L'Irak a exhorté samedi ses voisins, la Syrie et l'Iran, à cesser leurs ingérences présumées dans ses affaires intérieures, lors d'une conférence internationale à Bagdad qualifiée de "constructive" par les Irakiens et les Américains. Cette conférence a été marquée par des contacts directs entre délégués américains et iraniens, deux pays qui n'ont plus de relations diplomatiques depuis la crise des otages de l'ambassade des Etats-Unis à Téhéran en 1980. Les Etats-Unis ont parlé de discussions "constructives et efficaces". Mais en dehors d'un engagement commun à "combattre le terrorisme", les divergences sont demeurées nombreuses, les représentants américains soulignant que les déclarations iraniennes en faveur de la paix ne "suffisaient pas" et l'Iran réclamant un calendrier de retrait des troupes étrangères. Et les violences n'ont pas connu de répit au cours de cette journée, où 34 personnes ont péri à travers l'Irak, dont 26 dans un attentat suicide à Bagdad. Les représentants de 17 pays et organisations internationales, dont les Etats-Unis et leurs deux "bêtes noires", l'Iran et la Syrie, étaient réunis pour cette conférence consacrée aux moyens de ramener la paix en Irak, quatre ans après l'invasion américaine de mars 2003. Cette réunion devrait être suivie par une autre conférence, cette fois au niveau ministériel. Cependant, les participants de samedi ne sont parvenus à s'entendre ni sur le lieu ni sur la date de ce nouveau rendez-vous. "Nous demandons que les pays de la région et d'ailleurs cessent leurs ingérences et leurs tentatives pour influencer la situation politique en Irak, en soutenant certaines confessions, ethnies ou groupes", a affirmé le Premier ministre Nouri al-Maliki à l'ouverture de la conférence. "Il faut arrêter toute forme d'aide financière, d'incitation religieuse ou médiatique, de support logistique ou d'approvisionnment en armes et en combattants qui serviront à tuer nos enfants, nos femmes, les personnes âgées ou à attaquer nos mosquées et nos églises", a-t-il ajouté. L'ambassadeur américain Zalmay Khalilzad s'est félicité des discussions avec les Iraniens, tout en demandant aux voisins de l'Irak, dont l'Iran, de mettre fin à l'infiltration de combattants ou d'armes dans le pays. "Les discussions avec les Iraniens et les autres (délégués ndlr) sur l'Irak ont été constructives et efficaces. On verra évidemment ce qu'il adviendra dans l'avenir de l'approvisionnement en armes et du soutien aux milices", a-t-il commenté. Les déclarations iraniennes en faveur de la paix et de la stabilité en Irak "ne suffisent pas. La prochaine étape, c'est de voir comment ces déclarations seront traduites en actes positifs", a-t-il ajouté. Le représentant iranien, le vice-ministre des Affaires étrangères Abbas Araghtchi, a rejeté les accusations américaines. "Il n'y a aucune raison pour que nous interférions dans les affaires internes de l'Irak", a-t-il affirmé. M. Araghtchi a par ailleurs dit avoir besoin, "pour assurer la paix et la stabilité en Irak (...) d'un calendrier de retrait des troupes étrangères". A l'issue de la conférence, le ministre des Affaires étrangères irakien Hoshyar Zebari l'a qualifiée de "très positive et constructive". Il a cité parmi les "avancées majeures", la création de "trois commissions" sur la coopération en matière de sécurité, les réfugiés, l'énergie et le pétrole. Le ministre a également avancé que tous les participants étaient tombés "d'accord pour une nouvelle réunion au niveau ministériel". L'Irak a émis le désir d'organiser cette réunion, alors que l'Egypte et la Turquie ont proposé leurs services, selon le ministre. Sur ce point, M. Khalilzad a précisé que la secrétaire d'Etat américaine Condoleezza Rice se rendrait à cette conférence si elle avait lieu à Istanbul. Outre l'Irak, les Etats-Unis, l'Iran, la Syrie et l'Arabie Saoudite, les autres voisins de l'Irak, la Jordanie, la Turquie et le Koweït ainsi que l'Egypte, le Bahreïn, les quatre autres membres permanents du Conseil de sécurité de l'ONU - Russie, Chine, France, Grande-Bretagne - ainsi que la Ligue arabe, l'Organisation de la conférence islamique et l'ONU étaient présents à Bagdad. Tous les participants ont exprimé dans une déclaration de clôture "leur soutien à la souveraineté irakienne et le principe de non-ingérence".