La Banque centrale européenne a prévenu qu'il ne fallait pas, sous prétexte d'éviter une nouvelle crise, trop en demander en même temps aux banques, que ce soit avec de nouvelles taxes ou le durcissement des exigences réglementaires, sous peine de freiner la reprise. Alors que de plus en plus de pays dans le monde parlent de taxer les banques, pour leur faire payer la crise passée ou en prévoyance des futures, le futur vice-président de la BCE, le Portugais Vitor Constancio, a appelé à ne pas aller trop vite en besogne. "Nous avons besoin d'évaluer l'impact général de tout ce qui est à l'étude actuellement en matière de régulation du secteur bancaire", a-t-il dit en marge d'une réunion des ministres des Finances et des banquiers centraux de l'UE à Madrid. Tant que les études d'impact ne sont pas terminées, il est "un petit peu prématuré" de se prononcer, a-t-il encore dit. Parallèlement aux idées de taxation des banques, des travaux sont en cours, en Europe mais aussi au niveau international, pour durcir les exigences de transparence qui leur sont imposées et améliorer leurs fonds propres, avec l'espoir d'anticiper les prochaines crises. "Nous avons affaire à un ensemble, on ne peut pas traiter isolément les différents aspects et c'est l'ensemble qui doit être optimisé", a prévenu le président de la BCE, Jean-Claude Trichet, réclamant "un séquençage approprié". Le président de la BCE a recommandé aux Européens de choisir le meilleur moment pour imposer aux banques "des taxes éventuelles, des impôts éventuels et des contributions éventuelles (…) sans mettre en péril la reprise en cours". Relayé par Vitor Constancio, futur vice-président de l'institut d'émission, il a aussi demandé aux ministres présents à Madrid d'avoir à l'esprit l'autre effort déjà demandé aux banques européennes : le renforcement de leurs fonds propres, imposé à partir de 2012 par la réglementation internationale (normes dites "Bâle III"). La mise en garde de la BCE rejoint l'inquiétude déjà manifestée par la profession. Elle pourrait aussi freiner l'élan de plusieurs pays européens - parmi lesquels la France, l'Allemagne et le Royaume-Uni - en faveur d'un impôt censé brider le goût du risque des banquiers. Pour Jean-Claude Trichet, le moment était bien choisi : Michel Barnier, le commissaire chargé des Services financiers, venait tout juste de présenter à Madrid ses "orientations" en faveur d'un système qui contraindrait les banques à payer d'avance pour la prochaine crise. La clef en est un prélèvement obligatoire assis sur le risque. L'année 2009 a vu le lancement du chantier de la supervision financière dans l'UE. Le commissaire français veut y ajouter l'an prochain une "boîte à outils" européenne qui donnerait aux régulateurs nationaux les vrais moyens d'une gestion de crise. Cette trousse d'urgence, destinée à éviter des faillites comme en 2008, pousserait les banques à pallier elles- mêmes et sans délai leurs propres excès. Dans un arsenal destiné "à prévenir l'accumulation des risques", Michel Barnier inclut l'interdiction temporaire de verser des dividendes, la prohibition de certaines activités liées aux produits dérivés ou encore des restructurations imposées.