La r�ponse se trouve sans doute dans au moins deux ph�nom�nes. Le premier est l�affaiblissement des valeurs sociales, la morale personnelle de beaucoup de gens pla�ant l�am�lioration de leur situation mat�rielle au-dessus de l�int�r�t g�n�ral et de leur devoir envers la soci�t�. Le second est le manque de transparence et de responsabilit� au sein du gouvernement. En Alg�rie, comme dans nombre de pays, le sentiment g�n�ral est que le service public est d�tourn� de sa finalit� et que la corruption pr�vaut dans les relations entre une grande partie du secteur public et ses partenaires commerciaux priv�s. Les gens ont l�impression � apparemment partag�e par les int�ress�s � que les fonctionnaires sont l� pour se servir et servir les ambitions politiques des responsables � un plus haut niveau, dans l�espoir d�en tirer � leur tour profit pour leur carri�re. Leur responsabilit� devant le peuple est purement formelle et ne se manifeste que lors d�interventions devant le Parlement ou dans leurs discours dans les conf�rences internationales ou aux Nation unies. Cette pr�sentation est peut-�tre injuste pour beaucoup d�entre eux, mais c�est un sentiment largement r�pandu. Les tenants du statu quo recourent parfois � l�argument selon lequel la �bonne gouvernance� serait un b�ton fabriqu� dans les pays industrialis�s pour �battre� les pays en d�veloppement et les pays en transition. Ce raisonnement suppose que la �bonne gouvernance� est un concept du XXe si�cle, mis au point par les pays industrialis�s pour servir leurs propres besoins. M�me une lecture en diagonale de l�histoire suffit pour s�apercevoir que cela est loin de la v�rit�. Tout au long des si�cles, il y a eu des dirigeants �clair�s qui ont cherch� � instaurer et � maintenir des syst�mes de gouvernement justes et honn�tes. Ceux-ci n��taient pas confin�s � l�Europe, mais r�pandus dans toutes les r�gions du globe. La dynastie chinoise des Chin (il y a plus de 2 200 ans), le second calife des musulmans Omar 1er (634- 644) et le roi Charles XII de Su�de (en 1713) ne sont que trois exemples de ces tentatives effectu�es dans diff�rentes cultures tout au long de l�histoire. Le mythe de la culture ou les horreurs du colonialisme L�un des arguments avanc�s pour justifier la corruption est le �relativisme culturel�. La corruption est souvent pr�sent�e dans les pays d�velopp�s comme un fait culturel de beaucoup de pays en d�veloppement. Le fait que les gens tol�rent dans tel ou tel pays la demande d�une petite r�mun�ration en �change de la fourniture de services administratifs (d�livrance de permis, de licences, etc.) ne signifie pas n�cessairement qu�ils l�approuvent. Il se peut simplement qu�ils la consid�rent comme le moyen le plus efficace pour obtenir ce qu�ils veulent ou ce dont ils ont besoin. Ce sentiment pouvant �tre progressivement �branl� par la hausse des prix... ou an�anti plus brutalement lorsque les consommateurs en viennent � penser que la p�nurie justifiant cette pratique est d�origine artificielle ou que d�autres solutions sont possibles. Pourtant, pourrait-on objecter, pourquoi la plupart des pays d�velopp�s ou en d�veloppement ont-ils des lois de lutte contre la corruption si cette pratique fait effectivement �partie de leur culture � ? Le politologue Michael Johnston fait remarquer qu��un examen complet des implications de la corruption dans un syst�me donn� doit �tre r�alis� dans le contexte des facteurs sp�cifiques � ce syst�me. L�existence de dissensions ethniques entre les �lites, l�influence des normes de parent� sur l��cart de perception des pratiques de copinage par les citoyens et les responsables d�une part et la loi d�autre part, ou l�exclusion de certains int�r�ts �conomiques des processus de prise de d�cisions, par exemple, peuvent tous �tre des �l�ments d�terminants du sc�nario de corruption dans des contextes sp�cifiques �. Dans certains cas, la corruption peut �tre la cons�quence de pratiques introduites dans une culture par une puissance �trang�re. L�Indon�sie est soumise � une corruption massive. Toutefois, certains auteurs affirment que ce ph�nom�ne n�est pas imputable aux Indon�siens eux-m�mes, mais � la �Compagnie hollandaise des Indes orientales �. Ses hommes �taient en effet sous-pay�s et expos�s � toutes les tentations offertes par la combinaison d�une organisation indig�ne faible, de perspectives commerciales extraordinaires et d�une absence presque totale de contr�le par leur pays d�origine ou par Java... Les responsables s�enrichissaient en volant la compagnie. Autre exemple : bien que la Tha�lande soit le seul pays de l�Asean � ne pas avoir �t� colonis�, elle n�est pas �pargn�e par la corruption. N�anmoins, l�absence de domination coloniale ne garantit pas l�immunit� face au mal de la corruption. En effet, dans le cas de la Tha�lande, la corruption est une maladie end�mique que l�on peut faire remonter aux exactions des fonctionnaires de la bureaucratie du seizi�me si�cle. Que, dans le pass�, le colonialisme ait contribu� ou non au d�veloppement de la corruption, il semble n�anmoins y avoir un lien tr�s fort dans ce domaine entre un certain nombre d�ex-colonies et leurs anciens �ma�tres� coloniaux d�Europe.