Le secrétaire général de l'ONU Ban Ki-moon a déclaré lundi à la Ligue arabe que la communauté internationale devait parler d'une seule voix sur la Libye, après les critiques de l'organisation panarabe sur les frappes de la coalition internationale sur ce pays. "Il est important que la communauté internationale parle d'une seule voix pour mettre en oeuvre la seconde résolution du Conseil" de sécurité de l'ONU, a-t-il dit en référence au texte adopté jeudi autorisant une action militaire pour empêcher les forces du régime de Muammar Khadafi d'attaquer des civils. Ban Ki-moon, en visite au siège de la Ligue au Caire, a ajouté que des "mesures fortes et décisives" n'avaient été rendues possibles que grâce au soutien de la Ligue arabe, le 12 mars dernier, à l'imposition d'une zone d'exclusion aérienne au-dessus de la Libye. Le chef de la Ligue arabe Amr Moussa a déclaré hier qu'il soutenait la résolution de l'ONU autorisant l'intervention militaire en Libye, tout en insistant sur la protection des civils. Lors d'une conférence de presse tenue au Caire avec Ban Ki-Moon, Moussa a clarifié sa position après avoir dénoncé, dimanche, les bombardements ayant provoqué "la mort et les blessures de nombreux civils libyens". Ce qui s'est passé en Libye diffère du but qui est d'imposer une zone d'exclusion aérienne et ce que nous voulons c'est la protection des civils et pas le bombardement d'autres civils", a affirmé le secrétaire général de la Ligue arabe, Amr Moussa. Il a estimé que "la protection des civils en Libye ne nécessite pas forcément le recours à des opérations militaires". "Nous sommes en ce moment en consultation pour une réunion destinée à suivre tous les développements dans le monde arabe, notamment en Libye", a-t-il indiqué. "La position de la Ligue arabe sur la Libye a été décisive, et dès le début, nous avons suspendu la Libye. (...) Ensuite, nous avons demandé aux Nations unies de mettre en place une zone d'exclusion aérienne, et nous respectons la résolution de l'ONU, et il n'y a aucun désaccord, a dit le diplomate égyptien. Elle vise à protéger les civils, et c'est cela qui nous intéresse." Les bombardements de la coalition internationale contre le régime du dirigeant libyen Mouammar Kadhafi ont touché le coeur de Tripoli dans la nuit de dimanche à lundi, et tentaient lundi de couper les lignes de ravitaillement de ses forces. "Ses forces sont plutôt éparpillées entre Tripoli et Benghazi (à 1 000 km à l'Est) et nous allons essayer de couper le soutien logistique", avait expliqué dimanche le plus haut gradé américain, l'amiral Michael Mullen, après avoir assuré que la zone d'exclusion aérienne était instaurée. La coalition, avec à sa tête les Etats-Unis , la France et la Grande-Bretagne , est entrée en action samedi en bombardant par air et par mer des objectifs militaires, en vertu de la résolution 1973 de l'ONU adoptée jeudi soir. Dans la nuit, des missiles ont détruit un bâtiment administratif à l'intérieur du complexe résidentiel de Kadhafi dans le sud de Tripoli, où les habitants ont entendu de fortes explosions. Selon la coalition, il abritait un centre "de commandement et de contrôle" des forces gouvernementales. Plusieurs hauts responsables ont assuré que la coalition ne cherchait pas à viser directement le colonel Kadhafi. Mais le ministre britannique des Affaires étrangères, William Hague, a laissé entendre lundi que cela pourrait arriver. L'intensité des bombardements a en effet provoqué de vives réactions. Le chef de la Ligue arabe, Amr Moussa, qui avait soutenu l'instauration d'une zone d'exclusion aérienne, a estimé que les bombardements s'écartaient de leur but. L'Allemagne s'est cependant dite confortée dans ses fortes réserves à l'égard de l'opération militaire, et la Russie a jugé "inadmissible" d'utiliser le mandat de l'ONU "pour mener à bien des objectifs qui vont clairement au-delà de ses dispositions". Le président tchétchène, Ramzan Kadyrov, a estimé lundi que la "machine de guerre" américaine était lancée et qu'elle ne s'arrêterait pas, comme en Afghanistan et en Irak. L Pour Cuba, l'intervention occidentale en Libye "constitue une manipulation évidente" de la Charte de l'ONU et de l'autorité du Conseil de sécurité, marquée par la politique de "deux poids deux mesures". "La résolution 1973 adoptée jeudi soir par le Conseil de sécurité n'autorise en aucun cas ce genre d'attaques sur le territoire libyen, qui constituent une violation du droit international", souligne une déclaration du ministère cubain des Affaires étrangères. Pour sa part, la Turquie, par la voix de son Premier ministre Recep Tayyip Erdogan, a appelé à la fin de l'intervention militaire de la coalition internationale contre la Libye. "Il faut que la Libye retrouve rapidement sa stabilité", insiste le chef du gouvernement turc. La presse turque a également critiqué l'opération militaire faisant des dizaines de victimes parmi les civils en Libye, s'inquiétant d'"un nouvel Irak". Le Pentagone a affirmé dimanche soir qu'il n'y avait "pas d'indication" de victimes civiles dans les zones touchées par la coalition. Le régime libyen a annoncé que 48 personnes avaient péri samedi soir. Le Royaume-Uni a annoncé lundi matin avoir renoncé dans la nuit à une opération prévue dans la nuit, ses avions ayant repéré des civils dans le périmètre visé. Un radio amateur néerlandais a révélé dimanche la présence en Libye d'un avion américain destiné aux opérations de propagande, qui diffusait un message dissuadant les navires libyens de prendre la mer, alors que les navires de la coalition internationale ont mis en place un blocus naval. La résolution 1973 du Conseil de sécurité de l'ONU exige l'arrêt complet des attaques contre les civils, impose une zone d'exclusion aérienne en Libye et permet des frappes pour contraindre le colonel Kadhafi à cesser la répression qui a fait des centaines de morts et poussé 300 000 personnes à fuir le pays. R.I.