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Pour la mise en place d'un Revenu COVID-2020 en solidarité avec les travailleurs privés affectés par la crise sanitaire
Publié dans Le Maghreb le 14 - 04 - 2020

La pandémie du coronavirus qui vient de frapper l'Algérie comme elle a frappé l'ensemble des pays à travers le monde a ouvert la voie à une crise sanitaire très préoccupante. Dans la phase actuelle, la réponse strictement sanitaire et la prise en charge médicale des personnes contaminées constituent la priorité absolue pour tous les acteurs de la vie publique.

Les autorités algériennes ont pris la décision, tout à fait justifiée, d'imposer le confinement d'une partie importante de la population. A ce stade, il est malaisé de se prononcer sur la durée effective de cette période de confinement des personnes et de sortie de la pandémie. L'observation de l'expérience des régions qui, en Chine ou en Europe, ont été les premiers foyers d'éruption de la maladie, laisse néanmoins penser qu'une période minimale de trois mois est à envisager raisonnablement. D'un strict point de vue économique, cette crise sanitaire aura des conséquences non négligeables dans un pays comme l'Algérie. Pour l'immédiat, il importe avant tout de concentrer l'attention sur les effets négatifs qu'engendre inévitablement le blocage de secteurs entiers de l'activité économique, en termes de pertes significatives de revenus, aussi bien pour les entreprises que pour une partie importante de la population.

