Une tâche herculéenne attend les pays économiquement les plus avancés s'ils veulent ramener leur endettement à leur niveau d'avant la crise, mais leur incapacité à y parvenir se traduirait par une hausse de leurs coûts de financement et pèserait sur leur croissance, avertit le Fonds monétaire international (FMI). Selon le rapport "Monitor fiscal" publié vendredi , malgré une évidente amélioration de la conjoncture économique, les pays riches du G20 ont peu réduit leurs déficits et le fardeau de leur dette devrait représenter 110 % de leur produit intérieur brut en 2015 contre 91 % aujourd'hui et 73 % en 2007, au tout début de la crise. Si la dette des Etats n'était pas réduite, le potentiel de croissance des pays riches pourrait être amputé de plus d'un demi-point de pourcentage par an, estime le FMI dans son nouveau rapport. Pour parvenir à contenir leur dette, les économies avancées devront inverser la tendance d'évolution de leurs comptes courants, pour passer d'un déficit moyen de 4,9% à un excédent de 3,8% d'ici 2020, précise-t-il. Un tel assainissement passerait à la fois par une réduction des dépenses et par une hausse des recettes, deux évolutions impopulaires et qui nécessitent une solide volonté politique. Mais le FMI ajoute que les difficultés actuelles de l'Europe liées à la dette publique, qui ont poussé la Grèce au bord du défaut et ont forcé les responsables politiques à élaborer un plan de stabilisation de 750 milliards d'euros, montrent que les marchés financiers peuvent contraindre les dirigeants à agir si ces derniers ne prennent pas l'initiative. "Les risques budgétaires se sont accrus, en particulier dans les économies développées", a affirmé le FMI dans la troisième édition de son "Rapport de surveillance budgétaire multinational". L'organisation a cité "trois raisons: les tendances budgétaires sous-jacentes se sont encore détériorées depuis le rapport de novembre, les marchés financiers ont davantage concentré leur attention sur les faiblesses budgétaires, et les progrès dans la définition des stratégies de sortie budgétaires ont été lents". La persistance de déficits publics élevés, qui oblige les Etats à emprunter actuellement des sommes sans précédent, a été depuis le début de l'année la source de fortes perturbations sur les marchés financiers mondiaux. La question est devenue dans de nombreux pays un des sujets les plus sensibles du débat politique. "Je n'ai pas besoin de m'étendre beaucoup là-dessus: les marchés font plus attention aux développements budgétaires", a observé lors d'une conférence de presse à Washington le directeur des Affaires budgétaires du FMI, Carlo Cottarelli. L'organisation dirigée par Dominique Strauss-Kahn se dit sensible aux craintes de voir des politiques d'assainissement budgétaire handicaper la reprise si elles sont engagées trop tôt, mais elle ajoute que ces politiques devraient dès à présent être davantage planifiées. "Je suis convaincu qu'il y a beaucoup de choses que les pays peuvent faire aujourd'hui pour renforcer la confiance dans la solidité budgétaire à long terme sans compromettre les perspectives de croissance", a dit Dominique Strauss-Kahn. Même s'il juge improbable une perte totale de confiance des investisseurs dans les finances des Etats, le Fonds ajoute que les expériences récentes de l'Europe "ont clairement montré que ce risque ne peut pas être ignoré". Il souligne qu'au sein du G7, le rapport entre la dette publique et le produit intérieur brut (PIB) est en passe de dépasser les niveaux observés après la Seconde Guerre mondiale. Tout en soulignant l'impact prévisible du vieillissement de la population sur les finances publiques des économies avancées au cours des années à venir, le rapport estime que relever l'âge de départ en retraite contribuerait à assainir les finances publiques sans peser sur la croissance économique. Il suggère aussi d'améliorer la collecte de la TVA dans les pays qui en sont dotés et d'instaurer une taxe sur la valeur ajoutée là où elle est encore absente, comme aux Etats-Unis. "Par exemple, la mise en place d'une TVA aux Etats-Unis et un doublement du taux de TVA très bas du Japon pourrait permettre de lever 4,5% et 2,6% du PIB respectivement dans ces pays", poursuit le FMI. Parmi les autres possibilités évoquées par le rapport figurent une augmentation de la fiscalité de l'alcool, du tabac et des carburants, l'adoption d'une taxe sur les émissions de dioxyde de carbone et le relèvement des taxes sur l'immobilier.