Photo : S. Zoheïr Par Abderrahmane Semmar Les jeunes Algériens flirtent de plus en plus avec la drogue. C'est, malheureusement, plus qu'un constat, mais un fléau qui s'est désormais enraciné dans notre pays. En proie au désœuvrement, au chômage, à l'exclusion sociale et au mal-vivre, nombreux sont les jeunes qui ont succombé facilement et sans la moindre résistance à la tentation de la «zetla». Pour preuve, la dernière étude menée par l'Office national de lutte contre la drogue, 72% des drogués en Algérie sont des adolescents ! Mêmes les filles n'échappent pas aux ravages de ce fléau puisqu'elles constituent, selon les enquêtes réalisées sur le terrain, notamment dans les lycées, au moins 12% des toxicomanes. «Le cauchemar commence pour le jeune drogué lorsque celui-ci abandonne ses études après son échec pour la 2ème ou 3ème fois lors d'une épreuve scolaire. La drogue déconnecte le jeune de ses études. Sa dépendance à ces substances psychédéliques portera préjudice à sa relation avec son entourage. Sa sociabilité se détruit à mesure que sa toxicomanie augmente. Sans études, loin de son entourage, le jeune drogué sombre après tout seul dans un cercle infernal qui peut le mener au pire», analyse un psychologue qui a pris en charge de nombreux jeunes toxicomanes dont les parcours chaotiques se ressemblent pratiquement tous. «Beaucoup de ces jeunes drogués que nous accueillons sont orphelins ou issus de parents divorcés. Nombreux sont aussi ceux qui vivent dans un milieu familial instable, marqué par les violences conjugales et parentales», relève encore notre interlocuteur en soulignant que la prise en charge de ces toxicomanes nécessite aussitôt un entretien avec un médecin ensuite une consultation chez le psychologue qui tentera de connaître les raisons du malaise ainsi qu'une thérapie. Viendront ensuite plusieurs consultations et un suivi très rigoureux du toxicomane. Mais comme les centres de désintoxication font cruellement défaut dans notre pays et que les parents rarement sensibilisés à l'importance d'accompagner leurs enfants toxicomanes sans les stigmatiser, la tragédie de ces jeunes drogués ne fera qu'accentuer leur souffrance. En attendant, la percée de la drogue dans le milieu des jeunes est encore plus dramatique que jamais. Jugeons-en. Une autre étude menée par l'Office national de lutte contre la toxicomanie démontre que le recours aux psychotropes et aux amphétamines en milieu scolaire est devenu une pratique courante. En effet, 45% des lycéens déclarent avoir consommé au moins une fois de la drogue, dont 8% sont des filles, alors que 12,5% en sont dépendants ! Des psychologues ont même constaté que des enfants âgés entre 9 et 11 ans ont consommé des psychotropes tels que les benzodiazépines, anti-parkinsoniens de synthèse ! Quant au cannabis, les solvants et les drogues dures, elles sont devenues le lot quotidien d'une grande partie des jeunes âgés entre 17 et 18 ans. Mais ce qui est encore plus effrayant, c'est qu'une grande partie des jeunes interviewés par des psychologues ne connaissent rien aux effets de la drogue et souvent ils ne considèrent pas les consommateurs comme des «drogués» ! D'autre part, il a été prouvé que les consommateurs réguliers de drogue sont beaucoup plus fréquents dans les situations de grande promiscuité. C'est dire enfin que le mal être de la drogue est suscité, voire encouragé, par celui que notre société fait subir à nos jeunes.