2-Pour les entreprises, publiques ou privées, c'est une situation tout à fait inédite. En dehors de celles dont les activités sont maintenues parce qu'activant dans des secteurs considérés comme essentiels (agroalimentaire, pharmaceutique, etc.), toutes les autres sont confrontées de facto à une érosion très forte de leur chiffre d'affaires. Ainsi privées de revenus pour une période prolongée, elles se retrouvent dans l'incapacité de maintenir le versement de masses salariales sans activité au risque d'hypothéquer purement et simplement leur survie.
Le problème n'est pas spécifiquement algérien. Une étude réalisée aux USA par le JP Morgan Institute, sur un effectif de près de 600 000 entreprises, montre clairement que la majorité d'entre elles sont globalement dans l'incapacité de survivre au blocage prolongé d'un mois de leur activité.
3-S'agissant des revenus de la population, on relèvera que le gouvernement a pris la décision de libérer la moitié des employés de la fonction publique tout en maintenant le versement de leurs salaires. Les personnels des entreprises publiques semblent avoir bénéficié de la même orientation, y compris pour celles d'entre elles qui sont forcées à l'arrêt de leurs activités.
Le problème demeure néanmoins entier pour les employés du secteur privé et particulièrement pour tous les employés relevant du secteur informel et qui, dans l'incapacité de travailler, perdent ainsi la seule source de revenu à laquelle ils pouvaient accéder. Les autorités publiques algériennes ne peuvent pas raisonnablement se désintéresser de ce problème. On notera d'ailleurs que lors des derniers messages qu'ils ont délivrés à la population, le Président de la république et le Premier ministre ont eux-mêmes déclaré que personne ne serait laissé de côté.
4-Aussi, comme on peut présumer que la résilience de la population va être mise à rude épreuve au-delà d'un mois de confinement, d'inactivité et d'assèchement progressif de ses revenus, il parait nécessaire que cet engagement verbal des pouvoirs publics puisse être suivi d'une traduction concrète sur le terrain, dans les délais les plus brefs possibles. En d'autres termes, il est recommandé que, à l'image de ce qui est fait dans de nombreux pays développés ou en développement, une aide budgétaire spécifique soit apportée à cette catégorie des citoyens qui ont pu perdre leurs revenus du fait de cette crise sanitaire qui est venue frapper l'économie nationale.
5- Comment estimer le poids réel de la population ainsi concernée et, en conséquence, l'impact budgétaire d'une assistance financière qui lui serait dédiée ? Si l'on s'en tient à la dernière enquête ONS sur l'emploi, datée de Mai 2019, la totalité des personnes occupées se chiffrait à 11,3 millions, parmi lesquelles 7,0 millions sont employées par le secteur privé. On ne dispose pas des informations concernant la répartition de ces dernières, entre secteur formel et secteur informel et encore moins de la proportion des activités du secteur privé qui sont affectées par la crise sanitaire actuelle. Si l'on prend comme base un taux de 70% des personnes employées qui sont touchées, on aboutit à une population de quelques 5 millions d'employés qui demanderaient à être assistées au cours d'une période que l'on pourrait à ce stade estimer à trois mois. Ainsi, en prenant comme base une aide forfaitaire mensuelle de 10 000 DA qui serait consentie durant trois mois à cette catégorie de la population, on aboutit à une prévision de l'impact budgétaire pour un montant global de 150 Mds de DA. Si le principe d'une telle aide venait à être retenu in fine, il reste un double écueil à surmonter : d'une part celui de son financement et d'autre part, celui de sa mise en œuvre, pour une population que les statistiques et le système d'information publics ont des difficultés à saisir.
6- La décision consistant à mobiliser une telle enveloppe financière est malaisée et on peut comprendre que les autorités hésitent à s'y engager. En effet, les finances publiques algériennes ont été mises à rude épreuve au cours des dernières années, avec l'accumulation de déficits budgétaires annuels de plus en plus insupportables et qui n'ont pu être couverts jusqu'ici que par le recours au financement monétaire par la Banque centrale, à hauteur de près de 35% du PIB national. A cette situation déjà complexe, se sont ajoutés au cours des premiers mois de cette année 2020, l'affaissement brutal des prix pétroliers, principale ressource fiscale du budget, suivi maintenant par la forte dépression de l'activité économique nationale résultant de cette crise sanitaire tout à fait imprévisible.
Les effets délétères de ces événements sont encore difficiles à chiffrer, mais on imagine facilement l'étendue de leurs implications négatives sur les comptes publics. Aussi, à un moment où le gouvernement a déjà annoncé la décision de réduire de 30% le budget de fonctionnement de l'Etat algérien, il lui est difficile d'envisager une dépense nouvelle et imprévue de 150 Mds de DA, quand bien même celle-ci peut paraître modeste au regard des 4 893 Mds de DA de dépenses de fonctionnement inscrites au budget de l'année 2020 (soit 3%).
Deux solutions potentielles demeureraient ainsi ouvertes :
- d'une part, une contribution de solidarité de l'ensemble des employés sur le territoire national, ceux en tous cas qui perçoivent aujourd'hui cette rémunération. La crise sanitaire actuelle a créé une situation qui s'assimile presque à un état de guerre, dans la mesure où il affecte indistinctement l'ensemble des activités et qu'il oblige le pays entier à consacrer l'essentiel de ses efforts à une crise sanitaire inédite. Par ailleurs, en situation de confinement, les besoins de dépenses des individus sont réduits à l'essentiel, à savoir l'hygiène, l'alimentation, l'hébergement, etc. L'idée serait alors de solliciter, sur une base progressive, les revenus supérieurs à la moyenne du salaire national lequel, selon l'ONS, se situait à un niveau de 41 000 DA (enquête salaires ONS de 2017). L'appel aux contributions volontaires des citoyens devrait rester bien entendu totalement ouvert.
- d'autre part, l'autre solution possible consisterait à recourir de manière exceptionnelle au financement non conventionnel par création de monnaie. Un recours modeste qui, pour une fois, se justifierait amplement dans la mesure où il correspond à ce qui est pratiqué aujourd'hui dans un grand nombre de pays, développés ou en développement, qui sont confrontés aux mêmes effets de cette crise sanitaire mondiale.
7- A supposer que la contrainte strictement financière soit résolue, l'autre problème encore plus redoutable qui se posera inévitablement est celui de la mise en œuvre d'une mesure consistant à payer une population d'employés à faible revenu (pour l'essentiel informelle), que l'administration publique ne sait pas appréhender au stade actuel. Aussi, pour garantir l'efficacité de l'opération et la rapidité de sa mise en œuvre, le système devrait-il être simplement déclaratif, fondé sur la confiance et la solidarité. On imagine que cela risque de susciter des phénomènes de fraude, mais ceux-ci pourront être limités par l'affichage transparent des listes de bénéficiaires et, le cas échéant, aisément détectés et sanctionnés. Dans la pratique, le défi est celui d'inventer, en s'appuyant sur les technologies éprouvées et déjà existantes, les mécanismes de transferts sociaux opérationnels qui font aujourd'hui défaut.

