De notre correspondant à Béjaïa Kamel Amghar S'investir dans la sphère culturelle n'est pas un choix facile. L'entreprise relève presque de la gageure. Inutile de se perdre, ici, dans les méandres de cette difficulté, car nous en connaissons tous un bout. Cependant, il se trouve toujours des gens suffisamment téméraires, qui se saignent aux quatre veines pour créer et perpétuer des rendez-vous, promouvoir la création, célébrer l'art et la beauté. Des animateurs volontaires qui se dépensent sans compter à entretenir des îlots de culture, des oasis d'animation et d'ambiance, des ateliers d'échange et de communion, pour maintenir cette flamme sacrée toujours allumée. Les Rencontres cinématographiques de Béjaïa (RCB) constituent à ce propos un exemple de régularité qu'il convient d'encourager et de promouvoir. Cette manifestation, qui vient juste de clôturer sa sixième édition, est, en effet, entièrement organisée par des bénévoles. La formation des jeunes cinéastes, la promotion des œuvres méconnues de la nouvelle vague –notamment en ce qui concerne les courts et moyens métrages-, l'organisation de forums où l'ancienne et la nouvelle génération se donnent la réplique, la présentation des œuvres juvéniles des pays voisins et amis et l'ouverture de nouveaux horizons à la réflexion sur les métiers du cinéma constituent, dans l'ordre, les objectifs essentiels des organisateurs. Initiées en partenariat par les associations Project'heurts (PH) et Kaïna Cinéma, les RCB ont indéniablement contribué au lancement d'une dynamique cinématographique nouvelle à travers la wilaya et bien au-delà. Même si ce partenariat a été rompu pour des raisons qu'il est inutile de rappeler, le collectif de Project'heurts –qui a organisé en solo les deux dernières éditions- a jalousement gardé l'esprit et le concept originaux de l'initiative. «Pour cette année, les contributions de nos sponsors et les subventions publiques, qui totalisent près de 4 millions de dinars, nous ont permis de faire un focus sur le cinéma féminin dans les trois pays du Maghreb [Algérie, Maroc et Tunisie]. Cette dimension maghrébine du cinéma-jeune constitue pour nous à la fois une perspective et un axe de développement pour les éditions futures», s'enorgueillit Abdenour Houchiche, président de PH, en soulignant que ce sixième rendez-vous a été rehaussé par la présence d'une centaine de professionnels venant des trois pays nord-africains susmentionnés et de France. Un exploit eu égard au budget limité de la manif. Cinq jours durant (28 mai-2 juin), la maison de la culture Taos Amrouche a vu défiler du beau monde. Fictions, documentaires, films d'hier et d'aujourd'hui ont mobilisé les cinéphiles qui restent toujours à l'affût de ce genre d'entreprises. En parlant de cinéma, on ne peut ignorer aussi un autre rendez-vous automnal, les Ateliers du film documentaire (AFD), œuvre de l'association Cinéma et Mémoire (CM) en collaboration avec son homologue Kaïna Cinéma (KC). Formation et production figurent en tête des préoccupations de ces ateliers qui s'apprêtent à tenir leur second regroupement (du 15 au 29 octobre 2008). Cet espace ouvert aux expériences européenne et moyen-orientale en la matière –également soutenu par les Ateliers Varan de Paris, l'association Etouchane de Roubaix et Pôle Sud de Lausanne- est en phase de donner un saut qualitatif à cette nouvelle ébauche cinématographique. L'appel à candidature au stage de formation (10 projets seront retenus) vient d'être lancé. Les dix stagiaires de la session d'octobre 2007 mettent les dernières retouches à leurs films qui seront projetés à cette même occasion. Project'heurts ainsi que Cinéma et Mémoire font effectivement figure de fer de lance pour la promotion et le renouveau du septième art à Béjaïa, voire à l'échelle nationale. Ils méritent, à ce titre, l'appui des pouvoirs publics, l'intérêt des sponsors privés et l'indulgence du public pour les petites défaillances techniques et organisationnelles qui jalonnent leurs sympathiques entreprises.