement du déficit de la balance commerciale agricole. Grosso modo, ce spécialiste pense que «la hausse des cours sur les marchés mondiaux va peser de plus en plus lourdement sur la balance commerciale et sur la balance des paiements du pays». «L'augmentation des dépenses à l'importation réduira d'autant les capacités d'investissement du pays, celui-ci détournant une part non négligeable de ses ressources vers le financement de la consommation. Elle contraindra, en effet, les pouvoirs publics à multiplier les mesures d'urgence pour garantir la poursuite de l'approvisionnement du marché intérieur et la satisfaction des besoins des consommateurs (engagements pris par des Offices publics tels l'OAIC et l'ONIL, hausse des subventions permettant la stabilisation des prix du lait et du pain…)», souligne-t-il. M. Chahat conclura que «la rentabilité du secteur de l'agriculture peut être augmentée par l'augmentation du prix des extrants, la diminution du prix des intrants et l'amélioration de la productivité». S'agissant, par ailleurs, des répercussions de la crise sur l'emploi en Algérie, M. Rachid Boudjemaa de l'Université d'Alger prévoit un taux de 13,3% pour 2009. «De 25,9% en 2000, le taux de chômage tombe à 11,3% en 2008. Celui prévu pour 2009 est de 13,3%. Et cette tendance à la hausse se poursuivra si le prix du pétrole continue de diminuer et si le secteur privé, voire l'investissement industriel, ne vienne pas se substituer efficacement à l'Etat», soutient M. Rachid Boudjemaa dans sa communication. Le spécialiste, dans son analyse, pense que d'autres statistiques disponibles pour la période 2000-2009 «montrent qu'il existe une relation inverse entre le prix du pétrole et le taux de chômage». Le conférencier explique que «plus le premier est important, plus le second diminue». «Cela signifie que lorsque ses recettes sont grosses, l'Etat joue activement le rôle de pourvoyeur d'emplois et ce rôle est plus social qu'économique, autrement dit, non arrimé à une stratégie de croissance économique. Aussi, est-il nécessaire de distinguer à l'avenir parmi les emplois créés en Algérie, ceux qui le sont par rapport aux objectifs de la croissance et ceux qui s'inscrivent dans le cadre des dispositifs distributifs publics», note l'économiste.Enfin, M. Rachid Boudjemaa résume qu'«une baisse de 50% du prix des hydrocarbures réduirait de 50% les revenus d'exportation du pays, d'un tiers les recettes budgétaires de l'Etat et de 25% le PIB».