7.1- Il n'existe malheureusement pas de mécanismes pour transférer des fonds aux citoyens dans le besoin : il n'existe pas de registre de personnes économiquement fragiles ; le taux de bancarisation, très en retard, n'est que de 43% ; les paiements électroniques sont insuffisamment régulés et ne sont pas praticables à large échelle ; les mécanismes de distribution de cash ou d'aide sont quasi inexistants. Pourtant, des solutions innovantes existent. Ainsi, en capitalisant sur le développement de la téléphonie mobile et l'architecture déjà existante des transferts de crédit téléphoniques, nous pourrions construire un système pour aider les travailleurs et les familles économiquement affectés par le confinement.
7.2- Bien que le cadre réglementaire complet pour le paiement mobile ne soit pas en place, il est possible de démarrer une expérience concrète sur la base des quelques éléments suivants qui a été suggérée par des spécialistes algériens :

o Création d'une page web afin que les travailleurs informels puissent postuler à des aides.

o Les critères d'éligibilité et d'exclusion devront être définis par le gouvernement. Il s'agit de cibler fondamentalement tous les employés du secteur informel, ainsi que les artisans et entrepreneurs individuels ayant perdu leur emploi ou leur revenu. Pour les employés du secteur privé formel connaissant le même problème de perte de revenu, le transfert du revenu COVID 2020 pourra être opéré via leur entreprise. La procédure d'éligibilité devrait être aussi simple que possible, à base de déclaration sur l'honneur avec mention explicite de sanctions auxquelles s'expose tout contrevenant.

o Mise en place d'une base de données des bénéficiaires contenant un couple unique composé du numéro de la carte d'identité nationale et d'un numéro de mobile.

o Les transferts d'argent de l'Etat sont opérés via les opérateurs mobiles, proportionnels au nombre de bénéficiaires.

o Des transferts de crédit-temps sont opérés des opérateurs vers les bénéficiaires.

o Le crédit temps devient une monnaie d'échange auprès des commerces essentiels, les commerçant étant eux même équipés de cartes SIM.

o Utiliser les mécanismes existants de cash-out du crédit temps auprès de semi-grossistes et grossistes de crédit temps.

o Afin de contrôler l'usage de fonds par les opérateurs téléphoniques, les fonds alloués par l'Etat seront mis sur des comptes écrous, sous la surveillance de la Banque d'Algérie.

o L'absence de textes réglementaires n'est pas un problème dans la mesure où le cadre approprié est très simple et peut être mis sur pied dans un délai très bref par les autorités compétentes.

o En résumé, il s'agit de s'appuyer sur le réseau en place de distribution des crédits téléphoniques en utilisant sa fonction d'accès direct à l'ensemble des citoyens à travers tout le territoire national.

7.3- Certains aspects techniques devront être pris en charge par les opérateurs tels que le relèvement du plafond de transferts de crédit et éventuellement des serveurs à mettre en place, de sorte à supporter le nombre de transactions qui devraient augmenter. De plus, la gratuité des transactions devra être garantie par les opérateurs dans un effort de solidarité.

Le dispositif ainsi dessiné pourrait être mis en place rapidement pour parer aux besoins des individus ayant perdu leur revenu du fait du confinement, si les pouvoirs publics optaient pour une telle solution.

8- En conclusion, il faut souligner encore une fois que de très nombreux pays n'ont pas hésité à mettre en place un tel mécanisme d'aide qui est vital pour une part non négligeable de leur population. Les pays en développement voisins, Tunisie et Maroc, ont, à titre d'exemple, bel et bien déjà mis en place ce type d'assistance financière pour leurs citoyens dans le besoin.
Ce qu'il faut comprendre, par-dessus-tout, et qui motive la présente réflexion, c'est que l'aide directe à apporter aux citoyens en détresse est une condition de base pour l'efficacité et pour le plein respect des mesures de confinement. Ainsi que l'ensemble de la communauté scientifique et médicale le martèle depuis le premier jour, celles sont fondamentales pour gérer au mieux cette crise sanitaire. Si ce principe en est acquis, il est évident que toutes les solutions qui permettraient d'atteindre concrètement l'objectif ciblé sont bien entendu les bienvenues. Enfin, n'oublions pas que, une fois la crise sanitaire passée, c'est un vaste chantier de réformes économiques qui va s'imposer inéluctablement dans toute sa complexité et dans toute sa rigueur. Ces réformes devront, d'une manière ou d'une autre, être acceptées par la population et c'est pourquoi les autorités économiques nationales auront besoin de disposer d'un dispositif d'aide sociale éprouvé leur permettant de cibler efficacement les couches les plus fragiles de la population. De ce point de vue, la crise actuelle leur offre une occasion précieuse de tester un tel dispositif grandeur nature et, ce faisant, de pouvoir mieux le calibrer au cours des prochains mois et des prochains années.


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