La création de nouveaux périmètres irrigués pour la production des céréales au Sahara ne semble pas répondre aux objectifs fixés par les initiateurs de cette opération. C'est ce que révèle une étude d'un groupe de chercheurs de l'Institut national de la recherche agronomique (INRA). Sur le plan économique, explique-t-on, la production totale obtenue reste relativement faible (moins de 15 000 tonnes par an pour un déficit national de 3 millions de tonnes), et le rendement moyen est nettement au-dessous du seuil de rentabilité. Autrement dit, la céréaliculture en milieu saharien rencontre des contraintes relatives à la faible maîtrise de l'itinéraire technique. Selon les chercheurs, la pratique actuelle de l'irrigation est totalement empirique ; elle provoque un gaspillage de l'eau qui est une ressource non renouvelable au Sahara, et engendre une salinisation secondaire intense des terres. Le niveau de salinité, atteint après 5 campagnes d'irrigation à l'eau de la nappe de l'Albien, dépasse le seuil de tolérance des cultivars de blé dur habituellement utilisés dans ces régions. La création de nouveaux périmètres irrigués au Sahara crée de nouveaux espaces de conservation et de prolifération de certains phytophages. Plus globalement, cette opération de production des céréales au Sahara sur la base d'une faible maîtrise technique correspond à une agriculture économiquement non rentable, techniquement non fiable, et écologiquement non durable. L'utilisation de l'eau d'irrigation n'est pas maîtrisée dans la mesure où, dès le début du mois de mars, le pouvoir évaporant de l'air provoque la vaporisation de 30 % du volume d'eau d'arrosage avant son arrivée à la surface du sol. Par ailleurs, les volumes d'arrosage n'étant pas correctement évalués, l'irrigation en excès pendant les premiers stades végétatifs entraîne une perte de 500 à 3 500 m3 d'eau/jour par pivot de 50 hectares. Cette consommation non raisonnée de l'eau entraîne déjà dans la région d'Adrar un rabattement du niveau piézomètrique dont la conséquence immédiate serait la diminution du débit des foggaras, et leur probable assèchement à moyen terme. La création de nouveaux périmètres a entraîné l'introduction de nouveaux problèmes phytosanitaires. La céréaliculture sous pivot modifie fondamentalement les conditions physiques et constitue une cible privilégiée pour les insectes phytophages nomades et migrateurs tels que les acridiens. La sole céréalière actuelle au Sahara occuperait environ 5 500 hectares. Elle est répartie principalement dans les régions de Ouargla (sud-est saharien) et d'Adrar (Sahara central). Le rendement obtenu en grains est compris entre 10 et 60 q/ha, le seuil de rentabilité économique estimé sur la base de données de la campagne 2000-2001 serait de l'ordre de 40 q/ha . La céréaliculture au Sahara algérien est actuellement caractérisée par de faibles rendements, nettement inférieurs à celui qui correspond au seuil de rentabilité économique. Les données sont présentées à titre indicatif de la tendance générale, car certaines différences existent entre les valeurs obtenues selon la source d'information et limitent la fiabilité des données. La salinisation des sols constitue un facteur essentiel responsable de la diminution des rendements lors des premières années de mise en culture. Cette évolution régressive provoque un abandon des terres salées. En effet, dès que le rendement diminue lors de 4 ou 5 campagnes de production, certains exploitants de la région d'Adrar déplacent leur rampe d'arrosage pour occuper une nouvelle parcelle en abandonnant la parcelle dont le sol est salé. Cette pratique entraîne une stérilisation des terres sahariennes dont la fertilité initiale naturelle est relativement limitée.