Photo : Riad Par Billal Larbi à moins de deux semaines du début du mois de Ramadhan, les prix des fruits, légumes et autres produits alimentaires flambent. Un simple tour du côté des marchés de la capitale renseigne sur cet état de fait. La valse des prix devient chose banale. Chaque année, en pareille circonstance, nous avons droit au même décor. Personne ne semble en mesure de mettre un terme à cette situation. A mesure que le Ramadhan approche, la flambée va aller crescendo. «Aïch yalguellil !» s'écriera une vieille dame, au couffin à moitié vide, rencontrée au marché Ali Mellah situé à la place du 1er Mai. Rien qu'en discutant avec elle, vous avez toutes les données relatives à la mercuriale. Inutile d'avancer plus loin tant les détails donnés sont exhaustifs. «La pomme de terre à 50 dinars et la tomate à 60 dinars ! C'est vraiment trop. Jusqu'où ira la patience du citoyen ? De nombreux pans de la société s'abstiendront de bien de produits», tranche-t-elle. Pour beaucoup de personnes interrogées, le prix du second légume cité (la tomate) est considéré comme inhabituel par rapport à l'été 2008. En effet, la tomate était alors cédée à 15 et 20 dinars (pour le premier choix). A quelques encablures de là, plus exactement au marché de Belcourt, le même constat est fait. Dans une anarchie indescriptible, exacerbée par un soleil de plomb et, de surcroît, dans un climat électrique (les prises de bec entre commerçants et consommateurs sont légion), les gens ne s'affairaient pas tellement à faire leurs emplettes. Contrairement aux saisons précédentes, ils ne «faisaient pas le plein» en matière d'achat. Leur frénésie a assurément baissé d'un cran. On se contentait du strict minimum. On est bien loin du temps où, lorsqu'on déambulait dans les marchés, l'expression «donnez-moi trois kilos» revenait comme un leitmotiv. Parfois, les gens se contentaient d'une livre d'un légume donné. Sachant pertinemment que la marchandise était disponible (mais à quel prix, s'il vous plaît !), les gens préféraient acheter sans se précipiter. Ce qui est sûr, c'est qu'en l'absence de l'affichage des prix par de nombreux commerçants (où sont donc passés les agents de contrôle de la DCP dont on nous a tant parlé), les gens ne se hasardaient pas à acheter sans prendre la précaution de demander les prix. Ces derniers, justement, ne différaient pas tellement de ceux en vigueur ailleurs. La pomme de terre variait entre 35 et 45 dinars, les carottes étaient cédées à 40 dinars, la courgette à hauteur de 40-50 dinars, le poivron à 70 dinars. Pour les fruits, et au regard de la cherté de l'écrasante majorité d'entre eux (pêche à 150 dinars, raisins à 90 dinars, banane à 100 dinars…), les gens jetaient leur dévolu sur les produits de saison, pastèque et melon en tête, à la faveur de la baisse des prix de ces derniers. L'unanimité est totale au sujet du fait qu'en dépit de l'existence d'un arsenal juridique étoffé, le contrôle des produits et la protection du consommateur font défaut en Algérie. «La protection du consommateur constitue le dernier des soucis de ceux censés y veiller», nous diront en chœur des pères de famille venus faire le marché. Pour certains mandataires, il ne fait pas de doute que ce sont les spéculateurs, contrôlant les leviers d'un créneau échappant totalement à la régulation, qui sont derrière l'actuelle flambée des prix. Ils refusent qu'on veuille à tout prix le faire porter sciemment la responsabilité de cette hausse spectaculaire des fruits et légumes. «Même si la production de la tomate est inférieure à celle de l'année dernière, rien ne peut justifier les niveaux actuels des prix. Personne ne peut expliquer comment la tomate, chez les producteurs, est cédée sur le champ à environ 20 dinars alors que, sur les étals, ce prix est triplé», fera remarquer un grossiste, ajoutant que c'est l'informel qui dicte sa loi. C'est d'ailleurs sur ce dernier point qu'insistera Salah Souilah, le secrétaire général de l'Union générale des commerçants et des artisans algériens (UGCAA), lors de la conférence de presse qu'il a tenue récemment. Il n'y ira pas par quatre chemins pour dire que c'est le marché informel qui mine tous les efforts déployés en matière de régulation. Mais, loin de toutes ces explications, le consommateur veut des réponses concrètes à ses questions. Qui est derrière la flambée de la mercuriale ? Cette dernière est-elle une fatalité à l'approche de chaque mois de Ramadhan ? A quelle gymnastique le citoyen, aux modestes moyens, devra-t-il s'adonner pour passer le mois de carême sans trop de problèmes ? Des questions qui resteront sans doute sans réponse. Une chose est sûre : à la faveur du mois sacré, les commerçants ne vont pas se faire prier pour dépouiller les citoyens. L'opération risque de durer dans la mesure où, après le Ramadhan, il faudra compter avec les dépenses de l'Aïd et celles de la rentrée scolaire. Bon courage à tous !