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Nabil Ourrad, digne héritier d'une grande lignée d'artisans bijoutiers Il a commencé à apprendre le métier du bijou artisanal d'At Yanni à l'âge de 11 ans
De notre correspondant à Tizi Ouzou Malik Boumati Il existe de ces gens sans lesquels une activité culturelle, artistique ou artisanale aurait disparu depuis la nuit des temps. Et quand on sait que certaines de ces activités existent depuis des siècles, nous sommes toujours tentés de saluer les auteurs de cette sauvegarde, ou de ce sauvetage dans certains cas. Et ce sont ceux qui la transmettent et ceux qui la reçoivent, donc la perpétuent, qui restent aujourd'hui à l'avant-garde de cette lutte contre la disparition de telle ou telle activité. Dans la wilaya de Tizi Ouzou, le meilleur exemple qu'on peut citer est, bien sûr, celui de l'artisanat, particulièrement la bijouterie d'argent d'At Yanni qui se transmet de père en fils depuis plusieurs générations. Pour cette localité dont la renommée du bijou n'est plus à faire, ce sont des dizaines de familles qui ont fait de cette activité leur gagne-pain, avant que la crise économique ne vienne tout remettre en cause. Parmi ces familles, on peut citer les Ourrad du village At Larba dont la relation avec le bijou et l'argent remonte à près de deux siècles. Nabil, du haut de ses 22 ans, ne cache pas sa fierté quand il raconte que l'un de ses aïeux, Mohand Oussalem Ourrad, artisan bijoutier, a reçu un diplôme d'honneur dans la capitale française en l'an … 1832. Il est aujourd'hui certain que Mohand Oussalem n'a pas manqué de transmettre son art à sa progéniture, au point qu'on le trouve chez l'un de ses descendants en 2008. Nabil Ourrad en parle avec une grande fierté que l'on retrouve dans ses paroles quand il dit que son père, ses oncles, sa mère, ses sœurs, ses cousins, ses cousines et même sa grand-mère ont hérité cet art ancestral. Lui qui a commencé à apprendre à transformer l'argent en bijou kabyle à l'âge de onze ans a de quoi être fier. «Quand j'avais onze ans, je traînais dans les ateliers de mes oncles et de mes cousins, situés à l'époque dans les vieilles maisons familiales, et cela m'arrivait souvent d'aider mon cousin Rabah dans son activité, généralement en accomplissant les choses les plus simples», dit Nabil qui se rappelle aussi que «c'est là qu'est née mon envie d'apprendre ce beau métier». C'est tout naturellement donc que Nabil se met à apprendre cet art pratiqué par toute la famille, lui qui a grandi dans des pièces où les différents outils de l'artisanat de bijouterie sont omniprésents, citant lors de l'entretien, le four, les différentes pinces et le chalumeau. «J'ai tout appris avec mon cousin Rabah», insiste-t-il comme s'il voulait rendre un hommage appuyé à son cousin germain, même si la supervision de son père, Yahia, avait son importance tout au long de son apprentissage. Nabil était encore mineur quand il est, enfin, senti comme un artisan à part entière, puisqu'il était capable de fabriquer n'importe quel bijou kabyle sans assistance, à l'âge de 16 ans, durant l'année 2002. N'ayant pas réussi ses études, c'est tout naturellement qu'il se retrouva dans la bijouterie paternelle au centre-ville de Tizi Ouzou, avenue Abane Ramdane. Même si la situation du bijou kabyle, particulièrement celui d'At Yanni, n'est pas reluisante, obligeant plusieurs familles à abandonner cette activité ou à se lancer dans l'activité informelle, le jeune Nabil Ourrad compte poursuivre cette activité, même après une coupure de quelques temps. Histoire d'ouvrir un nouvel atelier, dans les prochaines semaines, du côté de la ville des Genêts pour faciliter son travail et celui de son père. «Je pense que l'avenir de l'artisanat du bijou reste incertain aujourd'hui et il est difficile de prévoir ce que sera l'avenir, mais, pour ma part, je resterai dans la bijouterie, quelle que soit sa situation. Si, demain, l'artisanat n'est plus une activité sûre, j'orienterai mes enfants pour devenir bijoutiers, même en dehors de l'artisanat», affirme Nabil qui cite la cherté de la matière première et la baisse de la qualité du bijou fabriqué ces dernières années, à cause justement de cette cherté. Des aléas qui ont amené certains artisans bijoutiers à fabriquer n'importe quoi et n'importe comment pour pouvoir proposer des bijoux kabyles à moindre prix. A 22 ans, Nabil, s'il a décidé de perpétuer cet art, pense déjà à cette transmission propre à tous les artisans bijoutiers de la région d'At Yanni.